intermédiaire, & c ’eft celui de la chaleur qui paroît tenir
encore de plus près que la lumière à l’effence du feu.
O r , la chaleur exifte tout auffi fbuvent fins lumière que
la lumière exifte fans chaleur ; ces deux principes ne parodient
donc pas néceffairement liés enfèmble; leurs effets
ne font ni fimultanés ni contemporains, puifque dans de
certaines circonftances on fèntde la chaleur long-temps
avant que la lumière paroilfe, & que dans d’autres circonftances
on voit de la lumière long-temps avant de
fentir de la chaleur, & même fans en fèntir aucune.
Dès-lors la chaleur n’eft-elle pas une autre manière
d’être, une modification de la matière, qui diffère à la
vérité moins que toute autre de celle de la lumière, mais
qu’on peut néanmoins confidérer à part, & qu’on devroit
concevoir encore plus aifément ! Car la facilité plus ou
moins grande que nous avons à concevoir les opérations
différentes de la Nature, dépend de celle que nous avons
d’y appliquer nos fens ; lorfqu’un effet de la Nature tombe
fous deux de nos fens, la vue & le toucher, nous croyons
en avoir une pleine connoiffance ; un effet qui n’affeéle
que l’un ou l’autre de ces deux fens, nous paroît plus
difficile à connoître ; & dans ce cas, la facilité ou la difficulté
d’en juger, dépend du degré de fupériorité qui fè
trouve entre nos fens ; la lumière que nous n’apercevons
que par le fens de la vue ( fens le plus fautif & le plus
incomplet ), ne devroit pas nous être aulfi-bien connue
que la chaleur qui frappe le toucher, & affeéte par con-
féquent le plus fûr de nos fèns. Cependant il faut ayouer
d e s M i n é r a u x , I.re Partie. 21
qu’avec cet avantage, on a fait beaucoup moins de découvertes
fur la nature de la chaleur que fur celle de la
lumière, foit que l’homme faififfe mieux ce qu’il voit
que ce qu’il lent, foit que la lumière fè préfèntant ordinairement
comme une fubftance diftinéte & différente de
toutes les autres, elle a paru digne d’une confidération
particulière: au lieu que la.chaleur dont l’effet eft plus
obfcur, fe préfèntant comme un objet moins ifolé, moins
fimple, n’a pas été regardée comme une fubftance diftinéte,
mais comme un attribut de la lumière & du feu.
Quand même cette opinion, qui fait de la chaleur un
pur attribut, une fimple qualité, fe trouveroit fondée, il
lèroit toujours utile de confidérer la chaleur en elle-même
& par les effets qu’elle produit toute feule ; c ’eft-à-dire,
lorfqu’elle nous paroît indépendante de la lumière & du
feu. La première chofe qui me frappe, & qui me paroît
bien digne de remarque, c ’eft que le fiége de la chaleur
eft tout différent de celui de la lumière ; celle-ci occupe
& parcoure les elpaces vides de l’Univers; la chaleur au
contraire fè trouve généralement répandue dans toute la
matière folide. Le globe de la terre & toutes les matières
dont il eft compofé, ont un degré de chaleur bien plus
confidérable qu’on ne pourroit l’imaginer. L ’eau a fon
degré de chaleur qu’elle ne perd qu’en changeant fon
état; c ’eft-à-dire, en perdant fà fluidité; l ’air a auffi fà
chaleur, que nous appelons fà température, qui varie
beaucoup, mais qu’il ne perd jamais en entier, puifque
fon reffort fubfifte même dans le plus grand froid ; le