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l’on joint à cette preuve toutes celles qu’on doit tirer des
convenances que je viens d ’expofer, il me femble qu’on
n ’en pourra plus douter.
Si nous examinons tous les autres peuples qui font fous la
zone torride au delà de l’Afrique, nous nous confirmerons
encore plus dans cette opinion : les habitans des Maldives,
de Ceylan , de la pointe de la prefqu ilïe de 1 Inde , de
Sumatra, de Malacca, de Bornéo, de Célebes, des Philippines,
&c. font tous extrêmement bruns, fans être abfolu-
ment noirs, parce que toutes ces terres font desilîesou des
prefqu’ifles ; la mer tempère dans ces climats l’ardeur de
l’air, qui d ’ailleurs ne peut jamais être auffi grande que dans
l ’intérieur ou fur les côtes occidentales de l’Afrique, parce
que le vent d ’eft ou d ’oueft qui règne alternativement dans
cette partie du globe, n’arrive fur ces terres de l’Archipel
Indien qu’après avoir pafTé fur des mers d une tres-vafte
étendue : toutes ces ifles ne font donc peuplées que d ’hommes
bruns, parce que la chaleur n’y eft pas exceflive ;
mais dans la nouvelle Guinée ou tèrre des Papous, on
retrouve des hommes noirs & qui paroiffent etre de vrais
Nègres par les defcriptions des voyageurs, parce que ces
terres forment un continent du côté de l’eft, & que le vent
qui traverfe ces terres eft beaucoup plus ardent que celui
qui règne dans l’océan Indien. Dans la nouvelle Hollande
où l’ardeur du climat n’eft pas fi grande, parce que cette
terre commence à s’éloigner de l’équateur, on retrouve
des peuples moins noirs &affezfemblables aux Hottentots;
ces Nègres & ces Hottentots que l’on trouve fous la même
latitude,
latitude, à une fi grande diftance des autres Nègres & des
autres Hottentots^, ne prouvent-ils pas que leur coiueur
ne dépend que de l’ardeur du climat! car on ne peut
pas foupçonner qu’il y ait jamais eu de communication
de l ’Afrique à ce continent auftral, & cependant on y
retrouve les mêmes efpèces d ’hommes parce qu’on y
trouve les circonftances qui peuvent occafionner les mêmes
degrés de chaleur. Un exemple pris des animaux
pourra confirmer encore tout ce que je viens de d ire , on
a obfervé qu’en Dauphiné tous les cochons font noirs, &
qu’au contraire de l’autre côté du Rhône en Vivarais, où
il fait plus froid qu’en Dauphiné, tous les cochons font
blancs ; il n ’y a pas d ’apparence que les habitans de ces
deux provinces fe foient accordez pour n’élever les uns
que des cochons n o irs, & les autres des cochons blancs,
&il me femble que cette différence ne peut venir que de
celle de la température du climat, combinée p e u t-ê tre
avec celle de la nourriture de ces animaux.
Les Noirs qu’on a trouvez, mais en fort petit nombre ;
aux Philippines & dans quelques autres ifles de l’océan Indien
, viennent apparemment de ces Papous ou Nègres de
la nouvelle G u in ée, que les Européens ne connoiffent
que depuis environ cinquante ans : Dampier découvrit
en 1700 la partie la plus orientale de cette te rre , à laquelle
il donna le nom de nouvelle Bretagne, mais on ignore
encore l’étendue de cette c o n tré e ; on fait feulement
qu’elle n’eft pas fort peuplée dans les parties qu’on a re connues.
Tome I I I . V u u