
Les végétaux paroiffent abfolumçnt dépendans
de la nature des lieux qu’ils habitent-, ne feroit-cé
pas parce que chaque pofition a les forces né-
cèiîaires pour donner l’exiftence à de certaines
cfpèces ? » , , © •
11 eft une circonftance. remarquable, & qm
doit jetter quelques nouveaux traits de lumière
fur cette queflion ; elle tient à un coup-d’oeil
général fur les productions de la terre : c’eft
l’analogie des végétaux des termes voifinés des
pôles oppofés. La même organifation .préfente
fouvent les mêmes genres, & même des efpèces
trè^-analogues. Il eft évident que ce n’eft pas la
difféminarion qui a pu tranfporter d’un pôle à
l ’autre des plantes analogues, puifqu’iin mier-
•valle immenfe.d’un climat, où ces efpèces ne
pourroient vivre, fépare les deux points où elles
végètent. Donc ces efpèces analogues ont pris
fimultanément naifiance dans ces deux points
oppofés. Mais, comme je le difois dans l ’alinéa
précédent, quelque loin qu’on remonte,.il faut
s’arrêter à une époque où la Nature a formé un
ou plufieurs individus, ripes, de l’efpèce exif-
tante *, & ce qui a pu avoir lieu dans un temps,
doit pouvoir le renouveller aulfi fouvent que les
circonûances fe trouvent les mêmes.
De la naitfance des Végétaux dans les terres
nouvellement formées.
La Géographie nous conferve la date où
certaines terres ont commencé à fortir des flots ;
les Voyageurs donnent aufii divers renfeignemens.
Ces terres nouvelles, féparées des autres terres
par des mers, fe font enfuite couvertes de végétation.
On peut demander fi la diffémination
des graines a fuffi ? En dernier lieu, une Ifle
vient de fe former fur les côtes de llflande,
par une irruption de l ’Hccla; j’invite les Naturalises,
qui feront des Voyages, dans le Nord à
examiner cette Ifle & à faiiîr le moment des
premières végétations, pour en obfefvcr la Nature.
Pourroit-on imaginer que les graines ont
été vômies avec les ponces & les cendres par
le Volcan ? . Non. Ainfi les végétations feront
nécefl'airem.nt une création de la nature, dans
CC D’autres Ifles ont été produites par des feux
fouterreins, à une époque antérieure : déjà la
végétation doit y être établie. L ’une efl fortie de
la Mer près de Santorin, dans l’Archipel , le
12 mai 1707. Une autre efl fortie près de Ter-
cèie en 1720 *, il feroit utile que dans ces pays,
©ù la végétation efl plus aérive, des Namraliftes
©bfervaffent le genre & la nature des productions
végétales qu’oh y trouve. L ille de l’Afcen-
lion, qui efl ifoiée dans l’Océan, nourrit des
plantes, qui lui font particulières, dans les atomes
de terreau qui fe trouvent entre les crevalfes des
lochcrs ; la végétation y date d’une époque peu
ancienne. Ce font les mêmes moyens qtu en
produiront, ou qui en ont déjà produit, dans les
terres nouvel les forties des flots par les feux
fouterrains.
Avant de faire aucun raifonnement, écoutons
encore les Voyageurs qui ont vu ; je-ferai
fuivre quelques observations fur cet objet, qui
me paroir exiger une attention férieufe.
On trouve, dans le fécond Voyage de Cook,
les ob fer varions fui vastes, qui me paroiflent
devoir fixer notre attention.
En effet, il parle de terreins ifolés, nouvellement
arrachés à la Mer, où la végétation
commence à paroître. Peut - être qu’un Natu-
ralifls plus observateur, ou qui auroit dirigé
fes obfervations. vers cet objet, auroit ajouté
des détails bien plus précieux.
>j Dans la baie de Pofleifion | nous avons
99 vu deux rochers, où la Nature commence fon
>9 grand travail de la végétation *, elle a déjà
>9 formé une légère enveloppe du fol au fom-
>9 met des rochers -, mais fon ouvrage avance fi
99 lentement, qu’il n’y a encore que deux plantes*
>9 un Grainen & une efpece de Pimprenelle....!
99 A la terre de Feu, vers l’Ouefl, & à la terre
99 desEüts, dans les cavités & les crevalfes des
99 piles énormes de rochers qui eompolent ces
99 terres, il fe conferve un peu d’humidité, &
99 le frottement continuel des morceaux de roc«'
99 détachés, précipités le long des flat-cs de ces
99 mafles groflières, produifent de petites par—
99 ticules d’une efpèce de fable : là, dans une
99 eau flagnante, croiflent peu-à-peu quelques
99 plantes du genre des Algues, dont les graines
99 y ont été portées par les oifeaux; ces plantes
99 créent, à la fin de chaque faifon, des atômes
99 de terreau qui s’accroît d'une année à l’autre*
99 les oifeaux, la mer & le vent apportent
99 d’une Ifle voifine, fur ce commencement
99 de terreau, les graines de quelques-unes
99 des plantes à moufle qui y végètent durant
99 la belle faifon : quoique ces plantes ne foient
i 99 pas véritablement des mouffes, elles leur
: 99 reflemblent b e a u c o u p ...... Toutes, ou da
99 moins la plus grande partie, croifftnt d'une
99 manière analogue à ces régions, & propre à
99 former du terreau & du fol fur les rochers
99 flériles. A mefure que ces plantes s’élèvent*
99 elles fe répandent en tiges & en branches, qui
99 fe tiennent auffi près l’une de l’antre que cela
j 3 efl poffible; elles difperfent ainfi de nou-
99 velles graines, & enfin elles couvrent un
99 large canton ; les fibres, les racines, les
99 tuyaux & les feuilles les plus inférieures, tom-
99 bent peu-à-peu en putréfaéfion, produifent
99 une efpèce de tourbe ou de gazon , qui,
99 infenfiblement, fe convertit en terreau & en
93 fol* le tiffu ferré de ces plantes, empêche
39 l’humidité qui eft au-deffous de s’évaporer,
a fournit ainfi à la nutrition de la partie fupi?
w.rienre, & revêt, à la longue, tout l’efpace
»> d’une verdure Confiante.........Je ne puis pas
39 oublier la manière particulière dont croît une .
>3 efpèce de Grainen , dans Tille du Nouvel an, ■
»9 près de- la terre des Etats, & à la Géorgie
33 auftrale. Ce Gramen eft perpétuel , & il
33 affronte les hivers les plus froids il vient
39 toujours en touffes ou panaches, à quelque
39 diflance l’un de l’autre : chaque année les |
39 bourgeons prennent une nouvelle tê te , & j
39 élargirent.le panache jufqu’à ce qu’il ait quatre ,
39 ou cinq pieds de haut, & qu’il foit deux ou
39 trois ;foi? plus large au fommet qu’au pied.
93 Les feuilles & les tiges de ce Gramen font
33 fortes, & fouvent de trois à quatre pieds de
39 long. Les Phoques & les Pinguin sTe réfugient
99 fous ces touffes -, & comme ils fortent fouvent
39 de la Mer rout-mouillés, ils rendent fi fales
99 & fi boueux les fentiers entre les panaches,
99 qu’ un .homme ne peut y marcher ,qu en fau-
39 tant delà cime d’une touffe à l’autre. Ailleurs.
39 les oifeaux appellés Nigauds, s’emparent de
»9 ces touffes & y font leurs nids : ce Gramen
99 & les défections des Phoques, des Pinguins
39 & des Nigauds, donnent peu-à-peu une élé— ;
>9 vation plus confidérable au fol du pays. »
On trouve dans le-troifième Voyage de Cook,
les obfervations fuivantes, qui donnent pareils
lement des Notions, vagues fur la naiffance de la
végitation.
55 Les arbres très-nombreux dans le dernier
» des Iflois (d e rifle Paliperfton ) fur lequel
9> nous defeendimes, avoient déjà formé, de,
95 leurs détritnens, des mondrains que M même
5î caufe éievera, par la fuite dès temps, à la
n hauteur des petites collines. Ils fe trouvoient
9» en moindre quantité fur le premier, qui
» n’offrit aucune éminence, .& qui indiqua ce-
.3 5 pendant, d’une manière plus fenfible, l’origine
« de ces terres-, car, tout-près de cet Iflo.t-, il
•55 y en a un fécond plus petit, formé fans doute
» depuis peu : on n’y trouvait aucun .arbre ,
» mais on y voyoit une multitude d’arbrifleaux,
.» & quelques-uns fur des ,moréeaux de corail
; 95 jetrés par la Mer. Je remarquai, un peu plus.
9» avant, une autre chofe qui donne une nou-
•» velle force à certe théorie -, je veux parler de
5» deux bandes de fable de cinquante verges de
95 long, & d’un pied o u -d ix -h u it pouces de
haut, qui;étoient fur le récif & qui n’avoient
..* 5 pas encore un arbrifleau. )5 .
E t , dans un .autre paragraphe, il obferve que
,ces plantes .étoien: les mêmes que celles des ter-
reins bas des autres Ifles de cet Océan,
Il eft .inutile d’entafler plus de citations ; car
elles n’offrent que des probabilités, puifque les
Voyageurs,. qui ‘ ont dbfervé,,.tfont pas dirigé
leurs recherches vers le-but qui nous occupe :
fav-oir comment la végétation .commence dans
-, ï|s terres nouvelles , & ‘quelle influence ig d.iffémination
des graines peut avoir eue. C ’eft encore
une queflipn à .réfoudre : j'invite les Natur.
rai ifles à s’en occuper, ainfi que des doutes pro?
pofès au mot C l im at.
Des ProduBions cryptogamiquts.
II efl un genre de produirions végétales fur
lefquelles l’attention s’efl déjà portée ; ce font
les plantes dites Cryptogaraiques. Déjà plufieurs
Phyfiologifti s ont révoqué en doute l’exiflencç
des organes fexuels de ces produirions. Les
Sexualiftes, en adoptant leur prin ipé qu’il ne
peut exifler qu’un mode uniforme de repro-
diiilion dans la Nature, ont varié fur les organes
de l ’individu auquel ils attribuôient les fonctions
des fexes : auffi les obfervations des Na viral
ifles fur cet objet, diverfes cntr’elles, n’offrent
aucune expérience qui confirme .leurs fufpicion-.
Je vois, dans les autres- végétaux, l’effet du concours
des fexes, puifque le plus grand nombre
des ovaires non fécondés ne parvieut pas à maturité
: (1) je vois, par conféquent, l ’influence
de ces organes, dont je puis diftinilement ob-
ferver les formes & l’effet. Mais les produirions
cryptogamiques, organifées d’une manière différentes,
m’offrent ni pifliiles, ni ovaires, ni étamines.
Linneus le père nom moit fleur fçmelîe
la rofule des moufles, ■ difformité analogue à la
' galle- en - rofe des Saules : Linneus le fils l’a
nommée, auffi gratuitement, fleur mâle, enfuite
d’un autre Naturalise, Hedwig , qui n’a pu
me rien démontrer, lorfque j’ai ôbfervé avec fon
microfcope & avec lui.
Divers Bio ram fies ont nommé graine une pouf-
fière qui .fe. fronve fur les lames des Agarics ;
& les Sexualiftes, fur la foi du maître, l ’affirment
: encore :l cependant Medicus a prouvé, par des
expériences, que ees pouflières, en s’agglutinant,
forment ce qu’on nomme le blanc de Champin
gnon.-; or, eft - ce- des graines proprement dites
qui forment un tout par leur aggrégation ?
■ Outre cès obfervations, que j’ai eonfignées, à
diverfes époques, dans le Journal de Phyfique ,
j depuis 1780, j’en ai publié une y dans ce même
Ouvrage, relative à 1a Clavaire des -infecres. (C7æ-
varia militaris\ L. ) J ’ai obfervé diftinélement
que ce Champignon avoir brifé l’enveloppe de Ig
Chrifalide, pour en fortir; donc il falloir que
fon germe fut dans l’intérieur: mais par où aurait*
il pénétré- r On fait qu’il n’exifte aucune ouver-
ture.dàns;l’enveloppe des Chrifa.lides : iî fautdonc
que fes premiers rudiniens quelconques fe foient
aggrégés dans le corps dé i’infeéVe. On peut con-
'(,ij Je.dis le -plus, grand nombre, puifque j’ai fait des
expériences qui prouvent que ’des graines font venues à
maturité1 fans, le .concours des fexes. Foyq Journal de
J?hyfique, année i.7§Z,,.
N i j