race blanche que de la race noire ; ils penfoient donc que
la differente couleur des hommes ne provenoit que de
la différence du climat, & que ce qui produifoit la noirceur
de ces peuples, étoit la trop grande ardeur du foleil
a laquelle ils font perpétuellement expofez : cette opinion,
qui efl fort vrai-femblable, a fouffert de grandes difficultés
lorfqu on reconnut qu’au delà de la N ubie dans un climat
encore plus méridional, & fous l’équateur même, comme
a Melinde & a Momb aze, la plupart des hommes ne font
pas noirs comme les Nubiens, mais feulement fort bafà-
n e z , & lorfqu’on eût obfervé qu’en tranfportant des noirs
de leur climat brûlant dans des pays tempérez , ils n ’ont
rien perdu de leur couleur & l’ont également communiquée
a leurs defcendans; mais fi l’on fait attention d ’un
côté à la migration des différenspeuples, & de l’autre au
temps qu’il faut peut-être pour noircir ou pour blanchir
uné ra c e , on verra que tout peut fe concilier avec le fenti-
ment des A nciens, car les habitans naturels de cette partie
de 1 Afrique font les Nubiens', qui font noirs & originairement
no irs, & qui demeureront perpétuellement noirs
tant qu ils habiteront le même climat & qu’ils ne fe mêleront
pas avec les blancs ; les Ethiopiens au contraire ,
les Abyfîins , & meme ceux deMélinde, qui tirent leur
origine des blancs , puifqu’ils ont la même religion & le
même ufage que les Arabes, & qu’ilsleur reffemblentpar
la couleur , font a la vérité encore plus bafànez que les
Arabes méridionaux , mais cela même prouve que dans,
«ne meme race d ’hommes le plus ou moins de noir
dépend de la plus ou moins grande ardeur du climat ; il
faut p eu t-être plufieurs fiècles & une fucceffion d ’un
grand nombre de générations pour qu’une race blanche
prenne par nuances la couleur brune & devienne enfin
tout-à-fait n o ire , mais il y a apparence qu’avec le temps
un peuple blanc tranfporté du nord à l ’équateur pourroit
devenir brun & même to u t-à -fa it noir , for-tout fi ce
même peuple changeoit de moeurs & ne fe fervoit pour
nourriture que des productions du pays chaud dans lequel
il auroit été tranfporté.
L ’objection qu’on pourroit faire contre cette opinion
& qu’on voudrait tirer d elà différence des traits, ne me
paraît-pas bien fo rte , car on peut répondre qu’il y a moins
de différence entre les traits d ’un Nègre qu’on n’aura pas
défiguré dans lbn en fan c e ,& les traits d ’un Européen,
qu’entre ceux d ’un Tartare ou d ’un Chinois , & ceux
d ’un Circaffien ou d ’un Grec ; & à l’égard des cheveux
leur nature dépend fi fort de celle de la peau, qu’on ne
doit les regarder que comme faifant une différence très-
accidentelle , puifqu’on trouve dans le même pays & dans
la même ville des hommes qu i, quoique blancs, ne laiffent
pas d’avoir les cheveux très-différens les uns des autres au
point qu’on trouve, même en F ran ce, des hommes qui
les ont au fil courts & auffi crépus que les N ègres, & que
d ’ailleurs on voit que le climat, le froid & le chaud influent
fi fort for la couleur des cheveux des hommes & du poil
des animaux , qu’il n’y a point de cheveux noirs dans les
royaumes du n o rd , & que les écureuils , les lièvres , les
P p p i j ’