fujettes à cette monftrueufe difformité,qu’elles découvrent
à ceux qui ont affez de curiofité ou d ’intrépidité pour
demander à la voir ou à la toucher. Les hommes de leur
c ô té font tous à demfoeunuques, mais il eft vrai qu’ils
ne naiffent pas tels & qu’on leur ôte un tefticule ordinairement
à l’âge de huit an s, & fouvent plus tard. M.
Kolbe dit avoir vu faire cette opération à un jeune H o ttentot.
de dix -h u it ans; les circonftances dont cette cérémonie
eft accompagnée, font fi fingulières que je ne
puis m’empêcher de les rapporter ici d ’après le témoin
oculaire que je viens de citer.
Après avoir bien frotté le jeune homme de la graifte
des entrailles d ’une brebis qu’on vient de tuer exprès,
on le couche à terre fur le dos, on lui lie les mains & les
p ied s, & trois ou quatre de fes amis le tiennent ; alors
le Prêtre ( car c’eft une cérémonie religieufo) armé d ’un
couteau bien tranchant fait une incifion, enlève le tef-
ticule gauche * & remet à la place une boule de graifte
de la même groffeur, qui a été préparée avec quelques
herbes médicinales ; il coud enfùite la plaie avec l ’os d ’un
petit oifeau qui lui fert d ’aiguille & un filet de nerf de
mouton ; cette opération étant finie on délie le patient,
mais le Prêtre avant que de le quitter le frotte avec de
la graifte toute chaude de la brebis tu é e , ou plutôt il lui
en arrofe tout le corps avec tant d ’abondance que lorf-
qu’elle eft refroidie elle forme une efpèce de cro û te, il le
frotte en même temps fi rudement que le jeune homme qui
* Tavernier dit que c’eft le teftiçule droit, Tome IV, page 297*
ne fouffre déjà que tro p , fue à greffes gouttes & fume
comme un chapon qu’on rôtit; enfuite l’opérateur fait
avec fes ongles des filions dans cette croûte de fuif d ’une
extrémité du corps à l'autre ,& piffe deffus auflï copieu-
fement qu’il le peut, après quoi il recommence à le frotter
e n co re , & il recouvre avec la graifte les filions remplis
d ’urine. A u fti-tô t chacun abandonne le patient, on le
laiffe feul plus mort que vif, il eft obligé de fe traîner
comme il peut dans une petite hutte qu’on lui a bâtie
exprès tout proche du lieu où s’eft faite l’opération, il y
périt ou il y recouvre la fànté fans qu’on lui donne aucun
fecoürs, & fans aucun autre rafraîchiffement ou nourriture
que la graifte qui lui couvre tout le corps & qu’il
peut lécher s’il le veut : au bout de deux jours il eft
ordinairement rétabli, alors il peut fortir & fe montrer,
& pour prouver qu’il eft en effet parfaitement g u éri, il
fe met à courir avec autant de légèreté qu’un cerf *.
Tous les Hottentots ont le nez fort plat & fort large ,
ils ne i’auroient cependant pas tel fi les mères ne fe fai-
foient un devoir de leur aplatir le nez peu de temps après
leur naiffanCe, elles regardent un nez proéminent comme
une difformité ; ils ont auffi les lèvres fort greffes, fur-
tout la fupérieure , les dents fort blanches , les fo u r c ils
épais, la tête greffe, le corps maigre, les membres menus ;
ils ne vivent guère paffé quarante a n s , la mal-propreté
dans laquelle ils fe plaifent & croupiffent, & les viandes
infectées & corrompues dont ils font leur principale
* Voyez la Defcription du C a p , par M. Kolbe, page 2 7 7 ,
O o o ij