380 H i s t o i r e N a t u r e l l e
feptentrionale de la mer noire, & ils fe font établis dans fa
Crimée & dans la petite Tartarie près de la Moldavie & de
l ’Ukraine. Tous ces peuples ont le haut du vifage fort large
& rid é , même dans leur jeunelfe, le nez court & gros,
les yeux petits & enfoncez *, les joues fort élevées, le bas
du vifage étroit, le menton long & avancé , la mâchoire
fupérieure enfoncée, les dents longues &féparées, lesfour-
cils gros qui leur couvrent lesyeux, les paupières épailfes,
la face plate, le teint bafané & olivâtre, les cheveux noirs ;
ils font deftature médiocre, mais très forts & très-robuftes,
ils n ont que peu de barbe, & elle eft par petits épis comme
celle des Chinois , ils ont les cuilfes grolfes & les jambes
courtes; les plus laids de tous font les Calmuques, dont
1 afpeét a quelque chofe d ’effroyable, ils font tous errans
& vagabonds, habitans fous des tentes de toile, de feutre,
depeaux ; ils mangent la chair de cheval, de chameau, &c.
crue ou un peu mortifiée fous la Celle de leurs chevaux,
ils mangent auffi du poiffon defféché au foleil. Leurboif-
fon la plus ordinaire eft du lait de jument fermenté avec
de la farine de millet; ils ont prefque tous la tête rafée à
1 exception du toupet qu’ils laiffent croître affez pour en
faire une treffe de chaque côté du vifage. Les femmes, qui
font auffi laides que les hommes, portent leurs cheveux,
elles les treffent & y attachent de petites plaques de cuivre
& d ’autres omemens de cette efpèce ; la plupart de ces
peuples n ’ont aucune religion, aucune retenue dans leurs
* Voyez tes Voyages de Rubrufquis, de Marc Paule, de Jean
Struys, du Père Avril, &c.
DE L’ H O M M E. 381
moeurs, aucune d écence, ils font tous voleurs, & ceux du
Dagheftan qui font voifins des pays policez, font un grand
commerce d ’efclaves & d’hommes, qu’ils enlèvent par
force pour les vendre enfuite aux-Turcs & aux Perfans.
Leurs principales richeffes confident en chevaux, il y en
a peut-être plus en Tartarie qu’en aucun autre pays du
monde. Ges peuples fe font une habitude de vivre avec
leurs chevaux, ils s’en occupent continuellement, ils les
dreffent avec tant d ’adreffe & les exercent fi fouvent, qu’il
femble que ces animaux n ’aient qu’un même efprit avec
ceux qui les manient, car non feulement ils obéiffent parfaitement
au moindre mouvement de la b rid e , mais ils
fentent, pour ainfi dire , l’intention &la penféede celui
qui les monte.
Pour connoître les différences particulières qui fe trouvent
dans cette race Tartare, il ne faut que comparer les
defcriptions que les voyageurs ont faites de chacun des
différens peuples qui la compofent. Les Calmuques qui
habitent dans le voifinage de là mer Cafpienne, entre les
Mofcovites & les grands Tartares, font, félon Tavernier,
des hommes robuftes , mais les plus laids & les plus difformes
qui foient fous le ciel ; ils ont le vifage fi plat &
fi large , que d’un oeil à l’autre il y a l ’efpace de cinq ou
fix doigts , leurs yeux font extraordinairement petits, &
le peu qu’ils ont de nez eft fi plat qu’on n ’y voit que
deux trous au lieu de narines, ils ont les genoux tournez
en dehors & les pieds en dedans. Les Tartares du D agheftan
font, après les Calmuques, les plus laids de tous
B b b iij