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avoit, félon cet auteur, plufieurs officiers qui travailloient
fucceffivement à cette opération : ie premier, que i’on appelait
l’écrivain, marquoit fur le côté gauche du corps
l’endroit où on devoit l’ouvrir; le coupeur faifoit l’incifion,
& l’un de ceux qui dévoient le faler, tiroit tous les vifcères,
excepté le coeur & les reins , un autre les lavoit avec
du vin de palme & des liqueurs odoriférantes, enfuite
on l’oignoit pendant plus de trente jours avec de la
gomme de cèdre, de la myrrhe , du cinnamome & d’autres
parfums. Tous ces aromates confervoient le corps
dans fon entier pendant très-long temps & lui donnoient
une odeur très-fuave : il n’étoit défiguré en aucune
manière par cette préparation, après laquelle on le rendoit
aux parens, qui le gardoient dans un cercueil pofé debout
contre une muraille a.
La plupart des auteurs modernes qui ont voulu parler
des embaumemens des anciens Egyptiens, ont feulement
répété ce qu’en a dit Hérodote ; s’ils ajoutent quelque
fait ou quelque circonftance de plus, ils ne peuvent les
donner que pour des probabilités. Dumont b dit qu’il
y a bien de l’apparence qu’il entroit de l’aloès , du
bitume ou afphalte, & du cinnamome dans les drogues
que l’on mettoit à la place des entrailles des corps morts;
il dit encore qu’après l’embaumement on enfermoit ces
a Hiftoire univerfelle de Diodore de Sicile, traduite par M. l’Abbé
Terraflon. A Paris, 1 7 3 7. Tome I , page 1 y 2 i f Jùiv,
b Voyage de M. Dumont en France, en Italie, &c. imprimé à
la Haye en 1699, Tome I I , page 2 9 0 & fuiv.
corps dans des cercueils laits de bois de lÿcomore , qui
eft prefque incorruptible. On trouve dans le catalogue
du cabinet de la Société royale de Londres, que M.
Grew remarqua dans une momie d Egypte de ce
cabinet, que la drogue dont on s’étoit fervi pour 1 embaumer,
avoit pénétré jufqu’aux parties les plus dures,
comme les os , ce qui les avoit rendu fi noirs, qu ils
fembloient avoir été bridez : cette obfervation lui fit
croire que les Egyptiens avoient coutume d embaumer
les corps en les faifant cuire dans une chaudière pleine
d’une efpèce de baume liquide , jufqu à ce que toutes
les parties' aqueufes du corps fulfent exhalees , & que
la fubftance huiieufe & gommeufe du baume 1 eût entièrement
pénétré. Grew propofe à cette occafion une
façon d’embaumer les corps en les faifant macérer &
enfuite bouillir dans de l’huile de noix*.
, Je crois qu’en effet il y auroit plufieurs moyens de
préferver les cadavres de la pourriture, & qu ils ne feroient
pas de difficile exécution , puifque difîérens peuples les
ont employez avec fuccès : on en a eu un exemple chez
les Guanches, anciens peuples de l’ifle de Ténériffe: ceux
qui furent épargnez par les Efpagnols lorfqu ils firent la
conquête de cette Ifie, leurapprirent que l’art d’embaumer
les corps étoit connu des Guanches, & qu’il y avoit dans
leur nation une tribu de Prêtres qui en fàifbient un fecret,
& même un myftère facré. La plus grande partie de cette
nation ayant été détruite par les Efpagnols, on ne put
* Journal des Savons, année 1 6 8 2 , page 132.