un corps ainfi embaumé, on aurait deux puiftans moyens
réunis pour fa confervation. Il ne faut donc pas s’étonner
de ce que Chardin nous rapporte du pays de Coraflàn
en Perfe, qui eft l’ancienne Ba&riane : il dit que les corps
que l’on met dans les fables de ce pays, après avoir été
embaumez, s’y pétrifient, c’eft-à-dire, y deviennent fort
durs tant ils font defféchez , & s’y confervent pendant
plùfieurs fiècles : on alfure qu’il y en a qui y font depuis
deux mille arts *.
Les Egyptiens entouraient de bandelettes les cadavres
embaumez, & les renfermoient dans des cercueils, peut-
être qu’avec toutes ces précautions ils ne fe feraient pas
confervez pendant tant de fiècles, fi les caveaux ou les
puits dans lefquels on les enfermoit, n’avoient pas été
dans un fol de matière bolaire & crétacée, qui n’étoit pas
fufceptible d’humidité, & qui d’ailleurs étoit recouvert de
fable aride de plufieurs pieds d’épaifleur.
Les fépulcres des anciens Egyptiens fubfiftent encore
à préfent : la plûpart des voyageurs ont fait la defcription
de ceux de l’ancienne Memphis, & y ont vû des momies,
ils font à deux lieues des ruines de cette ville, à neuf
lieues du grand Caire du côté du midi , & a trois quarts
de lieue du village de Saccara ou Zaccara; ils s’étendent
iufqu’aux pyramides de Pharaon, qui en font éloignées
de deux lieues & demie. Ces fépulcres font dans des campagnes
couvertes d’un fable mouvant, jaunâtre & très-fin,
„ * Voyages de M.Ie Chevalier Chardin en Perfe, &c. Amfterdam
,1711. Tome I I , page '1 3 .
D e s c r i p t i o n d u C a b i n e t . 2 9 3
le pays eft aride & inontueux ; les entrées des tombeaux
font remplies de fable, il y en a plufieurs qui ont été ouvertes,
mais il en refte encore de cachées, il eft queftion-
de les trouver dans des plaines à perte de vue. Les habi-
tans de Saccara n’ont pas d’autre reflource & d’autre commerce
dans leurs deferts, que de chercher des momies
dont ils font un commerce en les vendant aux étrangers
qui fe trouvent au grand Caire. Pietro délia Vaile * voulant
defcendre dans un tombeau qui n’eût pas encore été
fouillé, fe détermina à prendre des pionniers à Saccara,
& à les accompagner pour les voir travailler en fa pré-
fence dans les endroits ou le fable n avoit pas ete remue;'
mais il auroit peut-être perdu beaucoup de temps dans-
cette recherche faite au hafard, fi un de fes ouvriers iu-
voit trouvé d’avance ce qu il cherchoit.
Lorfqu’on a détourné le fable on rencontre une petite
ouverture carrée, profonde de dix-huit pieds, & faite de
façon qu’on y peut defcendre en mettant les pieds dans
des trous qui fe trouvent les uns vis-à-vis les autres : cette
forte d’entrée a fait donner à ces tombeaux le nom de
puits; ils font creufez dans une pierre blanche & tendre,
qui eft dans tout ce pays-fous quelques pieds d’épaiflc-ur
de fable,-les moins-profonds ont quarante - deux piedsr
Quand on eft d-efcendu au fond, on y voit des -ouvertures'
carrées , & des paflàges de dix ou quinze pieds , qui
conduifent dans des chambres de quinze ou vingt pieds
* Voyages- cfcus l’Egypte-, la Paleftine , les Indes Orientales, &c.
Tome I , page 332. cV fuiy.