3 Narratio Cordis Duels Aurellanenfis,
jus de fa mule , Sc fa telle toute efcartellée, par
telle maniéré que la cervelle iffit deflus la chauflee.
En outre, le retournèrent, ôc renverferent, & Il
très terriblement le machaélerent, qu’il fut pre-
fentemènt mort très piteufement. E t avec luy fut
tué un jeune Efcuïer, qui autrefois auoit eftë fon
Page: ôc quand il vit fon Maiftre abbatru, il fe
coucha fur luy pour le garder , mais rien n’y fît.
■ ^ . E t le cheval qui devant le Duc alloit, à tous les
jour de Saint Clement, Vudn 1 4 0 7 . ^ A deux Efcuïers, quand il fentit içeux fréteurs armés
ISÉs* Au fnir d’empres lu y , il commença à ronfler; & quand il
feft neuve J • ]es eut pafl'esfe mit à courre:, Sc fut grand efpace
que ceux qui etoient fus, ne le purent retenir; ôc
quand il fut arrellé, ils virent la ditte mule de leur
Seigneur, qui toute feule couroit apres eux: fi gui-
Comme Inouïs Duc d Orleans, feul Frere
du Roy Charles fixiefme, fut tué dans
la M e de Paris, far le Duc fean
de Bourgongne, froche la forte Barbette
j le Mecredy X X I I I . Novembre,
E x t r a if t du premier v o lum e des C ro n iq u e s
d ’Enguerrant de M on ftrelet.
Chap. XXXVI.
TJ N ces propres jours, advint en la V ille de Pans
Pb la plus douloureufe & piteufe^dventure que
de long temps paravant fut advenue au très C hie-
tien^Royaume de France, pour la mort d’un îeul
homme, c’sftàfçavôir pour la mort d uD u cd ’Or-
Ieatis, feul Frété germain du R o y déFrançe, Charles
le bien aimé, fixiefme de ce nom.: le quelDuCj
étant en la fufdîte Ville, de Paris., fut par un,MerlUUH
crei
ment
derent qu’il fut cheu jus, St pour ce la reprirent
par le frein, pour la ramener au dit Duc. Mais
quand ils vinrent près de ceux qui l’avoient tué,
furent menacés dilânt, s’ils ne s’en alloient, qu’en
tel point feraient mis à mort. Haftivement s’en
allèrent à l’Hoftel de la Reine, en criant, Le. meurtre.
E t ceux qui avoient occis le dit Duc, à haute voix
commencèrent à crier, L e f e u . Et avoient leur fait
par telle maniéré ordonné en leur Hoilel, que l’un
d’eux, en tant que les autres frifoient l’homicide
dv, iW de iaint Clement Pape, -moult griefve- deffus dit, bouta le feu dedans iceluy, & puis, les
nt meurtry & m is * mort piteufement,environ“ uns a cheval, les autres a,ped , haftivement s en
u iv u n i 7 —- ----- I, , • • J C "
fept heures apres difnér U lut- cet homicide fait
&.perpétré par environ pix huit-hommes, leiquels
étoient loges en un Hoftel, où étoit lors pour en-
feigne‘, l’Image de noftreDame,-auprès la porte
Barbette ; 8c là, comme depuis il fut fceu verica-
blement, avoient été p ar plufieurs jours fur intention
d’accomplir ce qu’ils avoient entrepris. E t
quand ce vint à-ce même Mecrcdy, comme dit
elt envoverent un nomme Scaz de Courtecheu-
B Ü H étoit valet de Chambre du R o y , & leurs
complices, devers le dit Duc d’Oileans qui etoit
allé voir làReine de France, en fon Hoftel quelle
avoir n’aaueres achetté de Montagu grand Maiftre
d* Hoftel d uR o y , & fied iceluy au pied delà
ditte porte Barbette , & là gifoit un enfant qui
étoit trepafle jeune , St n’avoit point encore ac-
compli lés jours de fa purification. Lequel Scaz,
venu devers icéluyDue, ît
le décevoir: Mpnléigneur,
allèrent où ils purent le mieux , Sc jettant après
eux chauflès-trapes de fer, à fin qu’on ne les peuft
fuivre, n’y aller apres eux. E t comme renommée
fu t , aucuns d’iceux allèrent en l’Hoilel d’Artois;./
par derrière, à leur Maiftre Jean de Bourgongne,
qui cet oeuvre leur avoit fait faire , ÔC commandé
, comme depuis publiquement il confefla, Sc
ce qu’ils avoient fait lüy racontèrent, St apres très
haftivement mirent leur corps en fauveté. Et de ce
cruel homicide fut le principal co'ndu£teur,un nommé
Rollet d’Auélonville, de nation Normande, auquel
paravant le dit Duc d’Orléans avoit ollé
l’Office des Generaux, du quel le R o y l’avoit pour-
veu, à la priere St requefte du Duc,Philippes de
Bourgongne deffunt; St pour ce deplaifir avifa le
dit Rollet maniéré comment il fe pourrait venger
d’iceluy Duc d’Orléans. Les autres complices fufdevers
iceluy Duc, luy dit de parle Ro y, pour C rent> Guillaume. Courteheufe, St Saz Courteheufe
re v o ir - iVIonfci^neur, le Roy vous mande que devant nomme, nez de la Comte de Ghines, Jean de
fanîdelay veniés devers luy , & qu’il a à parler à - SaMotte , & plufieurs autres, jufqiies au nombre
vous haftivement, Sc pour chofe qui grandement deflus dit. En apres, environ demie heure, ceux de
touche à luy St à vous. Lequel D u c , oüy le Commandement
du Roy , iceluy voulant accomplir,
combien que le R o y rien n’en fça vo it, tantôt &
incontinent monta deflus de fa mule , Sc en fa
compagnie deux Efcuïers fur un cheval, St quatre,
où cinq valets de pied, devant St derrière, portant
torches ; St fes gens qui le dévoient fuivre, point
ne fe haftoient : St aufl'y etoit allé à pnvee mef-
gnie nonobftant que pour ce jour avoit dedans la
V ille de Paris de fa retenue, St à fes dépens, bien
fix cent CheValliers, St Etcuïers. E t quand il vint
aflez près d’ icelle porte Barbette, les dix huit hommes
deflus dits, qui etoient armés à couvert l’at-
tendoient * Sc s’etoient mis couvertcment aula
famille du dit Duc d’Orléans, quand ils oiiirent
nouvelles de la mort St occifion de leur Seigneur,
tant piteufe, fi fort pleuraient, St griefvementan
coeur courroucés, tant les Nobles , comme non
Nobles, accoururent à luy, Sc là le trouvèrent mort
fur les carreaux, au quel lieu il y eut grandes lamentations,
St regrets des Chevaliers Sc Efcu'iers
de fonHofteljSt generalement de tous les ferviteurs,
quand ils virent ion corps fi terriblement deplayé :
St lors, comme dit e ft, en très grande triftefle Sc
gemiflemens le levèrent, St en l’Hoftel de RieuX
Maréchal de Francequ i près de là é to it, le portèrent
en brief; St fuivant iceluy corps, couvert
de blanc linceul, fut porté en l’Egliledes Guille-
p ré s d’une maifon, ôc foifoit aflez brun pour cette mins aflez honorablement : Sc étoit j iHcelHle HEgj lHife
nuit: St lors incontinent, meus de' hardie St outra-D la plus prochaine du heu, ou jl avoit elle mort.
geufe volonté, faillirent tous enfembleà l’encontre-
Et tantôt apres, le Roy de S icille, lors étant à Paris
de luy, Sc y en eut un qui Pefcria, à la mort, Sc le
ferit d’tfne hache, tellement qu’il luy coupa un
poing tout jus. Et à donc le dit Due, voyant cette
cruelle entreprife ainfy être faite contre, sefciia
aflez haut, en difant: Je fuis le Duc d’Orléans: St
aucuns d’icenx en frappant fur luy , dirent ; c ’eft
ce que nous demandons. Entre lefquclles paroles
U plus grande partie recouvrèrent , St prefente-
ment par force Sc abondance de coups, fut abbatu
, St plufieurs autres Princes , Chevalliers , Sc
Efcuïers, oyant la nouvelle de fl cruelle mort, que
du feul Frere germain du Roy de France, en telle
maniéré perpétrée, à Paris en grands pleurs, en la
ditte Eglife, fl le vinrent voir , St le corps mis en
un cercueil de plomb, toute niait les Religieux de
la ditte Eglife fl veillèrent en difant Vigiles , ôc.
Pfautiers, avec les quels demeurèrent ceux de fa
famille : Sc le lendemain très matin, fut trouvée
par
ç & eorum quoe Infecuta funt.
par fes gens, la main, laquelle luy avoit étécoup-
ppéeee,7 f—u-ries carreaux, Scune partie de fa cervelle,
laquelle fut recueillie , Sc mife au cercueil avec
le corps : Sc tôt après, tous les Princes étant au
dit lieu de Paris, refervé le R o y Sc fes enfans,
c ’eft à fçavoir.
L e R o y Louis.
L e Duc de Berry.
L e Duc de Bourgongne.
L e Duc de Bourbon.
L e Marquis du Pont.
L e Comte de Nevers.
L e Comte de Clermont.
L e Comte de Vandofme.
L e Comte Saint Paul.
L e Comte Dampmartin.
L e Connétable, avec plufieurs autres,
les quels etoient là aflèmblés, tant gens d’Eglife,
comme Nobles, avec très grande multitude de peuple
de Paris, fl vinrent tous enfemble à la ditte E glife
des Guillemins, Sclà les principaux de la famille
du dit Duc d’Orléans prirent fon corps avec le
cercueil -, Sc le mirent hors,Sc avec grand nombre
de torches allumées , les quelles portoient les
' Efcuiers du deffunt; Sc à chacun lez du corps, e-
tôient,par ordre feilant grands pleurs Sc gemiflè-
mens, c’eft à fçavoir le Roy Louis , le Duc de
Berry, le Duc de Bourgongne, le Duc de Bourse
pour plus grande eureté, fe logea: Sc même, la
nuit que le meurtre fut perpétré, il y eutplufieurs
Nobles qui s’armèrent, comme le Comte de Saint
Paul, Sc plufieurs autres, lesquels fe retrahirent
en l’Hoftel du Roy leur Souverain Seigneur, non
fçaehant quelle chofe d’icelle befbigne s’en pourrait
enfuivir.
En - après le corps du dit Duc d’Orléans mis
en terre,s’aflemblcrent tous les Princes, en l’Hofi
tel du Roy Louis; avec leConfeil Royal:Sclà fut
A mandé lé Prevoft de Paris, Sc autres gens de Ju-
ftice,aux quels fut commandé par les dits Seigneurs;
qu’ils fiffent bonne diligence, d’enquerir fi par nulle
voye on pourrait appercevoir qui avoit été l’auteur
, ne les complices de faire cette befbgne ; Sc
avec c e , fut ordonné que toutes les portes de Paris,
refervé une, ou deux, fuflent fermées, Scque
icelles deux fuflent bien gardées pour fçavoir qui
en iffiroit.
Les dits Seigneurs, Sc le Confeil Royal fe retrahirent
tout confus, Sc en grande triftefle en
leurs Hoftels. Et le lendemain, quiTut le Vendre-
d y , vingt cinquiefme du dit Mois de Novembre, fe
raflembla le dit Confeil, à l’H ôtel du Roy de
France, à Saint Paul. Avec lui etoient le R o y Loiiis;
le Duc de Berry, de Bourgongne, Sc de Bourbon,
ôc moult d’autres grands Seigneurs, avec le dit
Confeil Royal. Et tantôt après vint le Prevoft de
bon, chacun d’eux tenant la main au drap q u ié -g Paris, auquel le Duc de Berr^ demanda quelle
; — D diligence il avoit fait, fur l’occifion faite deflus fi
grand Seigneur, comme le feul Frere du R o y ;le
quel répondit qu’il avoit fait la plus grande diligence
qu’il avoit p û , mais encore n’en pouvoit fçavoir
la vérité, difant au R o y , ôc à tous les Seigneurs,
que fi le laifloit entrer en tous les Hoftels des ferviteurs
du R o y , Sc aufiy des autres Princes, par
aventure , comme il croit, trouveroit-il la vérité
des aéleurs, ou des complices. E t le Roy Loiiis;
le Duc de Berry, .Sc le Duc de Bourbon luy donnèrent
congé, Sc licence d’entrer par tou t , où
bon luy fembleroit. E t à donc, le Duc Jean de
Bourgongne, oyant la licence qui fut oélroyée par
toit deflus le cercueil ; Sc apres eux etoient, par
ordonnance,chacun felon fort é ta t , les Princes ,
le C lerg é, les Barons, tous recommandans fon ame
â Dieu noftre Créateur: Scie portèrent, en icelle
maniéré, jufques à l’Eglife des Celeftins. E t là, a-
près fon Service fait très folemnellement, fut enterré
très honorablement en une Chapelle tres-
excellente, la quelle il avoit fait faire ôc fonder.
E t après iceluy Service fa it , ôc accompli,
les Princes deflus dits , ôc tous les autres, fe retrahirent,
chacun en leurs Hoftels.
(Somme le Duc de Bourgongne déclara
n . p . .. g - - , içeux Seigneurs,au Prevoft de Paris,eût doutance
a u Roy de U telle , Çy a/U *1AUC de & tremeur: Sc pour ce attrait à part le Roy Loüisj
Berry , que c 'étoit luy qui avoit fait & le Duc de Beny. fon Oncle , & en brief leur
. */ 8 S «M H h confefla, ôc dit que par l’introduétion del’ennemyi
tuer le Duc d Urleans. fi avoit fait faire cet homicide, par Rollet d’Au-
E x t r a if t du premier L i v r e , o u V o lum e des Cfonville, & fes complices. Les quels Seigneurs,
I l . F , 3 oyans cette 11 confeffion, eurent fi grande admiration,
C rVnmnnpç ron iq u e s rfe de M o n n ft flr r e le t ,. C G h a p o . x XXXVI.x x v i
ol . n WM _____RH J ’
H°7- \ ^res flue k Service de mort du Duc d’Orléans
xxiv. fut fait ôc accompli dans l’Eglife des Celeftins,
xiv. ies Princes fe retrahirent, chacun en leurs Hoftels,
& Ci étoient en grand foupçon de fçavoir la vérité
™0l\ du dit homicide : Sc de prime face, fut au cu n ement
foupçonné que Meffire Aubert de Canny
ne fut coupable, pour la grande haine qu’il avoit
au dit Duc , à caufe que audit Meffire Aubert
avoit fa femme fouftraite ôc emmenée avec- lu y ,
Sc tant avoit tenue icelle Dame en fa compagnie,
qu’il en avoit un fils; du quel, ôedefon gouvernement
fera fait mention cy-apres. Mais en aflez
ôc triftefle au coeur, qu’à peine luy peurent donner
reponfe; Sc ce qu’ils luy en donnèrent, ce fut
en très grandement réprouvant la condition , Sc
maniéré du très cruel homicide, ainfi par luy perpétré,
en la perfonne de fon propre Coufin germain.
Et après qu’ils eurent ouy la connoiflance
du dit Duc de Bourgongne, retournèrent devers
le Confeil, Sc ne déclarèrent pas prefentement ce
qui leur avoit efté dit; Sc brief en fuivant, le dit Confeil
finé, chacun en fon Hoftels’en retournèrent.
L e lendemain, qui fut le Samedy environ dix
heures devant N one, furent les Seigneurs deflus dits
aflembléz en l’Hoftel de N elle, où eftoit logé lé
brief temps en fuivant , ôn fçeut la vérité du dit D-. uc; de; B e r r- y;, p■ ouvr . teHnirH le CHonHfeiHl RHoByaHl; aju
i - - le dit Sieur de Canny n’en _ quel lieu, pour être a iceluyConfeil vint leDuc de
homicide, ôc que J I I D __ ____ o. nlïr ni i’ i I axrnir a r rA iifnm p !/-■ I _
etoit en rien coupable:
En ce même jp u r ,1 Ifabelle Reine de France,
quand-elle fçeut les nouvelles du dit meurtre ôc
homicide fait fi près de fon Hoftel, receut fi grande
fureur hideur, que nonobftant qu’elle rte fut
encore purifiée, neanmoins fe fit mettre fur une
litière, par fon frere Louis dé Bavieres, Sc autres de
fes gens , ôc en fon Hoftel de Saint Paul fe fit porter,
en la chambre proche de la chambre du R o y ,
Tomi V. Pars, 1.
* forte £raieur.
D Bourgongne, ai n(y qu’il avoit accoutumé, le Comte
Val 1er an de Saint Paul en fa compagnie* Mais
quand il vint à entrer dedans , fon Oncle le Duc
de Berry luy dit : „ Beau Nepveu, n’entrez pas au
Confeil pour cette fois,, il ne plaiftmie bien à
„ aucuns qu’y foyez : „ Sc fur c e , le D uc de Berry
rentra dedans, Sc fit tenir huys fermés, ainfi qu’il
avoit été ordonné par le Grand Confeil. Eu alors
le Duc Jean de Bourgongne tout confus , ôc en
doute, demanda au Comte Valleran de Saint Paul:
A z ,, Beau