laijfé dans le fommeil quelque partie de mon être , j ’ejfayai
mes fen s, je cherchai à me reconnoitre.
Mais tandis que je parcourois des yeux les bornes de
mon corps pour m’ajfurer que mon exijlence m’étoit demeurée
toute entière, quelle fu t mafurprife de voir à mes côtés une
forme femblable à la mienne! je la pris pour un autre moi-
meme, loin d avoir rien perdu pendant que j ’avois cejfé d ’être,
je crus mètre doublé.
Je portai ma main fur ce nouvel être, quel faifijfement !
ce n étoit pas moi, mais c étoit plus que moi, mieux que moi,
je crus que mon exijlence alloit changer de lieu pajfer toute
entière à cette fécondé moitié de moi-même,
Je lafentis s’animer fous ma main, je la vis prendre de la
penfée dans mes yeux,les fiens firent couler dans mes veines
une nouvelle fource de vie ,faurois voulu lui donner tout mon
être; cette volonté vive acheva mon exijlence, je fentis naître
un fixième fens.
Dans cet injlant l ’afire du jour fur la fin de fa courfe
éteignit fon flambeau, je m’aperçus à peine que je per dois
le fens de la vue,j‘exiflois trop pour craindre de ceffer d ’être,
êv ce fu t vainement que l’obfcurité oh je me trouvois, me rap-
pella l’idée de mon premier fommeil.
D E L ’ H O M M E . 371
4C4C4©#C4C4©IO#©#©#©#©#OIC4c
HISTOIRE NATURELLE
DE L’ H OMME
Variétés dans l’efpèce humaine.
r | o ut ce que nous avons dit jufqu’ici de la généra-
tion de l’homme, de fà formation, de fon développement,
de fon état dans ies différens âges de là vie, de
fes fens & de la ftruéture de fon corps, telle qu’on la
connoît par les diffeélions anatomiques, ne fait encore
que l’hiftoire de l’individu, celle de l’efpèce demande un
détail particulier, dont les faits principaux ne peuvent fo
tirer que des variétés qui fe trouvent entre les hommes
des différens climats. La première & la plus remarquable
de ces variétés efl celle de la co u leu r, la fécondé efl
celle de la forme & de la grandeur, & la troifième efl
celle du naturel des différens peuples : chacun de ces
objets confidéré dans toute fon étendue, pourrait fournir
un ample traité, mais nous nous bornerons à ce qu’il y 3
de plus général & de plus avéré.
En parcourant dans cette vûe la furfàce de la terre ,
& en commençant par le nord, on trouve en Lapponie
& fur les côtes feptentrionales de la Tartarie une race
d’hommes de petite flature, d ’une figure bizarre, dont
la phyfionomie efl auffi fauvage que les moeurs. Ces
A a a ij