plufieurs mines fort étranges pendant le repas , ils font laborieux
& tres-habiles dans les arts & dans tous les métiers,
ils o n t, en un m o t, a très-peu près le même naturel, les
mêmes moeurs & les mêmes coutumes que les Chinois.
L ’une des plus bizarres St qui eft commune à ces deux
natio n s, eft de rendre les pieds des femmes fi petits,
qu’elles ne peuvent prefque fe foûtenir. Quelques voyageurs
difent qu’à la Chine quand une fille a paffé l’âge de
trois ans, on lui cafte le p ie d , en forte que les doigts font
rabattus fous la plante, qu’on y applique une eau forte qui
brûle les chairs, & qu’on l’enveloppe de plufieurs bandages
jufqu a ce qu’il ait pris fon pli ; ils ajoutent que les
femmes reiïèntent cette douleur pendant toute leur v ie ,
quelles peuvent à peine marcher, St que rien n ’eft plus
défagréable que leur démarche ; que cependant elles fouf-
frent cette incommodité avec jo ie , & que comme c ’eft
un moyen de plaire, elles tâchent de fe rendre le pied
aulfi petit qu’il leur eft poffible. D ’autres voyageurs ne
difentpas qu on leur cafte le pied dans leur enfance, mais
feulement qu’on le ferre avec tant de violence qu’on
l ’empêche de croître ,& ils conviennent afTez unanimement
qu’une femme de condition, ou feulement une jolie
femme à la Chine doit avoir le piedaffez petit pour trouver
trop aifèe la pantoufle d ’un enfant de fix ans. j
Les Japonnois St les Chinois font donc une feule &
meme race d hommes qui fe font très-anciennement civi-
üfez, & qui diffèrent des Tartares plus par les moeurs
que par la figure ; la bonté du terrein, la douceur du
climat, le voifinage de la mer ont pu contribuer à rendre
cès peuples policez, tandis que les Tartares éloignez de
la mer & du commerce des autres nations , & féparez
des autres peuples du côté du midi par de hautes montagnes,
font demeurez errans dans leurs vaftes déferts fous
un ciel dont la rigueur, fu r-to u t du côté du n o rd , ne
peut être fupportée que par des hommes durs & greffiers.
L e pays d ’Yeço qui eft au nord du Ja p o n , quoique fitué
fous un climat qui devrait être tempéré, eft cependant
très-froid,très-ftérife & très-montueux, auffi les habitans
de cette contrée font-ils tout différens des Japonnois & des
Chinois; ils font greffiers y','brutaux, fans moeurs, fans
arts; il ont le corps court & gros, les cheveux longs St
hérilfez , les yeux n o irs, le front p la t, le teint jaune ,
mais un peu moins que celui des Japonnois , ils font fort
velus fur le corps & même fur le vifàge, ils vivent comme
des Sauvages , & fe nourriflent de lard de baleine &
d ’hiiile de poiflbn ; ils font très-pareffeux, très-mal-pro-
pres dans leurs vêtemens : les enfans vont prefque n u d s,
les femmes n ’ont trouvé pour fe parer d ’autre moyen que
de fe peindre de bleu les fourcils St les lèvres ; les hommes
n’ont d ’autre plaifir que d ’aller à la chaffe des loups
marins, des o u rs, des élans, des rennes, St à la pêche
de la baleine ; il y en a cependant qui ont quelques coutumes
Japonnoifes, comme celle de chanter d ’une voix
tremblante, mais en général ils reffemblent plus aux T a rtares
feptentrionaux ou auxSamoïedes qu’aux Japonnois.
Maintenant, fi l’on examine les peuples voifins de la