Enfuite en examinant en particulier les différens peuples
qui compofent chacune de ces races noires, nous y
verrons autant de variétés que dans les races blanches, ôc
nous y trouverons toutes les nuances du brun au n o ir,
comme nous avons trouvé dans les races blanches toutes
les nuances du brun au blanc.
Commençons donc par les pays qui font au nord du
Sénégal, & en fuivant toutes les côtes de l’Afrique, con-
fidérons tous les difïërens peuples que les voyageurs ont
reconnus, & defquels ils ont donné quelque defcription :
d abord il eft certain que les naturels des illes Canaries
ne font pas des Nègres, puifque les voyageurs alfurent
que les anciens habitans de ces illes étoient bien faits,
d une belle taille, d ’une forte complexion; que les femmes
étoient belles & avoient les cheveux fort beaux &
fort lins, & que ceux qui habitoient la partie méridionale
de chacune de ces illes, étoient plus olivâtres que ceux
qui demeuroient dans la partie feptentrionale a. D u re t,
jmge 7 2 de la relation de fon voyage à Lima, nous
apprend que les anciens habitans de fille de Ténérifië
étoient une nation robulle & de haute taille, mais maigre
& bafanée, que iaplûpart avoient le nez p la tt . Ces peuples,
comme 1 on voit, n ont rien de commun avec les’
Nègres, fr ce n’ell le nez plat ; ceux qui habitent dans le
“Voyez l’hiftoire de la première découverte des Canaries,par Bontier
& Jean le Verrière. Paris, 1 6 3 0 , page 2 5 1 .
h Voÿez i’hiftoire générale des voyages, par M. l’Abbé Prévôt. Paris,
j 74 .6 , Tome I I , page 23 0.
continent de l’Afrique à la même hauteur de ces illes,
font des Maures alfez bafanez, mais qui appartiennent,
aulîi-bien que ces Infuiaires, à la race des blancs.
Les habitans du Cap-Blanc font encore des Maures
qui fuivent la loi Mahométane, ils ne demeurent pas longtemps
dans un même lieu , ils font errans, comme les
Arabes, de place en place, félon les pâturages qu’ils y
trouvent pour leur bétail dont le lait leur fert de nourriture,
ils ont des chevaux, des chameaux, des boeufs, des
chèvres, des moutons, ils commercent avec les Nègres
qui leur donnent huit ou dix efcfaves pour un cheval,
& deux ou trois pour un chameau a ; c’elt de ces Maures
que nous tirons la gomme arabique, ils en font dilfoudre
dans le lait dont ils fe nourrilfent, ils ne mangent que
très-rarement de la viande, & ils ne tuent guère leurs bef-
tiaux que quand ils les voient près de mourir de vieillelfe
ou de maladie b.
Ces Maures s’étendent jufqu’à la rivière du Sénégal
qui les fépare d ’avec les Nègres ; les Maures, comme
nous venons de le dire, ne font que balanez, ils habitent
au nord du fleuve, les Nègres font au midi & font abfo-
lument noirs ; les Maures font errans dans la campagne ,
les Nègres font fédentaires & habitent dans des villages ;
les premiers font libres & indépendans , les féconds ont
des Rois qui les tyrannifent & dont ils font efclaves ; les
* Voyez le voyage du fieur le Maire fous M. Dancourt. Paris,
1 6 3 3 , page 4 6 & 4 j .
b Idem, page 66.