en avoit beaucoup qui aiioient au delà de ce terme \
Les Ingriens & les Caréliens qui habitent les provinces
feptentrionales de la Mofcovie, & qui font les naturels du
pays des environs de Péterlbourg, font des hommes vigoureux
& d’une conflitution robuftc, ils ont pour la
plupart les cheveux blancs ou blonds ^ ; ils relfemblent
alfez aux Finnois & ils parlent la même langue qui n’a
aucun rapport avec toutes les autres langues du Nord.
En réfléchiffant fur la defcription hiftorique que nous
venons de faire de tous les peuples de l’Europe & de
l’Afie, il paraît que la couleur dépend beaucoup du climat,
fans cependant qu’on puilfe dire qu’elle en dépende
entièrement : il y a en effet plufieurs caufès qui doivent
influer fur la couleur & même fur la forme du corps &
des traits des différens peuples ; l’une des principales efl la
nourriture , & nous examinerons dans la fuite les chan-
gemens qu’elle peut occafiOnner. Une autre qui ne laiffe
pas de produire fon effet, font les moeurs ou la manière
de vivre ; un peuple policé qui vit dans une certaine ai-
fance, qui efl accoûtumé à une vie réglée, douce & tranquille,
qui par les foins d’un bon gouvernement efl à l’abri
d une certaine misère, &.ne peut manquer des chofes de
première néceffité, fera par cette feule raifon compofé
d’hommes plus forts, plus beaux & mieux faits qu’une 1
1 Voye z le voyage d’un AmbafTadeur de l’Empereur Léopold au
Czar Michaelowits. Leyde, i 6 88 , page 220.
' Voyez'les nouveaux mémoires fur i’éfat-de ta grande Ruffie. Paris,
1 7 2 5 , Tome I I , page 6 4.
nation fauvage & indépendante, où chaque individu ne
tirant aucun fecours de la fociété, efl obligé de pourvoir
à fà fubfiflançe, defouffrir alternativement la faim ou les
excès d’une nourriture fouvent mauvaife, de s’épuifer de
travaux ou delaffitude, d’éprouver les rigueurs du climat
fans pouvoir s’en garantir , d’agir en un mot plus fouvent
comme animal que comme homme. En fuppofànt ces
deux différens peuples fous un même climat , on peut
croire que les hommes de la nation fauvage feraient plus
bafànez , plus laids, plus petits, plus ridez que ceux de la
nation policée. S’ils avoient quelque avantage fur ceux-ci,
ce ferait par la force ou plutôt par la dureté de leur corps,
il pourrait fe faire auffi qu’il y eût dans cette nation fauvage
beaucoup moins de boffus , de boiteux , de fourds, de
louches, &c. Ces hommes défectueux vivent & même fe
multiplient dans une nation policée où l’on fe fupporte les
uns les autres, où le fort ne peut rien contre le foible, où
les qualités du corps font beaucoup moins que celles de
l’efprit; mais dans un peuple fauvage, comme chaque individu
ne fubfifle, ne vit, ne fe défend que par fes qualités
corporelles, fon adreffe & fà force, ceux qui font mal-
heureufement nez foibles, défectueux ou qui deviennent
incommodez, ceffent bien-tôt de faire partie de la nation.
J ’admettrais donc trois caufes qui toutes trois concourent
à produire les variétés que nous remarquons dans les
différens peuples de la terre. La première efl l’influence
du climat, la fécondé, qui tient beaucoup à la première,
efl la nourriture, & la troifième, qui tient peut-être encore