danfer, à chanter & à fe divertir, & quoiqu’ils foient fort
pareffoux, ils ne iaiffent pas d ’avoir quelque connoif-
fance des arts méchaniques, ils ont des laboureurs, des
forgerons , des charpentiers, des potiers, & même des
orfèvres , ils n ’ont cependant aucune commodité dans
leurs maifons, aucuns meubles, ils couchent fur des nattes,
ils mangent là chair prefque crue & dévorent même le
cuir de leurs boeufs après avoir fait un peu griller le poil,
ils mangent aulfi la cire avec le miel ; les gens du peuple
vont prefque tout nus , les plus riches ont des caleçons
ou des jupons de coton & de foie *.
Les peuples qui habitent l’intérieur de l’Afrique ne
nous font pas affez connus pour pouvoir les décrire,
ceux que les Arabes appellent Zingues, font des noirs
prefque fàuvages , Marmol dit qu’ils multiplient prodi-
gieufoment & qu’ils inonderaient tous les pays voifins , fi
de temps en temps il n’y avoit pas une grande mortalité
parmi eux caufée par des vents chauds.
Il paraît par tout ce que nous venons de rapporter, que les
Nègres proprement dits font différens des Caffres, qui font
des noirs d’une autre efpèce, mais ce que ces defcriptions
indiquent encore plus clairement, c’elt que la couleur dépend
principalement du climat, & que les traits dépendent
beaucoup des ufages où font les différens peuples de s’écra-
fo rlen ez, defe tirer les paupières, de s’alonger les oreilles,
de fe grolfir les lèvres, de s’aplatir le vifage, &c, rien ne
* Voyez le voyage de Ffacour, page ÿ 0 ; celui de Struys, Tome I ,
page g 2 ; celui de Pyrard, page g 8.
prouve
prouve mieux combien le climat influe fur la couleur, que
de trouver fous le même parallèle à plus de mille lieues
de diftance des peuples aüffi femblables que le font les
Sénégallois & les Nubiens, & de voir que les Hottentots
qui n’ont pu tirer leur origine que de nations noires, font
cependant les plus blancs de tous ces peuples de l ’Afrique
, parce qu’en effet ils font dans le climat le plus froid
de cette partie du monde ; 6c fi l’on s’étonne de ce que
fur les bords du Sénégal on trouve d ’un côté une nation
bafanée 6c de l’autre côté une nation entièrement noire,
on peut fe fouvenir de ce que nous avons déjà infinué
au fujet des effets de la nourriture, ils doivent influer fur
la couleur comme fur les autres habitudes du corps , &
fi on en veut un exemple, on peut en donner un tiré des
animaux, que tout le monde eft en état de vérifier ; les
lièvres de plaines & des endroits aquatiques ont la chair
bien plus blanche que ceux de montagnes 8c des terrains
fo cs, & dans le même lieu ceux qui habitent la prairie
font tout différens de ceux qui demeurent fur les collines
, la couleur de la chair vient de celle du fàng 6c des
autres humeurs du corps fur la qualité defquelies la nourriture
doit néceffairement influer.
L ’origine des noirs a dans tous les temps fait une grande
queftion, les Anciens qui ne connoiffoient guère que ceux
deNubie,Ies regardoient comme faifant la dernière nuance
des peuples bafanez , 6c ils les confondoient avec les
Ethiopiens & les autres nations de cette partie de l ’Afrique
q u i, quoiqu’extrêmement b ru n s, tiennent plus de la
Tome I IL • P p p