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n èg re , leur couleur eft brune , c ’eft-à-dire , mêlée de
blanc & de noir , au lieu que dans tout le continent de
l ’Amérique méridionale les Indiens font jaunes ou plutôt
rougeâtres ; les habitans du Chili font de bonne taille : ils
ont les membres gros ., la poitrine large , le vifage peu
agréable & fans b a rb e , les yeux petits , les oreilles longues
, les cheveux n o irs, plats & gros comme du crin.; ils
s’alongent les oreilles, & ils s’arrachent la barbe avec des
pinces faites de coquilles ; la plupart vont n u s, quoique le
climat foit fro id , ils portent feulement fur leurs épaules
quelques peaux d ’animaux. C ’eft à l’extrémité du C h ili,
vers les terres Magellaniques, que fe tro u v e, à ce qu’on
préten d , une race d ’hommes dont la taille eft gigantefque ;
M. Frezier dit avoir appris de plufieurs Efpagnols qui
avoient vû quelques-uns de ces hommes,qu ils avoient
quatre varres de hauteur, c ’eft-à-dire, neuf ou dix pieds;
félon lu i, ces géans appeliez Patagons, habitent le côté
de l’eft de la côte déferte dont les anciennes relations
ont parlé , qu’on a enfuite traitées de fables, parce que
l ’on a vû au détroit de Magellan des Indiens dont {a
taille ne furpalfoit pas celle des autres hommes : c ’eft ,
dit-il , ce qui a pu tromper Froger dans la relation du
voyage de M. de Gennes ; car quelques vailfeaux ont vû
en même-temps les uns & les autres: en 1709. les gens
duvaifleau le Jacques, de Saint-Malo, virent fept de çes
géans dans la baie G régoire, & ceux du vailfeau le Saint-
Pierre,de Marfeille, en virent fix, dont ils s’approchèrent
pour leur offrir du pain , du vin & de l’eau-de-vie, qu’ils
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refufèrent quoiqu’ils eulfent donné à ces Matelots quelques
flèches, & qu’ils les eulfent aidez à échouer le canot
du navire.a Au refte, comme M. Frezier ne dit pas avoir
vû lui-même aucun de ces geans, & que les relations qui
en parlent font remplies d ’exagérations fur d autres cho-
fes , on peut encore douter qu il exifte en effet une race
d ’hommes toute compofee de geans, fur-tout lorfqu on
leur fuppofera dix pieds de hauteur ; car le volume du
corps d ’un tel homme feroit huit fois plus conftderable
que celui d’un homme ordinaire; il femble que la hauteur
ordinaire des hommes étant de cinq p ieds, les limites
ne s’étendent guère qu’à un pied au deflus & au deffous;
un homme de fix pieds eft en effet un très-grand homme,
& un homme tde quatre pieds eft très-petit ; les géans &
les nains qui font au deffus & au deffous de ces termes de
grandeur, doivent être regardez comme des variétés individuelles
& accidentelles , & non pas comme des différences
permanentes qui produiraient des races confiantes.
Au refte, fi ces géans des terres Magellaniques exiftent,
ils font en fort petit nombre , car les habitans des terres
du détroit & des ifles voifines font des Sauvages d’une
taille médiocre ; ils font de couleur olivâtre , ils ont la
poitrine large, le corps aflez quarre, les membres g ro s,
les cheveux noirs & plats b ; en un mot , ils reffemblent
* Voyez le voyage de M. Frezier, Paris, 1 7 3 2,page 7 3 érfuiv.
1 Voyez le voyage du Cap Narbrugh, fécond volume de Coreal, pages
2 3 1 & 2 S4 ; l’hiftoire de la conquête des Molucques, par Argenfol»,
Tome 1 , pages 3 3 Ù 1 2 3 3 1 le voyage de M. de Gennes, par Froger,
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