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font découper la chair en fleurs, comme quand on applique
des ventoufes, elles peignent ces fleurs de diverfes couleurs
avec du jus de racines, de manière que leur peau paroît
comme une étoffe à fleurs \ ...
Les Bengalois font plus jaunes que lesMogols, ils ont
auffi des moeurs toutes differentes, les femmes font beaucoup
moins chartes, on prétend même que de toutes les
femmes de 1 Inde cefont les plus lafcives.On faitàBengale
un grand commerce d ’efclaves mâles & femelles , on y fait
auffi beaucoup d eunuques, foit de ceux auxquels on n’ôte
que les terticules, foit de ceux à qui on fait l’amputation
toute entière. Ces peuples font beaux & bien-faits, ils
aiment le commerce & ont beaucoup de douceur dans les
moeurst . Les habitans de la côte de Coromandel fbntplus
noirs que les Bengalois, ils font auff moins civififez, les
gens du peuple vont prefque nuds ; ceux de la côte de Malabar
font encore plus noirs, ils ont tous les cheveux noirs,
lifles & fort longs, ils font de la taillé des Européens ; les
femmes portent des anneaux d’or au nez; les hommes, les
femmes & les filles fe baignent enfemble & publiquement
dans des baffins au milieu des villes , les femmes font
propres & bien-faites, quoique noires, ou du moins très-
brunes; on les marie dès l’âge de huit an sc. Les coutumes
de ces différens peuples de l ’Inde font toutes fort fmgu-
lieres, & meme bizarres. Les Banianes ne mangent de rien
' * Voyez les voyages de Tavernier. Tome I I I , page 3 4 .
1 Voy. les voyages de Pyrard, page 3 3 4 .
• Voy. le Recueil des voyages. Amjterdam, 1 7 0 2 , Tome V I, p .4 6 1 .
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de ce qui a eu v ie , ils craignent même de tuer le moindre
in feéte, pas même les poux qui les rongent, ils jettent du
ris & des fèves dans la rivière pour nourrir les poiffons,
& des graines fur la terre pour nourrir les oifeaux & les in-
feétes : quand ils rencontrent ou un chaffeur ou un pêcheur,
ils le prient inftammentde fe défirter de fon entre-
prife ; & fi on eft fourd à leurs prières, ils offrent de l’argent
pour le fufil & pour les filets, & quand on refufe leurs offres,
ils troublent l’eau pour épouvanter les poiffons, & crient de
toute leur force pour faire fuir le gibier & les oifeauxa. Lés
Naires de Calicut font des militaires qui font tous nobles ,
& qui n’ont d ’autre profeffion que celle des armes’; ce font
des hommes beaux & bien-faits, quoiqu’ils aient le teint
de couleur olivâtre, ils ont la taille élevée & ils fonthardis,
courageux & très-adroits à manier les armes, ils s’agran-
diffent les oreilles au point qu’elles descendent jufque for
leurs épaules, & quelquefois plus bas. Ces Naires ne peuvent
avoir qu’une femme, mais les femmes peuvent pren-
dreautant de maris qu’il leur plaît. L eP .T a c h a rd dans là
lettre au P. d e laC b a ife , datée dePonticheri du 16 Février
1 7 0 2 , dit que dans les Caftes ou Tribus nobles une
femme peut avoir légitimement plufieurs m aris, qu’il s’en
eft trouvé qui en avoient eu tout-à-Ia fois jufqu’à dix, qu’elles
regardoient comme autant d ’efclaves qu’elles s’é-
toient foûmis par leur beauté.b. Cette liberté d ’avoir plufieurs
maris eft un privilège de nobleffe que les femmes de
- -* Voyages de Jean Struys. Tome I I , page 2 2 ƒ,
k Voyez les lettres édifiantes. Recueil I I , page 18 8 .