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fut dépeuplé et réduit à la misère ; ce
cjui fut causé, comme ii arrive ordinairement
dans ces sortes de calamités ,
non-seulement par les places fortes qui
se trouvoient dans ce pays, mais encore
par son voisinage des forteresses importantes.
Mantua voe miserez nimium vicina Cremonoe.
Voilà comment les superbes vignes
tant vantées de Portercole, qui pouvoient
le disputer en bonté et même en avantage
aux meilleurs vins d’Espagne, sont réduites
aujourd’hui à un objet de fort peu d’importance.
Combien ne voyons-nous pas d’indolence
, d’infidélité , de prévention et
d’aveuglement dans les relations de la
plupart des voyageurs atrabilaires ultramontains
, lorsque rendant compte de
choses qu’ils ont plutôt effleurées qu’observées,
ils se plaisent à accuser les
misérables habitans isolés de quelques
cantons de l’Italie. Ils s’exhalent en déclamations
déjà tant de fois rebattues $ e t ,
pour paroître plus sages et plus exacts
que nous , ils déplorent dans des phrases
emphatiques et pompeuses, la décadence
ou même l’abandon total des terres, qui
anciennement étoient riches et fertiles.
et qui pourroient encore l’être aujourd’hui.
Mais que ces déclamateurs pensent
un peu aux maux qu’ils nous ont faits
tant de fois ; qu’ils prennent la peine de
voir que tous ces malheurs, qu’ils attribuent
si légèrement aux Italiens eux-
mêmes , n’ont été causés que par la
dévastation et la désolation qu’y ont
apportées dans tous les temps, les ennemis
et même les nations amies, qu’ils considèrent
combien il faut de temps, combien
d’années de paix sont nécessaires pour
ramener 1 antique splendeur et la prospérité
d’un pays malheureux, pour la destruction
duquel toutes les erreurs politiques
et la fureur militaire ont si souvent conspiré
: on verra bientôt cesser leur étonnement
et les reproches d’une mauvaise
humeur, plus prompte à relever