
voient pu en deviner l’ufage. C ’étoit à notre fiècle
qu'il étoit réfervé d’en découvrir les fondions
admirables.
L'étamine eft la partie mâle des fleurs. Elle eft
compofée d'un filament terminé , comme nous l’avons
dit , par l’anthère , qui fe préfente fous la
forme d'une petite capfule remplie d'une poudre
fine , réfineufè, que l'on nomme pollen ou poujjiére
fécondante. A une certaine époque, ces capfules s'en-
tr'ouvrent & laiffent échapper la pouflière qu’elles
contiennent : elle s’élance par un mouvement élastique
, s'attache au ftygmate ou à là partie fupé-
rieure du piftil, qui la tranfmet à l’ovaire.
Lepiftil eft la partie femelle des plantes, compofée
de /’ovaire ou de l'embryon du fruit non fécondé,
du ftyle ou filet & du ftygmate. Ce dernier,
ainfi que le lty le , eft poreux, on&ueux, divifé intérieurement
en plufieurs canaux ou trompes 3 afin
que la pouflière fécondante puiffe le pénétrer.
Ordinairement les deux fexes font réunis dans
la même fleur, c’eft-à-dire , que cette fleur renferme
des étamines & des piftils, & les plantes
où cette réunion a lieu, font de véritables hermaphrodites.
D ’autres préfentent le piftil dans une fleur & les
étamines dans une autre fur ie même individu ; ces
fleurs font monotones : d’autres enfin , comme ta
plupart des animaux , ont des individus mâles &
des individus femelles fur des pieds, féparés ; ce
font les fleurs dioiques ,• tels font les melons, les
citrouilles, le chanvre, &c. Par une conféquence
de ces principes, les fleurs mâles, qui ne contiennent
que des étamines, ne donnent jamais de fruits;
de même les fleurs femelles , qui n'ont que des
piftils, reftent ftériles s'il n'exifte point dans leur
voifinage un individu mâle. Quand on retranche
les étamines dans les plantes hermaphrodites, la
femence demeure inféconde & périt.
Les étamines & les piftils font donc les parties
les plus effentielles désolantes, puifque fans elles
il n'y auroit point de fécondation. Aufli rien de
plus admirable que les précautions employées par
la nature, pour les garanrirdes accidens nombreux
qui les environnent de toutes parts. C'eft dans le
centre de la fleur , c’eft au milieu de la corolle
qu'elles font placées ; elles y reçoivent avec plus
d avantage la chaleur d’un foleil bienfaifant dont
les rayons fe réunifient fur le difque poli & ver-
niffé aes pétales, comme dans le foyer d'un miroir
concave. C ’eft pour recevoir les douces influences,
de cet aftre, qu’elles dével^ppent-toute la beauté de
leurs formes ; mais à l’approche de la nuit ou d'un
tems humide, les pétales fe réunifient, la corolle fe
ferme , & par ce moyen ces parties délicates, deftinées
à la fécondation, fe trouvent garanties des
intempéries de l'atmofphère. C ’eft ainfi que dans
'un beau jour<de printems cette prairie émaillée de
fleurs, toute Ouverte de pâquerettes argentées,
fi nous la revoyons au coucher du foleil, elle ne
nous offrira plus qu'une verdure uniforme. C ’eft
ce phénomène que Linné a défigné très-ingénieu-
fement fous le nom de fommeil des plantes.
Toutes les fleurs, il eft vrai, n'ont pas la faculté
de fermer leur corolle, mais les parties fexuelles
n’en font pas moins défendues. Les fleurs dont la
corolle eft évafée, tels que dans le lys & la tulipe,
courbent leur pédoncule , s’ inclinent, & préfentent
, par cette fituation, un toit folide, fous lequel
les parties fécondantes font en fureté : dans d’autres,
telles que dans les labiées & les papillona-
cées, les étamines & les piftils font renfermés dans
un des pétales, dont la forme eft en cafque ou en
capuchon : dans quelques-unes enfin, dont la corolle
refte en tout tems ouverte fans changer de
fituation, tel que dans les iris, les étamines couchées
fur les pétales font recouvertes par le ftygmate
, q u i, dans ces fortes de plantes , eft très-^
large & prend la forme d’un pétale.
Ces formes variées des fleurs, qui font l'objet
de notre admiration, ne font donc point uniquement
deftinées à récréer notre vue. C'eft fous ces
dehors brillans que la nature cache fes fublimes
opérations ; mais la corolle, d'une fubftance fine
& délicate, pourioit quelquefois être infuffifante
pour garantir les organes générateurs : une enveloppe
extérieure, plus forte, plus épaiffe, le calice
dont nons avons déjà parlé, vient à fon appui. C'eft
entre ce double rempart que les étamines & les
piftils exécutent leurs myftérieufes fiondtions. Dès
que ces parties ont rempli le but pour lequel elles
ont été créées, auflitôt elles fe ferment & fe def-
fechent. La corolle elle-même perd fon éclat, fe
flétrit & meurt j mais le calice , dont les fervicés
font plus étendus, dure aufli plus long-tems ; il
perfifte fouventàvec le fruit qu'il enveloppe par la
bafe , fait corps avec lui, en devient comme l'épiderme
, ou bien il fe gonfle, s’étend 6c forme une
efpèce de fac dans lequel le fruit eft renfermé.
I.e Fr u it . Ce dernier fuccèdeaux fleurs, & répare
les pertes que l’intempérie des faifons & les
befoins de l'homme & des animaux occafionnent
aux plantes. Tous les fruits renferment fous une
ou plufieurs enveloppes le germe de la plante future.
Parmi les graines, les unes font pourvues
d'ailes, d'aigrettes, de panaches, au moyen def-
quels elles nagent dans l'air ou dans l’eau , qui les
tranfporte & les ferrie au loin fur la furface de
notre globe ; d’autres, mieux revêtues, font placées
dans des gaînes ou des filiques où .elles peuvent
fe conferver des années entières : beaucoup
d’autres font renfermées dans des capfules à une
jou à plufieurs loges. Les unes, fous une chair molle
& délicieufe,, relevée encore par la beauté du coloris
, cachent un noyau ou un pépin ; d'autres font
placées dans des coques armées de piquans ou abreuvées
d*un fuc amer, ou garnies d’une bourre très-
fine. Enfin, les formes extérieures des fruits n'offrent
pas moins de variétés que celles des feuilles
& des fleurs : il n’eft prefque aucun genre de figures
dont ils ne fourniffent des exemples.
Sans cette fage & admirable précaution, des contrées
immenfes euffent été frappées de ftérilité ;
mais l’auteur de la nature a tout prévu. En armant
certaines graines d'aigrettes ou de larges membranes,
il les a rendues propres à être au loin diffé-
minées par les vents : en revêtant les autres d’une
coque dure, il les a deftinées à flotter long-tems
fur l’eau, & à croître loin de leur fol natal j d'autres
, hériffées de poils crochus , s'attachent aux
toifons des animaux, qui les difperfent au loin.
§. VIII. Du lieu natal des plantes..
La conno:ffance du lieu natal des plantes a été
reconnue par Linné comme tellement effentielle
pour la perfection de leur étude & pour le fuccès
de leur culture , qu'il n’a jamais négligé de citer
la patrie de chacune des efpèces qu'il décrit, &
autant qu'il le peut le fol où elles croiffent. Il nous
a mêmedaiffé à ce fujet des préceptes qui fe trouvent
expofés dans fa Philofophie botanique , &r qui
ont été parfaitement bien développés par M. Du-
rande, dans fes Notions élémentaires de Botanique.
La nature, dit ce dernier & favant auteur, a prémuni
certaines plantes contre les chaleurs brûlantes;
elle en a endurci d'autres contre les gelées ,
afin qu'il n’y eût aucun pays qui ne fût pourvu de
végétaux. Linné les envifageant fous ce point de
vue, les confidère relativement, i°. à leur climat ;
2°. à leuréxpofition ; 30. à leur fol. Il reconnoît
fept climats.
I . L e C l i m a t .
i®. Le climat des Indes f coelum indicum) eft
entre les tropiques d'Afie, d'Amérique & d'Afrique
: il n'y a pas d'hiver : jamais le froid n’y do- I
mine au point de glacer les plantes ni de condenfer 1
la refpiration de manière à la rendre fenfible aux
yeux. La plupart des plantes, à raifon de la chaleur
continuelle, y fleuriffent jufqu a deux,foîs, & dans 1
plufieurs des ces endroits il pleut quelquefois pen- ;
dant la moitié de l’année. Ces végétaux, dans nos i
jardins, pouffent ordinairement beaucoup pendant
le printems & l ’automne;mais ils languiffent, fans
néanmoins perdre leurs feuilles, pendant l’été &
l ’hiver, Les exceptions fur ladélicateffe des plantes
de ce climat font rares ; cependant le framboifier
fe trouve également fous la ligne & vers les pôles.
Le mûrier blanc, que l'on cultive aujourd’hui dans
le Nord, eft indigène de la Chine. L'obfervation
peut feule faire connoître les plantes qui jouiffent
de ces avantages peu commùns.
2°. Le climat d’Égypte {ccdum&gypiiaeum) diffère
du précédent par fa chaleur, portée à un tel
point, que dans certains jours l'homme ne peut
mettre le pied fur le fable fans fe brûler. Dans ce
pays il n'y a point de pluie pendant fîx mois ; aufli
produit-il un grand nombre de plantes à racines bul-
beufes, au moyen defquelles elles peuvent vivre
plus long-tems fans eau.
30. Le climat méridional (coelum auftrale) s’étend
depuis l'Ethiopie iufqu’au Cap de Bonne-Efpé-
rance : il jouit de l’eté, tandis que l'hiver nous tourmente.
Les plantes de ce climat ne changent pas
aifément le tems de leur floraifon , qui le plus fou-
vent a lieu vers le folftice d’hiver. D'ailleurs elles ne
fupportent ni nos grands froids ni les chaleurs des
Indes ; mais elles exigent un air tempéré de douze à
dix-huit degrés. Les plantes de l’Amérique méridionale
font celles du Pérou, du Bréfil, qui le plus
fouvent doivent être traitées comme celles du Cap.
4°. Les plantes de Terre-Ferme ( coelum medi-
tenraneum ) font celles de l’Europe méridionale ;
de la Hongrie, d’Efpagne, de Portugal, d'Italie,
de l'Archipel, & même celles de la Médie & de
l'Arménie. Les déferts de Médie, fuivant l’obfer-
vation de Buxbaum, nourriffent les mêmes plantes
que les déferts de l’Efpagne : l’Arménie offre aux
voyageurs celles de l'Italie : la plupart des plantes
de Montpellier £c de Hongrie s’obfervent à Constantinople.
50. Les plantes du Nord ( coelum boreale ) font
celles de l'Europe feptentrionale, depuis la Lap-
ponie jufqu’à Paris; la Suède, la Ruflie, la Pruffe ,
l ’Allemagne, la Suiffe , le Dannemarck, l'Angleterre
, la Flandre : elles s’élèvent très-bien dans
nos jardins.
6°. Les plantes de l’Orient ( coelum orientale )
font celles de l’Afie feptentrionale ; la Sibérie, la
Tartarie qui avoifine la Syrie : la plupart font prin-
tannières.
70. Les plantes occidentales ( coelum occidentale )
font celles de l'Amérique feptentrionale, du Canada,
de Philadelphie, de la Virginie, de la Caroline,
de même que celles du Japon.
8®. Les plantes des Alpes {coelum alpinum) naif-
fent dans ces montagnes d'une hauteur étonnante,
qui, pendant une partie de l’é té , font couvertes
çà & là de neiges. L ’hiver y eft t rè s - lo n g , l'été
très-court, de cinq à fix femaines. Ces végétaux,
nés dans un fol dur & groflier, expofés à tous les
vents, naiffent très-vite, fleuriffent & fructifient
très-promptement.
11. L ’ È X P O s I T I O N.
L'expofition des plantes mérite d’autant plus d’attention
, qu’il exifte un affez grand nombre de vé gétaux
q u i, à la faveur des différentes expofîtions,
fe perpétuent dans les climats en apparence les plus