Sénégal, il y en a un très-grand nombre qui font publiques,
6c cela ne les deshonore en aucune façon ; ces Nègres,
hommes & femmes, vont toûjoursla tête découverte, ris
fe rafent ou fe coupent les cheveux, qui font fort courts,
de plufieurs manières differentes, ils portent des pendans
d’oreilles qui pèfent jufqu’à trois ou quatre onces .; ces
pendans d’oreilles font des dents , des coquilles, des
cornes. des morceaux de bois, Scc, il y en a auffi qui fe
font percer la lèvre fupérieure ou les narines pour y fuf-
pendre de pareils omemens ; leur vêtement confifte en
une efnèce de tablier fait d'écorce d’arbre 6c quelques
peaux de (mge qu’ils portent par deffus ce tablier, iis attachent
à ces peaux des fonnaiiles femblables à celles que
portent nos mulets ; ils couchent fur des nattes de jonc,
6c ils mangent du poiffon ou de la viande lorfqu’ils peuvent
en avoir, mais leur principale nourriture font des
ignames 6c des bananes *. Ils n’ont aucun goût que celui
des femmes 6c aucun defrr que celui de ne rien faire, leurs
maifons ne font que de miférables chaumières , ils demeurent
très-fouvent dans des lieux fa rivages, & dans des
terres dénies, tandis qu’il ne tiendrait qu’à eux d’habiter
de belles vallées, des collines agréables 6c couvertes d’arbres
, & des campagnes vertes , fertiles 6c entrecoupées
de rivières 6c de ruideaux agréables, mais tout cela ne leur
fait aucun plaifir, ils ont la même indifférence prefquc fur
tout ; les chemins qui conduifent d’un lieu à un autre
* Vide India Orimtalis pattern fecmdam, in qua Joannis Hugonis
Linjlcotani navigtuio, &c. Francofurcr, 1 599. pag. n & 1 a.
font ordinairement deux fois plus longs qu’il ne faut, ils
ne cherchent point à les rendre plus courts, 6c quoiqu’on
leur en indique les moyens ils ne penlènt jamais à palier
par le plus court „ ils luivent machinalement le chemin
battu a 6c fe foucient fi peu de perdre ou d’employer leur
temps qu’ils ne le mefurent jamais.
Quoique les Nègres de Guinée foient d’une fanté ferme
& très bonne, rarement arrivent-ils cependant à une
certaine vieillelfe, un Nègre de cinquante ans eft dans fon
pays un homme fort vieux , ils paroilfent l’être dès l’âge
de quarante ; l’ufage prématuré des femmes ett peut-être
la caufe de la brièveté de leur vie ; les enfans font fi débauchez
6c fi peu contraints par les pères & mères que dè i
leur plus tendre jeunefle ils fe livrent à tout ce que la Nature
leur fuggère11 ; rien n’eft 0 rare que de trouver dans
ce peuple quelque fille qui puiffe fe fouvenir du temps
auquel elle a ceflé d’être vierge.
Leshabitans del’ifle Saint-Thomas,del’ifled’Anabon,
6cc. font des Nègres femblables à ceux du continent voi-
ffn , ils y font feulement en bien plus petit nombre, parce
que les Européens les ont chaflez 6c qu’ils n’ont gardé
que ceux qu’ils ont réduits en efclavage. Ils vont nuds
hommes 6c femmes à l’exception d’un petit tablier de
coton§1 Mandelffo dit que les Européens qui fe font habituez
ou qui s’habituent actuellement dans cette ifle de
3 Voyez le voyage de Guinée par GuilI.Bofman. Utrecht, 1 7 0 ƒ./?./ 4 ? .
: b Voyez idem, page 1 1 S-.
c Voyez les voyages de Pyrard. page 1 6 .