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mars 1752. La Mouffon du Sud-oiiefl étant
déclarée, quoique ce ne fut que le 2 7 -juin,
ils ne purent aller dans les Ifles du Sud , qui
étoit l’objet important. Tout ce que M. Poivre
tira de cette expédition, ce fut des éclaircifle-
ments fur la navigation cfans 1 Archipel.
Ces difficultés ne le rébutèrent pas. Il profita
d'uue occafion qui pouvoir fervir fon pro-
jer. Le Gouverneur de Sambuangan, établiflemem
Efpagnol, dans Tifle de Mendanao, venoir de
mourir. Il s’agiflait de le faire remplacer par un
homme fur lequel ont put compter. M. Poivre
parvint à faire nommer M. Ofcotte auquel il
s%oit ouvert du projet, & qui avoit fourni
les deux bateaux. Il concerta avec lui les opérations
qu’il s’éroit engagé de fuivre. Rien n’é-
toit plus favorable que fon pofle, liiué à la
porte des Moîucques & envirounés d’inCulaires
qui ne fubfiftoient que par leur commerce dans
l'’Archipel..
Inutilement il attendit pendant 14 mois à'
Manille la frégate qu’il avoit demandée à l’ifle
de France. Le Gouverneur de cette Ifle ,
noyant reçu que des ordres vagues de le
féconder, & manquant de vaifleaux par les be-
foins le plus prenant, ne put lui en envoyer.
Il éprouva un femblabié refus de M. Dupleix,
Gouverneur . de Pondichéry, fous le prétexte
que la Compagnie ne lui avoit donné aucun
ordre. Il ne put donc obtenir de fes. concitoyens
le foible fecours , indifpenfable pour le luccès
de fon ehtreprife. Dans cet- abandon il réfolut
d’aller les chercher lui-même, &x partir pour
Rifle de France, avec 1.9 plants de Mufcadiers
fai ns & vigoureux. Le navire fur le quel il Rembarqua
étoit embarraffé d’une multitude de paf-
fagers de toute nation j il n’avoit ni galieries,
ni chambre du confeil. Comment placer fes
plants-, comment les. foigner & les dérober à
la connoiflance du Capitaine & à celle des paf-
f 'gers? On fe figure aiféinent fon embarras.
L ’efprit qui porta M. Defcîieux-, chargé d’importer
aux Ifles d’Amérique des Plants de café,
fe priver de l ’eau néctflaire à.fa boiffon pour
les arrofer, ce même efprit.infpira à M..Poivre
les moyens de cooferver fes mufcadiers. Malgré
fes foins il ne pot en porter à Pondichéry
que 12.en bon état* Il en perditiy encore dans
cette, relâche, n’ayant trouvé aucun flcours. Il
tenta d’obtenir de M. Dupleix.quelque affifbnce,
pour: retourner à Manille fuivre fa million j M.
Dupleix fut confiant dans fon refus. N’ayant pu
rien gagner il part t.en Oélobre 175$, pour fe rendre
â .Tl fie de France, emportant avec lui trois
de fes plants, &. plaçant les. deux* autres fur un •
aptre bâtiment,qui avoit la.-même deflination,.
A\ fc#. arrivée, il. ne troiiya point. de terrain :
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dipofé à recevoir fes plants, quoiqu’ il eut écr
à la Cempagnie des Indes.
Cherchant à pénétrer les caufes des contra^
diélions qu’il éprouvoit, M. Poivre découvrit
qu’une des principales étoit le changement de
Direéîeur de la Compagnie. C’étoit M. David
quand il- -étoit parti pour Manille. Celui qui le
templaçoit, d'origine Hollandoife, dda prou voir
ou contrequarroit tout ce qu’avoit adopté fon
prédécefîeur. M. Poivre en fut informé par un
de fes amis. Défefpéré des diffieuhes il vouloir
abandonner fon entreprife. Mais l’amour de la
patrie combatit quelque temps cette réfolut ion
& l’eniporta'. Il avoit rempli une partie de fa
million en apportant à i’Ifle de France des plants
de mufcadiers. Il ne refloit. plus a a quérir que
les girofliers. Il avoit dans le Gouverneur de*
Sambuangan un homme qui lui étoit dévoué ,
& qui peut être avoit déjà travaillé efficacement’
pour lui. Ces idées & celle des avantages qu’il-
alioit procurer à fa patrie, lui firent reprendre
courage & méprifer les rifques qu’il alioit cou-
- rir, loir de U part de la mer, foit.de la part des
Hoilandois.
I! demanda à M. Bouvet fuccefleur par intérim
de Mi David, un vaiffeau, quelque mauvais
qu’il fur, uniquement dans l'intention de le porter
à Manille où il efpéroit trouver des plants»
envoyés par M. Ofcotte.
On lui donna- la frégate la Colombe de
tonneaux ; il s’ÿ embarqua le premier mai 1754,
ayant auparavant placé fes plants dans trois
quartiers de 1’Ifle qui lui- parfirent les plus-
convenables â leur culture. Sa traverfée, qui
n’auroit du être que de deux mois, en dura?
trois à caufe du mauvais état de fon bâtiment
qui ne marchoit pas &■ faifoit beaucoup d’eau
mais on n’avoit pu lui en donner un m e illeur.
.
A fon arrivée à Manille il 'trouva un nou- ■
veau Gouverneur. La guerre étoit allumée en--
trè les Espagnols & les Infulaires de Mendanao
& par conséquent la communication fe trou voit,
coupée? entre Manille. & les Ifles méridionales
de 1 Archipel des Moîucques. Point de nouvelles-
de M. Ofcotte, Gouverneur de Sambuangan,.
Il fe détermina à. y palier.
Un mauvais bâriment, qui couloit bas d’ëan
dans le port même, un foible équipage, coia -
pofé de. 8 .blancs & de 22 Larfcars, dont 15.
avoient déferré à Manille, la néceflité de charger
la frégate d’objets utiles pour le compte.:
de la Compagnie qu il : fallait, dédomager dès-
frais de l'armement, ce qui devoir encor dimin uerr
fa marche, - la . crainte que les Hoilandois appre?-
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nant le but- de l’expédition ne s'emparaient
du bâtiment hors d état de fe défendre, fans
efpoir de réclamation de la part de la compagnie
des Indes, tontes ces confidéraiions qui fe
préfentoient à fon efprit, ne purent rallentir fa
réfoltuion. U répara fa frégate, recouvra trois
de ses déferteurs, remplaça les autres par des
Indiens, & quitta Manille le 22 janvier 175.5.
Il cotoya les Fhillipines jusqu’à Mindanao-,
& mouilla le 2 février à l’entrée du port de
Caldeira & le 6 dans la rade de Sambuangan.
M. Ofcotte lui apprit que pour n’être pas venu
plutôt à Manille, il avoit manqué la plus belle
occafion du monde. En janvier 175-4 dcux em"
barcations Molucquoifes éroient entrées dans la
rade de Sambuangan payant à bord 16 quintaux
de girofle dont la moitié étoiem des fruits,
& environ, 12 quintaux de noix mufeades. M.
Poivre - aurait pu traiter avec les- conducteurs
des embarcations-& être conduit- par eux, à l’in-
fu des Holiandôis, dans les lieux où ils recueillent
les Epiceries/ Il eut profiré de cette heu-
reufe circônflance fi on lui avoir envoyé- de
l ’ifle de France la frégate qu’il avoit demandée,
ou fi M. Dupleix eut- voulu à Pondichéry
lui donner le fecours qu’il avoit follicité.-
Le moment étoit pàfle & les regrets fûpéril
us. f es apparences afin arrangement entre les
Elpagnols & les Iftfulaires de Mendanao dbn-
noient encore un peu d’efpbir. Mais la violence
dés courants ne permit pas au vaiffeaifde refler
dans la rade. Il y avoit déjà perdu un ancre
& rompu un câble. Cet événement le détermina
a'faire route vers l’ifle de Meao , - dont il fut
suffi forcé de s’écarter : avec un bon bâtiment
fi eut. réfifté par tout.-.
Ne pouvant faire mieux il pourfuivit fon
voyage, reconnut la côte orientale de Celèbes,
donna dans le détroit deXfilla,très dangéreux,
cotoya Celèbes & Bubon & tenta envain de
traiter avec les habitans qui prirent fa. frégate
pour un bâtiment des Hoilandois avec lefquels
ils éroient en guerre. A la pointe de Bu! ton
il rencontra un vailTeau de cette nation, auquel
il eut le bonheur d'échapper* Ce fut alors qu’il
découvrit un complot formé par un Chirurgien
de fon bord. Ce perfide devoir enlever le canot
&. “aller à. Batavia, révéler, le feeret. du
voyage..
Après avoir paifé encore entre plùfieurs ifles»
M. Poivre mouilla dans, la rade de Liffao,
principal érab'iflemçnt des Portuguais- fur Tifle
de Timor.. Le Gouverneur .& les gens du lieu
lui firent tout. TaccueiT qu’il. pouvoir délirer,.
Il y, trouva, des mufcadiers d’une, efpèce,/ infé-
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rieure à ceux qu’il avoit importé lors de fon'
premier voyage à Manille j cependant en emporta
onze.
Le Gouverneur de Timor ayant autant de
facilité que celui de Sambuangan, pour procurer
des plants d’Epicerie des Moluques, puifque'
tous les jours il venoit dans fa raclé des Macaflars,
bons navigateurs, qui connoiflenr tour l’A rchipel,
M. Poivre le fonda, le mit dant fes1
intérêts & fit alliance avec lu i, au nom de la-
Compagnie. C ’étoit s’aflurer les moyens de
• réuflir, dans le Sud, comme il avoit réuffi dans*,
le Nord;. .
Peu farisfait d’une expédition,fi contrariée,
il fut de retour à i’Iïle de France, le 8 Juin
1755. Il apportoit avec lui des plants de Cacaoyers,
des Rimas ou arbres à pain, dont fe
nourriflent les habitans des Ifles Mariannes
&c. Il préfenta au confeil de la Colonie de
vraies noix mufeades & des fruits dé Girofliers,
qu’il avoir reçus à Sambuangan-, c’étoit annoncer
la poflibilité d’en avoir en état d’être plantés.
Tl remit aufli un plant de Mufcadier, de Tel-
pèce de Timor, le fcul des onze, qu’il eut cor&>-
fervé & une noix.germée.
Sa première attention fut de s’informer des-
Mufcadiers de fon premier voyage, & qu’il avoir
placés dans trois endroi s diffère ns. de Tille. IL
eut la douleur d’apprendre qu’ils éroient tous-
péris d’une mort. peu naturelle.
Pour comble de malheur le nouveau Gouverneur
lui déclara qu’il ne pourroit lui donner'
aucun fecours, pour fuivre fon projet, parce-
que la Compagnie ne lui avoit pardon né d’ordres,-.
Il réfolut & oLtin t la permiffion d’aller enfoliici-
ter lui-même, malgré la: guerre, entre la France
& l’Angleterre. v
Avant de quitter lTflè il propofa de nouveau
au Commantlant de prendre quelques*
mefures dans le. cas, où les Gouverneurs de-
. Sambuangan & de Timor donneroient avis
d’une acquisition de plants d’Epicerie , fuivant
les traités faits avec eux , au nom de la Compagnie.
Le Commandant déclara que dans ce
cas même, il ne pourroit envoyer un vaifleau,,,
ni aux Philippines , ni à T im or ,. n ayant pas*
l’agrément de la Compagnie.
M. Poivre partit de l’ïïïè de francs le i6>
avril 1756 fur le vaifleau le Pondichéry - il paflai
à Madagafcar & faifanr route pour France il fut:
pris; par les an g lors, conduit à Cox: en Irlande
d’où.il revint dàns fa. patrie , le i l ' avril 1757’ *•
Par tous lés faits, que jè viens- de rapporte-
on voit- combien fon. projet de éprouva