Depuis que je témoignais ma gratitude envers tous ceux qui se sont plus
spécialement intéressés à cette grande entreprise, trente - quatre ans se sont
écoulés. Hélas! combien s’est restreint aujourd’hui le nombre de ceux qui
survivent encore! Et combien reste-t-il de ceux qui les premiers ont souscrit
au Thésaurus groecoe linguoe, sachant bien qu’il ne leur était pas réservé
d’en voir jamais la fin, mais ils sentaient que sans leur secours l’oeuvre ne
pouvait s’accomplir! Plus heureuse maintenant, la nouvelle génération jouira
des soins qu’ils se sont donnés pour son plaisir et son utilité.
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Au nombre des secours qui m’ont été communiqués et qui intéressent plus
spécialement le Thesaurus de Henri Estienne, je mentionnerai de nouveau la
découverte de l’exemplaire chargé de notes que possède la Bibliothèque Impériale
de Vienne, notes qui_, ainsi que je l’ai constaté dans l’avis placé en tête de
la seconde livraison, furent écrites par Henri Estienne lui-même.
« Le hasard s ’est plu encore à donner un nouveau lustre à notre édition, et c’est à Henri
« Estienne lui-même que j ’en suis redevable. Les notes et additions inédites, jusqu’à présent igno-
« rées, qu’il avait composées pour son Dictionnaire, prévoyant sans doute qu’on le réimprimerait
« un jour, vont s’y trouver réunies pour là première fois. Je me permettrai quelques détails
« au sujet de cette importante découverte.
« Dans sa lettre du 28 octobre 1830, M. Kopitar, l ’un des Conservateurs de la Bibliothèque
« Impériale de Vienne, écrivait à M. Hase :
« Habet hæe nostra Bibliotheca, ni fallor, emptum cani Holienclorfiana exemplarThesauri, cui
« in margine adspersæ sunt notæ et augmenta, quæ aut ab ipso \Stephano, aut a docto coævo sunt
« profecta. Adjicio specimen ut ipse possis judicare. De auctore primario (sunt enim et aliquot
« notæ alius manus e Demostheue præsertim, sed pleræque sunt ab eadem prima manu quam qui-
« dem Stephani puto, nisi tu aliudelicias e nota ejusdem manus toni. III, p. n 5 5 E ad vocem : iwou;.
« Hesychius exponit etiam Ttal^aç • ubi in margine notatur Vid e m e a . in Horatiuni) , tibi relinquo
« dijudicanda> quum in nostris Horatii edd. Stepbanianis non satis lucis, milii quidem, affulserit.
« Vix autem putem, alium quam ipsum auctorem operis vel minutissima typothetæ et styli
« corrigere voluisse.
« Mibi quidem operæ pretium videtur te hanc rem diligentius examinare, et sive Stephani, sive
« filii aut alius coævi sint hæ notæ, eas in usum tuum converti. Quare tantum die verbo, et exseri-
« bentur et mittentur vobis. »
« Il ne s’agissait donc plus que de savoir dans quelle édition se trouvait cette note sur la 23° ode
« d’Horace relative au mot ïvvouç et quel en était l ’auteur.
« D’après cette indication de M. Kopitar, j ’allai consulter M. Van Praet, qui, avec son obligeance
« ordinaire, me communiqua l’édition d ’Horace inscrite sur le catalogue de la Bibliothèque du Roi
« comme étant de 1588, mais qui (ainsi que celle que je possède maintenant) n’est pas l ’édition
« de 1588, mais évidemment la première sans date que Maittaire dit avoir été imprimée postérieu-
« rement à l’année 1573, et antérieurement à 1576.
« A la troisième strophe de l’ode 23 du premier livre des odes d’Horace,
« Atqui non ego te, tigris ut aspera
« Gætulusve leo, frangere persequor.
« Tandem desine matrem
« Tempestiva sequi viro,
i j e fut avec un véritable transport dejoie que je lus cette scliolie de Henri Estienne imprimée en
« marge : Persequor u tfra n g am etdilacerem :s ic u t hoe feras fr a n g u n t hinnuleos. » •
« Ainsi, puisque dans cette scholie d Horace, Henri Estienne explique par hinnuleos ce mot
;*%vûn; et que dans l ’exemplaire du Thésaurus appartenant à la Bibliothèque de Vienne Ceiui
« qui y a écrit cette note se reconnaît l ’auteur de la scholie d’Horace, vide m e a in Borni. 23,
« il en ïé sü lte l’identité de personneçM f | preuve irréfragable que les notes manuscrites de cet
% exemplaire du Thésaurus de la Bibliothèque Impériale de Yienne ne peuvent être que de la main
« seule de Henri Estienne.
: ' „ M’ K?Pitar d' 1 9«e cet exemplaire vient de la bibliothèque du comte de Hohendorf ; cependant
il ne se tiouve point indiqué.sur lè catalogue de cette célèbre bibliothèque y mais, quoi qu’il en
t!< soit, il n’y a rien d’extraordinaire qu’il soit passé de quelques bibliothèques particulières, soit de
« France, soit même d Allemagne, dans la 'Bibliothèque Impériale de Vienne. On voit par les divers
« écrits d e Henri Estienne et par :le.s documents recueillis par Maittaire, que ce célèbre imprimeur,
- i | après la publication de son Dictionnaire grec, en 1872, passa une grande partie du reste de sa
gl ^ en Allemagne. Il avait dédié son Trésor aux principaux souverains de l ’Europe, et particu-
; J lièremcnt à 1 empereur Maximiliên II ; et il dut se rendre auprès de ce prince éclairé et généreux
* dont il dit A Se Maximiliani imperatoris non tantum de litteris sermonum valde propensam
« voluntatem testantium, sed liberalitatis etiam ob litteras participem factum fuisse (1). »
(( Quoique tourmenté par tant de traversés, et distrait de ses travaux, soit par une mission que
H tò roi lui avait confiée, soit par ïç soin de ses affaires que la publication du Trésor avait fort
.'îîg 'fr) Il paraît qu’il alla deux fois à Vienne avant i5 y 6 , époque de la mort de l'empereur Maxi-
« milien. Par une lettre de Grato de Craftheim, premier médecin de l’empereur, écrite à son fils
..<<011 juin 1876, on voit que Henri Estienne se trouvait à Vienne en i5 y 4 . ci Nihil nunc dicam de
« eommonefactionibus rnultis et amantissimis optimi et clarissimi Henrici Stephani, de universa re
« iitteraria præclare meriti, quibus tibi,- cum superiori anno in Aula Cæsarea esset, iter ad summa
; uionstrare est conatus.» Il partit une autre fois de Vienne pour la Hongrie, où il se. trouvait en
« août' i5 ,5 ",
« Dans son écrit intitulé : Paloestra de Lipsii lalinitate, il dit qu’il revient de llatisbonne (année
« '5 9 3>; et dans sa préface d’Homère, i5 8 8 , qu’il fut plusieurs années absent de chez lui.
« De Thou, dans son Histoire (fin du livre 120), parle aussi de nombreux voyages qu’il fit à la
« fin de sa carrière : « Majore præconio dicendus Henricus Stephanus, Roberti, cui tantum res
« literaria debet, filius, qui patris æmulatione cum scriptoribus edendis et castigandis sedulam ope-
« ram navasset, tandem et penum amplissimam linguæ græcæ dédit, de sua posteraque ætate ob id
« optime meritus. Postea variis peregrinationibus in Germania vagus. »
« Le célèbre Isaac Casaubon, gendre de Henri Estienne, écrit aussi à Richard Thompson
« (Epist. i3 ) :
« Nosti hominem (H. Stephanum), nosti mores, nosti quid apud eum possim, hoc est, quamnihil
« possim : qui videtur in suam perniciem conjurasse, nam quod tu putas eum hic esse, falleris.
« Postquam semel abiit ante menses octo aut novem, ex ilio semper non quidem per Elysios
« campos, sed per Germaniam ¿Xatat, wXavaxat x«V4Wet. Ita enim plane audio àXóeiv eum, ut neque
« domum redire, neque alibi aptas sedes reperire queat. O hominem dignum, cujus te misereat. »
* Oratio adv. Foliet. p. 206, Epist. Orat. vet. 1575.
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