408 I n t r o d u c t i o n à l ’H i s t o i r e
à 240 pieds, il eût été néceffaire que mon affemblage de
miroirs eût eu 216 pieds de diamètre, puifque le foyer
auroit deux pieds ; or un miroir de 2 16 pieds de diamètre
étoit affurément une ehofe impoflible.
A la vérité ce miroir de trois pieds de diamètre brûle
affez vivement pour fondre l’o r , & je voulus voir combien
j’ avois à gagner en réduifànt fon aflion à n’enflammer que
du bois : pour cela j’appliquai fltr le miroir des zones
circulaires de papier pour en diminuer le diamètre, & je
trouvai qu’il n’avoit plus affez de force pour enflammer
du bois fec lorfque fon diamètre fut réduit à quatre pouces
huit ou neuf lign es : prenant donc cinq pouces ou foixante
lignes pour l ’étendue du diamètre nécelfaire pour brûler
avec un foyer de quatre lignes, je ne pouvois me difpenfèr
de conclure que pour brûler également à 240 pieds, où
le foyer auroit néceffairement deux pieds de diamètre, il
me faudrait un miroir de trente pieds de diamètre; ce
qui me paroifloit encore une chofe impoflible, pu du
moins impraticable.
A des raflons fi pofitives, & qué d’autres auraient
regardées comme des démonflrations de l’impoflibilité
du miroir, je n’avois rien à oppofer qu’un fbupçon ; mais
un fbupçon ancien, & fijr lequel plus j’avois réfléchi,
plus je m’étois perfuadé qu’il n’étoit pas fans fondement;
c ’efl: que les effets de la chaleur pouvoient bien n’être pas
proportionnels à la quantité de lumière ; ou, ce qui revient
au même, qu’à égale intenfité de lumière, les grands
foyers dévoient brûler plus vivement que les petits,
En
DES MINÉRAUX, Partie Expérimentale. 409
En eftimant la chaleur mathématiquement, il n’eft pas
douteux que la force des foyers de même longueur ne foit
proportionnelle à la furfàce des miroirs. Un miroir dont
la fùrface eft double de celle d’un autre, doit avoir un foyer
de la même grandeur, fi la courbure eft la même; & ce
foyer de même grandeur doit contenir le double de la
quantité de lumière que contient le premier foyer ; & dans
la fiippofition que les effets font toujours proportionnels
à leurs caufès, on avoit toujours cru que la chaleur de ce
fécond foyer devoit être double de celle du premier.
D e même & par la même eftimation mathématique,
on a toujours cru qu’à égale intenfité de lumière, un
petit foyer devoit brûler autant qu’un grand, & que l’effet
de la chaleur devoit être proportionnel à cette intenfité
de lumière; en forte, difoit Defcartes, qu’on peut faire des
verres ou des miroirs extrêmement petits qui brûleront avec autant
de violence que les plus grands. Je penfài d’abord, comme
je l’ai dit ci-deffus, que cette conclufion tirée de la théorie
mathématique , pourroit bien fe trouver fauffe dans fa
pratique, parce que la chaleur étant une qualitéphyfique,
de l’aétion & de la propagation de laquelle nous ne
connoiffons pas bien les loix; il mefèmbloit qu’il y avoit
quelque efjaèce de témérité à en eftimer ainfi les effets
par un raifonnement de fimple fpéculation.
J ’eus donc recours encore une fois à l’expérience: je
pris des miroirs de métal de différens foyers & de différens
degrés de poliment; & en comparant l’aélion des différens
foyers fur les mêmes matières fufibles ou combuftibles,
Supplément. Tome I. . F f f