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Brumaire
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r L ’effet de l’ombre du volcan portée au loin
sur la mer pendant le coucher du soleil, avait
■ quelque chose d’une majesté imposante, mais
qu’il est impossible de rendre. Lorsque la mer
était encore colorée par les derniers rayons dû
jour dont la teinte rougeâtre est si remarquable
, un cône bleuâtre s’étendait jusqu’à
ses limites sensibles : ce cône représentait fidèlement
la montagne un peu alongée dont
le sommet aminci semblait vouloir dépasser
l’horizon en se réfractant dans l’atmosphère.
Quand la nuit fut tout-à-fait close, nous aperçûmes
très-distinctement une lumière.au lieu
où est située l’habitation de M. Deschasseurs,
cet habitant de chez lequel j ’étais parti pour
faire ma première ascension sur la montagne.
Peut-être dans cet instant Mi Deschasseurs et
sa famille cherchaient le frais sur leur terrasse ,
tandis que nous cherchions à nous réchauffer
à la chaleur d’un.,-volcan. Sans douté la . lueur
extraordinaire que jetait le cratère, attirait
les regards de ces créoles qui étaient, bien
loin de soupçonner que quelqu’un de leur
connaissance fut à demi-portée de fusil de
J’objet qui causait leur admiration et leur
effroi. Du côté opposé, c’était le feu et la
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fumée du camp ou nous avions laissé Jouvan-
court, qui se distinguaient dans les ténèbres
des solitudes les plus sauvages.
Selon que j’en étais convenu avec mon
ami, je fis exhausser une grande couverture
de laine en manière de pavillon ; et il me dit
le lendemain qüé la vive lumière qui nous
éclairait, nous avait très-bien fait distinguer
delà prodigieuse distance où il était de nous.
Après cela nous tirâmes deux coups de fusil ;
mais il se passa un tems si considérable
avant que l ’on pût apercevoir la réponse, que
je ne l’attendais plus, quand un noir m’assura
qu’il avait aperçu un coup de fusil5 et, en
effet, bien long-tems après nous entendîmes
une explosion étouffée, très-distincte du frémissement
que produisait le cratère. Au moyen
d’une montre bien exacte, je me servis de
l’intervalle qu’il y eut entre le feu et le bruit,
pour vérifier la distance exacte du mamelon
Central au piton Berth.
Le vent portait les fumées du côté opposé
où nous étions. J’aperçus des oiseaux de mer
que dans le pays on nomme fouquets et qui
se retirent la nuit dans les hautes montagnes,
passer sous le vent du cratère sarfs en paraître
incommodés : l’un d’eux traversa par-
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