doit produire une difcordance dans le réfultat total de la
fenfàtion, & c ’eft par cette raifon qu’entendant toujours
faux, ils chantent faux néceflairement.&fans pouvoir même
s’en apercevoir. Ces perfonnes dont les oreilles font inégales
en fenfibilité, fe trompent fouvent fur le côté d’où
vient le ion ; fi leur bonne oreille eft à droite, le fon leur
paraîtra venir beaucoup plus fouvent du côté droit que
du côté gauche. Au refte je ne parle ici que des perfonnes
nees avec ce défaut, ce n ’eft que dans ce cas que l’inégalité
de fenfibilité des deux oreilles leur rend l’oreille &
la voix fàuffes, car ceux auxquels cette différence n ’arrive
que par accident, & qui viennent avec l’âge à avoir une
des oreilles plus dure que l’autre, n’auront pas pour cela
l ’oreille & la voix fauffes, parce qu’ils avoient auparavant
les oreilles également fenfibles, qu’ils ont commencé par
entendre & chanter jufle, & que fi dans la fuite leurs
oreilles deviennent inégalement fenfibles &produifent une
fenfàtion de faux, ils la rectifient fur le champ par l’habitude
où ils ont toujours été d ’entendre jufle & déjuger en
conféquence.
Les corqets ou entonnoirs fervent à ceux qui ont l’o reille
dure, comme les verres convexes fervent à ceux dont
les yeux commencent à baiffer lorfqu’ils approchent de
la vieillefTe ; ceux-ci ont la rétine & la cornée plus dure &
plus fo lid e, & peut-être aulfi les humeurs de l’oeil plus
épaiffes & plus denfes ; ceux-là ont la partie membraneufe
de la lame lpirale plus folide & plus d u re, il leur faut
donc des inftrumens qui augmentent la quantité des parties
lumineufes ou fonores qui doivent frapper ces organes,
les verres convexes & les cornets produifent cet effet.
T o u t le monde connoît ces longs cornets avec lefquels
on porte la voix à des diflances affez grandes, on pourrait
aifément perfectionner cette machine & la rendre a
l’égard de l’oreille ce qu’efl la lunette d ’approche al egard
des yeux ; mais il eft vrai qu’on ne pourrait fe fervir de
ce cornet d ’approche que dans des lieux folitaires où toute
la Nature ferait dans le filence, car les bruits voifins fe
confondent avec les fons éloignez, beaucoup plus que la
lumière des objets qui font dans le même cas. Cela vient
de ce que fa propagation de la lumière fe fait toujours en
ligne droite, & que quand il fe trouve un obftacle intermédiaire
elle eft prefque totalement interceptée, au lieu
que le fon fe propage à la vérité, en ligne d ro ite , mais
quand il rencontre un obftacle intermédiaire, il circule autour
de cet obftacle & ne laifle pas d ’arriver ainfi obliquement
à l’oreille prefqu’en auffi grande quantité que s’il
n ’eût pas changé de direélion.
L ’ouïe eft bien plus néceffaire à l’homme qu’aux animaux
; ce fens n’eft dans ceux-ci qu’une propriété paiïive
capable feulement de leur tranfmettre les impreffions
étrangères. Dans l’homme c’eft non feulement une propriété
paffive, mais une faculté qui devient aélive par l’organe
de la parole ; c’eft en effet par ce fens que nous vivons
en fociété , que nous recevons la penfée des autres ,
& que nous pouvons leur communiquer la nôtre , les
organes de la voix feraient des inftrumens inutiles s’ils
1 X x ii