autres, entièrement fauvages; quatrièmement par le petit
nombre d ’hommes qui ont été employez à faire la conquête
de ces vaftes contrées : quelqu’avantage que la
poudre à canon put leur d o n n e r, ils n ’auroient jamais
fubjugué ces peuples, s’ils euffent été nombreux ; une
preuve de ce que j’avance, c’eft qu’on n’a jamais pu
conquérir le pays des Nègres ni les affujétir, quoique
les effets de la poudre fuffent auffi nouveaux & auffi
terribles pour eux que pour les Américains ; la facilite
avec laquelle on s’eft emparé de! Amérique, me paraît
prouver qu’elle étoit très-peu peuplée, & par conféquent
nouvellement habitée.
Dans le nouveau continent la température des différens
climats efl bien plus égale que dans 1 ancien continent,
c ’eft encore par l’effet de plufieurs caufes ; il fait beaucoup
moins chaud fous la zone torride en Amérique, que
fous la zone torride en Afrique ; les pays compris fous
cette zone en Amérique, font le Mexique, la nouvelle
Efpagne, le Pérou, la terre des Amazones, le Brefrl &
la Guiane. La chaleur n’efl jamais fort grande au Mexique
, à la nouvelle Efpagne & au P éro u , parce que ces
contrées font des terres extrêmement élevées au deffus
du niveau ordinaire de la furface du globe; le thermomètre
dans les grandes chaleurs ne monte pas fi haut au
Pérou qu’en France ; la neige qui couvre le fommet des
montagnes, refroidit l ’air, & cette caufe qui n ’eft qu’un
effet de la première, influe beaucoup fur la température
de ce climat; auffi les habitans, au lieu d ’êtrenoirs ou trèsbruns,
bruns, font feulement bafanez; dans la terre des Amazones
il y a une prodigieufe quantité d’eaux répandues,
de fleuves & de forêts, l’air y eft donc extrêmement humide,
& par conféquent beaucoup plus frais qu’il ne le
ferait dans un pays plus fec : d ’ailleurs on doit obferver
que le vent d ’eft qui foufHe conftamment entre les tropiques,
n’arrive au Brefil, à la terre des Amazones & à la
Guiane, qu’après avoir traverféune vafte m e r, fur laquelle
il prend de la fraîcheur qu’il porte enfuite fur toutes les
terres orientales de l’Amérique équinoéliale : c’efl: par
cette raifon, auffi-bien que par la quantité des eaux &
des forêts, & par l’abondance & la continuité des pluies,
que ces parties de l’Amérique font beaucoup plus tempérées
qu’elles ne le feraient en effet fans ces circonftan-
ces particulières. Mais lorfque le vent d ’eft a traverfé
les terres baffes de l’Amérique, & qu’il arrive au Pérou ,
il a acquis un degré de chaleur plus confidérable ; auffi
feroit-il plus chaud au Pérou qu’au Brefil ou à la Guiane,
fi l’élévation de cette contrée, & les neiges quPs’y trouvent,
ne refroidiffoient pas l’air, & n’ôtoient pas au vent
d’eft toute la chaleur qu’il peut avoir acquifè en traver-
fant les terres: il lui en refte cependant affez pour influer
fur la couleur des habitans, car ceux qui par leur fituation
y font le plus expofez, font les plus jaunes, & ceux qui
habitent les vallées entre les montagnes & qui font à l’abri
de ce v e n t, font beaucoup plus blancs que les autres.
D ’ailleurs ce vent qui vient frapper contre les hautes montagnes
des Cordillères, doit fe réfléchir à d ’affez grandes
Tome 1IL T11