pas qu’elles aient plus de penchant à l’amour ; les hommes
mêmes font beaucoup plus chartes dans les pays froids
que dans les climats méridionaux. On eft moins amoureux
en Suède qu’en Elpagne ou en Portugal, & cependant
les femmes y font beaucoup plus d’enfans. Tout le
monde fait que les Nations du nord ont inondé toute
l’Europe au point que les Hirtoriens ont appellé leNord
O ffic in a gentium.
L’auteur des voyages hiftoriques de l’Europe ditauffi,
comme Rudbeck, que les hommes vivent ordinairement
en Suède plus long-temps que dans la plupart des autres
Royaumes de l’Europe , & qu’il en a vu plufieurs qu’on
lui afluroit avoir plus de cent cinquante ans *. Il attribue
cette longue durée de la vie des Suédois à la falubrité de
l’air de ce climat, il dit à peu près la même chofe du
Dannemark; félon lui les Danois font grands & robuftes,
d’un teint vif & coloré, & ils vivent fort long-temps à
caufe de la pureté de l’air qu’ils relpirent ; les femmes font
auffi fort blanches, affez bien faites, & très-fécondesb.
Avant le Czar Pierre 1“ les Mofcovites étoient, dit-on,
encore prefque barbares ; le peuple né dans l’efclavage
étoit groffier, brutal, cruel, fans courage & fans moeurs.
Ils fe baignoient très-fouvent hommes &femmes pêle-mêle
dans des étuves échauffées à un degré de chaleur infoû-
tenable pour tout autre que pour eux ; ils alloient enfuite,
f Voyez les voyages hiftoriques de l’Europe. Paris, i 6p j , Tome
V I I I ) page 22p .
h Idem, Tome V III, page 279 & 280.
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comme les Lappons, fe jeter dans l’eau froide au fortir
de ces bains chauds. Ils fe nourrifloient fort mal, leurs
mets favoris n’étoient que des concombres ou des me-
lons-d’Aftracan qu’ils mettoient pendant l’été confire avec
de l’eau, de la farine & du fel*. Ils fe privoient de quelques
viandes, comme de pigeons ou de veau, par des
fcrupules ridicules; cependant dès ce temps-là même les
femmes favoient fe mettre du rouge, s’arracher les four-
cils, fe les peindre ou s’en former d’artificiels ; elles favoient
auffi porter des pierreries, parer leurs coëffures de
perles, fe vêtir d’étoffes riches & précieufes ; ceci ne
prouve-t-il pas que la barbarie connnençoit a finir , &
que leur Souverain n’a pas eu autant de peine à les policer
que quelques auteurs ont voulu l’infinuer ! Ce peuple eft
aujourd’hui civilifé, commerçant, curieux des arts & des
fciences , aimant les fpeétacles & les nouveautés ingé-
nieufes. Il ne fuffit pas d’un grand homme pour faire ces
changemens, il faut encore que ce grand homme naiffe
à propos.
Quelques auteurs ont dit que l’air de Mofcovie eft fi
bon qu’il n’y a jamais eu depefte, cependant les annales
du pays rapportent qu’en 1421, & pendant les fix années
fuivantes la Mofcovie fut tellement affligée de maladies
contagieufes que la conftitution des habitans & de leurs
defeendans en fût altérée, peu d’hommes depuis ce temps
arrivant à l’âge de cent ans, au lieu qu’auparavant il y
* Voyez la relation curieufe de Mofcovie. Pa ris , 1 6 ÿ 8, page
J S i. Kkk iij