A V I S .
C’est à mon père, Firmin D id o t , que la piété liliale me fait un devoir de
dédier cette nouvelle édition du Thésaurus grcecoe linguoe; c’est à lui qu’on en
est redevable, puisque je n’ai fait qu’exécuter le voeu qu’il en avait formé ( 1).
Qu’il reçoive donc, avec le témoignage public de la reconnaissance que lui doit
le monde littéraire, celui de mon amour et de mon respect pour ses vertus
publiques et privées, et de mon éternelle reconnaissance pour le soin qu’il
prit dès mon enfance de m’inspirer le goût des lettres et de la typographie,
m’apprenant lui-même la langue grecque avant la langue latine, comme l’avait
fait Robert Estienne pour son fils Henri,
. . . Si parva licet compouere magnis.
S’il ne lui fut point donné de voir la fin de cette grande entreprise, il eut du
moins, peu de temps avant sa mort, la satisfaction de la voir commencée.
Près de trois siècles se sont écoulés depuis qu’en 1672 Henri Estienne fit
paraître, au milieu des malheurs de cette époque fatale, son immense travail, qui
le fit vieillir encore jeune et compromit sa fortune, ainsi qu’il le dit lui-même :
At me thésaurus de divite reddit egenum
Et facit ut juvenem ruga senilis aret.
Bien des catastrophes politiques se sont succédé depuis les travaux préparatoires
de la nouvelle édition, qui heureusement a pu s’achever soùs de plus
( 1) « Puissé-je, avant de mourir, voir une nouvelle édition du Trésor de la langue grecque publiée
« et imprimée par les soins de mon fils Ambroise Firmin Didot ; le voir remettre à leur place les
«, divers suppléments, et donner à l ’ouvrage un ordre plus facile, que Henri Estienne in -
«, dique lui-même dans cette longue et savante lettre sur l’état de sa typographie; ordre qui,
« tout en conservant au dictionnaire l’avantage qu’il a reçu de l’auteur par une distribution ingé-
« nieuse, mais un peu difficile, quelquefois même sujette à contestation, et qu il se repentit
« plusieurs fois d’avoir suivie, eût épargné beaucoup de temps pour les recherches. Oui, je voudrais
« voir mon fils apporter à la publication du Trésor de la langue grecque le soin religieux que Henri
« Estienne voulait donner à la nouvelle édition qu’il préparait de l ’ouvrage de son père, le Trésor
« de la langue latine *. »
* ■« Chants de Tyrlèe traduits en vers français, et autres poésies diverses, suivies d’observations littéraires et lypoyra-
« phiqucs sur Robert et Henri Estienne, par Firmin Didot. Paris, 1826, in-8°, page 221.