
des alimens particuliers,néceffaires à leur nutrition !
& à leur exiftence. 11 eft vrai que les végétaux reçoivent
fouvent des influences particulières du fol
ou des engrais dans lefquels ils végètent. On fait
que les vignes trop fumées donnent une mauvaife
qualité au vin ; que la diverfité des terroirs influe
fur les qualités particulières de chaque vin , au
point que fouvent, dans des vignes très-voifines,
on fait des vins de qualité fenfiblement différente ;
que les légumes qui croiflent dans un fol trop
fumé, n'ont pas une faveur aufli agréable que ceux
qui croiflent dans une terre graffe & franche ; que
les plantes qui naiflent au bord de la mer, contiennent
beaucoup de foude, & même du muriate
de foude 5 qu'elles font faîées, &c.
Mais que prouvent ces obfervations, lî ce n’eft
que certaines parties du terrain ou des engrais fe
trouvant difloutes dans l'eau que pompent les racines
des végétaux, paffent accidentellement dans
les plantes, y font aépofées avec plus ou moins
d'abondance, & communiquent à ces plantes & à
leurs produits des qualités particulières? Suit-il
de là que les matières que l'eau a entraînées avec
elle dans le végétal, font des alimens effentiels à
la nutrition & à la confervation de la plante qui
les reçoit ? Non fans doute ; car l'expérience démontre
le contraire , en nous apprenant que les
plantes vivent fort bien dans des circoriftances contraires
à celles qui leur communiquent les goûts
de terroirs, les faveurs de fumiers & les fels marins
abondans dont nous venons de parler.
. Si les végétanx reçoivent quelquefois des influences
particulières du fol ou des engrais dans
lefquels ils végètent, il faut fans doute les attribuer
a des particules de certaines matières que l’eau pompée
par les racines entraîne avec elle ; mais cela ne
prouve point que les plantes qui ont éprouvé ces
influences , avoient befoin , pour fe nourrir, des
particules de matière qui ont été introduites dans
leur fubftance.
Il réfulte des confidérations que nous venons
d'expofer, que les végétaux., compofant fans ceffe
leur propre fubftance par l'aélion de leurs organes,
& ne fe nourriffant pas néceffairement avec des
matières compofées, mais avec de l’eau, de l’air,
de la lumière, &c. forment véritablement des com-
binaifons première^. C’eft donc avec les matériaux
que nous avons indiqués , que l’aélion organique
végétale forme les fuc$. proprés des plantes, les
mucilages, les gommes, les fels effentiels, le fucre,
les huiles fixés & volatiles, les refînes , les fécules,
le gluten, la matière extraélive, la matière ligneufe,
&c. Toutes ces fubftances font tellement réfutantes
de combinaifons premières , que jamais l'art
n’en faura former de femblables.
L'Accroissement eft une fonction organique
qui s'exécute pendant le premier des trois périodes
de la vie de tout être vivant. Il confîûe en une
nutrition furabondante qui fait plus que compenfer
les pertes, ajoute fans cefle aux organes & à toutes
les parties, augmente leurs dimenfions, & développe
le corps vivant qui en fubit l'effet & qui
continue ainfi de s’accroître pendant un certain
tems.
Cette fon&ion s'opère & fe borne, dans les végétaux
s par les mêmes caufes que dans les animaux
; mais dans les premiers elle s'exécute différemment
, & fouvent fes effets ont une puiffanca
qui fe rend remarquable par fon énergie. En effet,
les plantes, furtout celles qui font ligneufes, ont
uae force expanfive dans leur accroiflement, qui
eft quelquefois affez confidérable pour foujever de
groffes pierres & même fendre des rochers.
Ainfi , dans les végétaux, l’accroiffement eft le
réfultat d'une augmentation fucceflive dans les dimenfions
des parties d’une plante , augmentation
dont la durée eft relative à l'efpèce. Tous les corps
vivans jouiffent de la faculté de s'accroître jufqu'à
un certain terme de développement qui eft particulier
à chacun d'eux , parce que l'effet de la nutrition
eft de fournir pendant un tems à l'être en
qui elle s’opère, une nouvelle fubftance aflimilée
à la fienne, & plus grande par fa quantité que les
pertes qu'il en fait par les fuites néceffaires de la
vie : mais a une certaine époque pour chaque individu
, la nutrition ne fournit qu'une aflîmilation
égale à la fomme des pertes; alors l'accroiffement
n'a plus lieu , & l’être qui eft dans ce cas cefle de
recevoir de l'augmentation dans les dimenfions de
fes parties. Ainfi, de même qu'un animal grandit
& groflit jufqu’au tems 011 il a acquis fon parfait
développement, de même aufli une plante s'accroît
dès le premier inftant de fa germination, par l’effet
d’une nutrition qui aflîmile & fixe des matières en
excès fur celles retranchées ou diffipées par les
pertes ; mais la même caufe phyfîque qui donnoit
lieu à cet accroiflement, ceffant à un certain point
de fubfifter, termine de part & d'autre l'accroif-
• fement dont il s'agit.
L’accroiffenient des plantes fe fait toujours,
comme on fait, en longueur & en groffeur 5 &
dans l’accroiffement en longueur on obferve deux
directions différentes que prennent certaines parties
des plantes , telles que les racines & la tige
( voye% ces mots) , parties qui font ordinairement
plongées dans des milieux differens. En effet, les
racines en général pouffent en bas & femblent
chercher toujours à s'enfoncer davantage dans la
terre, pour y trouver la nourriture dont elles fa vent
s'emparer, & qu'elles ont la faculté de tranfmettre
aurefte de la plante; tandis que la tige tend conf-
tamment à s'élever & à s'éloigner du centre du
globe, à moins que fa foibleffe ne la force de céder
à fon poids. (V o y e z mot Accroissement. )
La Génération, sexuelle eft une fon&ion
organique bien reconnue dans les plantes, parce
qu’elle
qu’elle s’y exécute au moyen d’organes très-vifibles
( les parties de la fleur & du fruit ) ; mais le principal
myftère de cette importante fonction eft ici,
comme dans les animaux, jufqu’à préfent impénétrable.
Il eft certain qu’il y a dans les végétaux, ou au
moins dans la plupart d’entr'eux , des organes propres
à la génération fexuelle, organes analogues à
ceux que l’on obferve dans la plupart des animaux,
& qui conftituent deux fexes différens, l'un mâle
&c l'autre femelle , dont le concours eft néceffaire
pour opérer cette génération. En effet, on fait que
dans les plantes, les étamines font un organe mâU,
le piftil un organe femelle , & que ces deux fortes
d'organes, foit réunis, foie féparés, compofent les
parties effentielles de la fleur.
Mais fi le véritable ordre naturel parmi les végétaux
préfente néceffairement, comme dans les
animaux, une férié de corps vivans, diftribués relativement
à la complication ou à la fimplicité de
J’organifation ; & fi vers l’extrémité de cette férié,
où la fimplicité de ï'organifation devient de plus
en plus remarquable, la diftinétion des fexes cefle
d’être perceptible, comme dans la plupart des chryp-
togames, & ou l’aéfe de fécondation ne paroît plus
avoir lieu, ce trait d’analogie entre les animaux &
jes végétaux pourra peut-être nous conduire à découvrir
un jour le myftère de la génération fexuelle.
Une confidération bien digne de notre attention,
ç’eft que dans les animaux en général les organes
effentiels à l’entretien dè la vie font tellemeht remarquables,
qu’ils fourniffènt les meilleurs caractères
pour déterminer parmi ces êtres lès rapports
naturels , & pour les claffer convenablement ; au
lieu que dans les végétaux c'eft prefqu'uniquement
dans les organes de la reproduction, & furtout dans
ceux qui appartiennent à la génération fexuelle',
que l’on trouve les caractères les plus effentiels
pour la diftribution de ces êtres , & pour déterminer
parmi eux les claffes, les ordres & les genres
qui doivent divifer leur férié.
On en fera peu étonné fi l’on prend garde que
la vie, dans les végétaux, eft réellement d’un ordre
inférieur ï> celui qui eft le propre de l’animalité1;
que conféquemment les organes deftinés à fentre-
tenir dans, les premiers , doivent être moins fortement
prononcés que ceux qui la fontexifter dans
les féconds, les organes de ceux-ci ayan!t une forte
de perfectionnement organique qu’aflurément lès
organes des premiers font loin d'avoir. La confî-
déràtion feule de la faculté d’être irritable , dont
toute fibre animale eft douée', fifcült’é dont àu contraire
toute fibre végétale éft dépourvue, fuffït pour
faire fendr le fondement de ce que nqus venons de
dire.
: Tout être vivant qui a la faculté de fe reproduire
par la génération fexuelle , offre uuphéno-
Botaniquc. Tome K.
mène organique bien intéreffant à connoître : je
veux parler de la fécondation. ( Foyez ce mot ). Ce
phénomène, qui renferme tout le myftère de la
génération, & qui vraifemblablement continuera
long-tems ou peut-être toujours d’être un myftère
pour l’homme, pourroit bien être , à l’égard de
î’embryon ou du petit oeuf non fécondé, le même
aCtè de vitaliCation que celui que fubit la petite
maffede matière gélatineufe ou glaireufe qui reçoit
l’ébauche ou les élémens de la vie, comme dans
le plus fimple des polypes amorphes.
Que fe paffe-t-il en effet dans la fécondation végétale?
Voici ce que l’état des parties fait préfumer
à cet égard. On fait que , dans le jeune ovaire
du piftil d'une fleur, les graines que doit avoir le
fruit, y font déjà ébauchées. Ces graines n’attendent
apparemment qu'un aCte particulier qui établit dans
leurs parties la difpofition & l’ordre des chofes qui
permettent l’effeCtuation ou l’exercice du mouvement
organique. Cet aCte particulier n'apporte
point de nouvelles parties , mais difpofe convenablement
celles qui exiftent.
Ce qui prouve que , pour jouir de la vie ou d'une
vie propre , les jeunes graines du piftil ont befoin
de fubir d avance un aCte particulier qui ne fait que
difpofer leurs parties intérieures à pouvoir jouir de
la vie, c’eft-à-dire, du mouvement organique, mais
gui ne donne pas la vie elle-même, c’eft qu’après
la fécondation , fi les graines ne fe trouvent jamais
dans les circonftances qui donnent lieu à leur germination,
jamais elles n’auront joui de la vie ; elles
pourront même parla fuite fe corrompre fans avoir
fubi la mort.
De même , parmi les animaux ovipares, la fécondation
ne fait fans doute que difpofer les parties
internes de l'embryon que contient le petit
oeuf, & les rendre propres à pouvoir jouir du mouvement
organique ; mais ce mouvement organique
n’exiftepas encore, foit avant, foit après la fécondation
dont je viens de parler ; c'eft l’incubation
.feule qui l’amène & qui donne la vie réelle ou active.
Il s’enfuit que, dans les animaux ovipares,
comme dans les végétaux qui produifent des graines,
la fécondation ne donne point la vie, à proprement
parler, mais difpofeles parties intérieures
à la recevoir, ou au moins à pouvoir en jouir. C ’eft
tout au plus alors une vie fufpendue que l’incubation
pour les cfeufs & la germination pour les graines
font exifter ou rendent aCtive.
Mais fi la fécondation eft un aCte particulier qui
difpofe les parties intérieures d’un embryon non
fécondé à l'état propre ou à l'ordre de chofes qui
permet l’exercice du mouvement organique, comment
concevoir la caufe qui donne "à cet aCte une
pareille puiffance ? Cela eft fans doute difficile 8t
peut-être même impoffible à connoître , d’autant
plus qu on n aura jamais les moyens de prouver la
vérité fi 1 on réulfit a l'apercevoir.
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