5 6 I n t r o d u c t i o n à l ' H i s t o i r e
élémens. Elle fùffit feule, elle eft même bien plus grande
qu’il ne faut pour maintenir la raréfaction de l’air au degré
que nous refpirons ; elle eft plus que foffifànte pour entretenir
l’eau dans fon état de liquidité , car on a defcendu
des thermomètres jufqu’à 120 brades de profondeur (m),
& les retirant promptement, on a vu que la température
de l’eau y étoit à très-peu près la même que dans l’intérieur
de la terre à pareille profondeur, c’efl - à - dire,
de 1 o degrés J,. Et comme l’eau la plus chaude monte
toujours à la fùrface, & que le fel l’empêche de geler,
on ne doit pas être furpris de ce qu’en général la mer
ne gèle pas, & que les eaux douces ne gèlent que d’une
certaine épaiffeur, l ’eau du fond reliant toujours liquide,
fors même qu’il fait le plus grand froid, & que les touches
fopérieures font en glace de dix pieds d’épaiffeur.
Mais la Terre eft celui de tous les élémens for lequel
cette chaleur intérieure a dû produire & produit encore
ies plus grands effets. On ne peut pas douter, après les
preuves que j’en ai données (n) , que cette chaleur n’ait été
originairement bien plus grande qu’elle ne l’efl aujourd’hui;
ainfi on doit lui rapporter, comme à la caufo première,
toutes les foblimations, précipitations, agrégations, réparations,
en un mot, tous les mouvemens qui fe font
faits & fe font chaque jour dans l’intérieur du globe, & *&
(m) Hiftoire phyfique de la mer, par M. le comte Marlîgli,
page 16.
(n) Voyez dans cet ouvrage l’ahicîe de la formation des planètes,
& ci-après les articles des époques de la Nature.
D E S A Î I N É R A U X , I.re Partie, 3 7
for-tout dans la couche extérieure où nous avons pénétré
& dont la matière a été remuée par les agens de la
Nature, ou par les mains de l ’homme; car à une ou
peut-être deux lieues de profondeur, on ne peut guère
préfumer qu’il y ait eu des converfions de matière, ni
qu’il s’y faffe encore des changemens réels : toute la
maffe du globe ayant été fondue, liquéfiée par le feu,
l’intérieur n’eft qu’un verre ou concret ou difcret, dont
la fobftance fimple ne petit recevoir aucune altération
par la chaleur feule ; il n’y a donc que la couche fopérieure
& fuperficielle qui, étant expofée à l’aftion des caufès
extérieures, aura fubi toutes les modifications que ces
caufès réunies à celle de la chaleur intérieure auront pu
produire par leur aétion combinée , c ’eft-à-dire , toutes
les modifications , toutes les différences , toutes les
formes, en un mot, des fobftances minérales.
Le feu qui ne paroît être , à la première vue, qu’un
compofé de chaleur & de lumière, ne fèroit-il pas encore
une modification de la matière qu’on doive confidérer à
part, quoiqu’elle né diffère pas effentiellement de l ’une
ou de l ’autre, & encore moins des deux prifès enfemble!
le feu n’exifte jamais fans chaleur, mais il peurexifter fans
lumière. On verra, par mes expériences, que la chaleur
feule & dénuée de toute apparence de lumière, peut
produire les mêmes effets que le feu le plus violent:
on voit auffi que la lumière feule, forfqu’elle eft réunie,
produit les mêmes effets; elle femble porter en elle-même
une fobftance qui n’a pas befoin d’aliment; le feu ne peut