n’avons-nous pas naturellement trop de penchant à refufer
ce que nous devons à ceux qui nous ont précédés! & fi
notre fiècle refufc plus qu un autre, ne /croit - ce pas
qu’étant plus éclairé il croit avoir plus, de droit à la gloire,
plus de prétentions à la fupériorité !
Quoi qu’il en foit, cette invention étoit dans le cas
de plufieurs autres découvertes de l’antiquité qui fe font
évanouies, parce qu’on a préféré la facilité de les nier à la
difficulté de les retrouver ; & les miroirs ardens d’Archimède
étoient fi décriés, qu’il ne paroififoit pas poffible
d’en rétablir la réputation, car, pour appeler du jugement
de Defcartes , il falloir quelque chofe de plus fort que des
raifbns, & il ne reftoit qu’un moyen fur & décifif, à la
vérité, mais difficile & hardi, c ’étoit d’entreprendre de
trouver les miroirs, c ’eft - à - dire, d’en faire qui puffent
produire les mêmes effets ; j’en avois conçu depuis longtemps
l’idée, & j’avouerai volontiers que le plus difficile de
la chofè étoit de lavoir poffible, puifque dans l’execution
j’ai réuffi au-delà même de mes efpérances.
J ’ai donc cherché le moyen de faire des miroirs pour
brider à de grandes diflances, comme de io o , de 200
& 300 pieds; je fàvois en général qu’avec les miroirs
par réflexion, l’on n’avoit jamais brûlé qu’à 15 fou 20
pieds tout au plus, & qu’avec ceux qui font réfringens,
la diftance étoit encore plus courte, & je fèntois bien
qu’il étoit impoffible dans la pratique de travailler un
miroir de métal ou de verre avec affez d’exaéfitude pour
brûler à ces grandes diflances ; que pour brûler, par
exemple,
d e s M i n é r a u x , Partie Expérimentale. 401
exemple, à 200 pieds, la fphère ayant dans ce cas 800
pieds de diamètre, on ne pouvoit rien efpérer de la méthode
ordinaire de travailler les verres, & je me perfùadai
bientôt que quand même on pourrait en trouver une
nouvelle pour donner.à de grandes pièces de verre ou
de métal, une courbure auffi légère, il n’en réfùlteroit
encore qu’un avantage très-peu confidérable, comme je
le dirai dans, la fuite.
Mais pour aller par ordre, je cherchai d’abord combien
la lumière du Soleil perdoit par la réflexion à différentes
diflances, & quelles font les matières qui la réfléchiffent
le plus fortement. Je trouvai premièrement que les glaces
étamées, lorfgu’elles font polies avec un peu de foin,
réfléchiffent plus puiffamment la lumière que les métaux
les mieux polis, & même mieux que le métal compofc
dont on fè fert pour faire des miroirs de télefcopes; &
que quoiqu’il y ait dans les glaces deux réflexions, l ’une
à la fiirface '& l’autre à l’intérieur, elles ne laiffent pas de
donner une lumière plus vive, & plus nette que le métal,
qui produit une lumière colorée.
En fécond lieu, en recevant la lumière du Soleil dans un
endroit obfcur, & en la comparant avec cette même lumière
du Soleil réfléchie par une glace, je trouvai qu’à de petites
diflances, comme de quatre ou cinq pieds, elle ne perdoit
qu’environ moitié par la réflexion, ce que je jugeai en failànt
tomber fur la première lumière réfléchie, une fécondé
lumière auffi réfléchie : car la vivacité de ces deux lumières
réfléchies, me parut égale à celle de la lumière directe.
Supplément. Tome I. , E e e