
pour empêcher que le poiffon ne s’échappe,’ ;
& ne fuive le courant de l ’eau, lorfque la pale
efi levée au moment de pêcher l’Etang , & pour
pins grande précaution , on la garnit encore du
haut en bas avec dés fafcines.
Si quelque poiffon traverfe le grillage de la
cage & des falcines, il fe trouvera arrêté par le
grillage du canal placé derrière l’empalement.
Cette méthode n’en pas toujours fuivie; on expliquera
tout-à-i’lieure le cas de l’exception.
Dans les règles prefcrites pour la conftruèlion
d’un Etang, j’ai pris un terme moyen, dont on
s’écartera plus ou moins félon le lo cal, l’étendue
& la maffe d’eau -, enfin, les circonffançes qu$
je ne puis, ni prévoir, ni détailler. En ce genre
comme dans tous les objets d’agriculture, la
parcimonie dans ce principe devient à la longue
ruineufe dans les conféquences ; maxime qu’il
ne faudra jamais perdre de vue : ou entreprenez
& exécutez bien, ou n’entreprenez rien du tout.
De VEmpoisonnements La qualité des eaux,
décide la qualité du poiffon dont on doit remplir
l ’Etang. 11 en efl ainfî du fond du fol.
La carpe, la tanche, le lanceron, &c. aiment
les eaux graffes, bourbeufes ■ la perche, là truite,
la vendoife, le gardon, la loche, fe plaifent
dans l’eau vive, & parmi les rocailles ; la truite
multiplie raremênt dans les Etangs même d ’eau
vive'; je brochet, lè barbot, l’anguille, font
très-bien dans les fonds fablonneux.
Si l’on veut que le poiffon profpére dans un
.E ta n g , il efl effentiel qu’il ne s’ y -trouve point
de poiffons voraces, tel que le brochet & la
truite ; à quelques prix qu’ils foient vendus,
le propriétaire efl toujours en perte.
Des efpèces de poiffons. On diftingue deux
efpèces de poiffons-, le marchand, & ta me-
nuifaille. La carpe, le brochet, la perche, la
tanche, la vendoife, le barbot, la truite &
l ’anguille , font des poiffons marchands defli-
. nés à être tranfportés dans les Villes : la menui
faille , la blanchaille,; & la rouflaîlle , efl vendue
fur les lieux, à moins que l’Etang ne lojt
à la proximité d’une grande ville. ■_
Il appartient à l’Hiftoire naturelle des poiffons
de parler au long de toutes les efpèces dont on
peuple les Etangs. Nous-nous contentons d’indiquer
ici en peu'de mots leur utilité.
Le barbot ou barbeau, nommé barbillon dans
fa jeuneffe, détruit dit-on ceux de fon efpèce,
craint le froid, & maigrit pendant l’hiver; fes
.oeufs font .réputés .dangereux.
Le meunier ou mufnier, approche du barbeau ,
aime de l’eau vive & vit de vers & in fe êtes qui
fe trouvent dans l’Etang.
La barbotte , efl un poiffon de peu de valeur,
cependant recherché à caufe de fon foie très-
tplumineux, proportion gardée avec fon corps.
L e goujon, petit poiffoiî, affez infipide dans
les Etangs bourbeux-, plus délicat dans ceux à
fond fablonneux & dont l’eau efl vive.
Le vero'n ou verdon, nommé ainfi a caufe de
la variété de fes couleurs, aime les eaux vives.
Le gardon, a fiez mauvais poiffon, très-utile
cependant à nourrir les brochets, > parce qu il
multiplie beaucoup, & c’efi la même ranon qui
faffe admettre ces fix'efpèces de poiffons dans
les Etangs, car pour le rèfte, elles y font plus
nuifibles que profitables.
La carpe efl la reine des Etangs, & jAR
principalement pour elle qu’on les conniuit ;
fa multiplication efl prodigieufe, & aucun poil-
fon n’eft plus fufceptible qu’elle de perdre les
organes de la génération ou de devenir nulle ;
dans cet état elle porte le nom de carpeau.
Quoique les carpes réufliffent très-bien dans
les Etangs , cependant elles n’ont jamais un goût
aufli délicat que celles que l’on pêche dans les
rivières à eaux vives ; telles font les carpes du
Rhône , du Rhin & de la Loire. La carpeau très-
iong-teros, & parvient à une groffeur monftrueuie,'
les carpes de Fontainebleau en font, la preuve.
La braime rapproche beaucoup de la carpe
pour la figure -, mais elle efl plus large , plus
plate, fes écailles plus grandes ; elle fe plaît dans
la même eau que la carpe.
La vendoife ou vândoife, efl plus délicate que
la carpe , à laquelle elle reffemble quoique.d’une
couleur plus blanchâtre : fon corps efl plus ap—
plati, fon mufeau efl plus pointu.
La tanche. Quoiqu’elle ne-devienne jamais fort
grofic, c’eft un poiffon fort recherché; toute
efpèce d’eau lui convient.;- elle réuflit mieux
dans les eaux bourbeufes, & fupporte facilement
le long tranfport.
Ces poiffons font à nos Etangs, ce que les
oifeaux domeffiques font à nos baffes-.cours ,
prefque tous n’ont de défenle que leur coups
de queue, & leur bouche efl dépourvue de dents ;
il n’en efl pas ainfi des poiffons fuivans.
La perche. Quoiqu’elle ait la bouche petite &
fans dents, elle ne laiffe pas d’être vorace & •
de ruiner bientôt la menmfail!e. On peut la
mettre dans les Etangs à broch-1 : à moins quil
ne la prenne par furprife , e l le f e ’ défend en
lui pré!entant la queue , & en dreflant aufli-tôt
l ’ailerôn piquant qu’elle a fur le dos. Avec cette
même armeelle, perce une infinité de poiffons
qui meurent de leurs bleffures. ,,
Lv brochet, efl le roi dt>s.Etangs; s’il y trouve
une nourriture abondante, il devient mo'nftrueux,
.au défaut de rouffaille, il dévore les brochetons.
Un brochet de fix livres, dévore une carpe du
même poids , & la mange en grande partie dans
la matinée. Les dents de cet animal font nom-
breufe?,
breufes, fortes, aigues ; fa bouche très-grande »
s’ouvrant largement lorfqu’il mord, fes deux
mâchoires fe ferrent fi fort l’une fur l ’autre,
qu’il efl très-difficile de lui faire lâcher prife.
Si le brochet fe trouve dans un Etang, fimpley
ment peuplé de carpes, fans menuifaille , & ,qu’il
foit vendu au prix d’un écq, il efl démontré .qu’il
aura détruit pour la valeur de cinquante francs;
de carpes. On affure que ■ le brochet a. pris en
fix ans , toute la groffeur où il peut parvenir , ,&
qu’enfuite il devient aveugle. La première partie
de cette affertion efl vraie jufqu’à un certain
point, fi l’Etang efl tcopir dreonferit. Dans; les
Etangs de vafie étendue on a prpuyéile contraire.
Quant;.& la.cécité, le fait .demande - .des èx.pé- x
riencés répétées;, pour eu décider avec'certitude.
On ne fait pofitivement jufqu’à quel ;âge ce
poiffon peut vivre ; mais - un broche,t pris près;
d’Heilbronn, dans le duché de Wirrenberg en
Allemagne, fut reconnu d’avoir, deux, cents
foixante-neuf ans, par un anneau attaché, à fa
queue.
•; La truite, efl três-carnaffière ; heureufement
elle ne multiplie pas. ;dans .les Ëtaoigs;, elle y
fait de grands dégâts, quoique fes iffents neffoient
pasiauffi fortes-que celles du brochet.
Anguille doit également' être placée parmi
les poiffons voraces, puifque- je lui a?'vu manger
des petits poiffons; une autre ràiféri doit la faire
redouter j .elle; fait fouvem crever les chauffée. \
Si cès dernières;fférit en maçonnerie* <&, que les.
pierres'-foient mal jointes;, elle; s’infinue1 entre
deux ,-fe ■ glifférdans les>plus petites gerçures,^
& petitrà-petit caufe des- tarons rQu.petitspaffa-
ges à l’eau.' Dans la terre mal Corroyée., dés-
chauffées, ôii mal aflife, le même accident arrive,!
fur-tout fi dans cette . terre, il - fe trouvé
des,.racines pourries. b irn- nui
UEcréviffe, efl fingulièrement Horace ; tobt
le corps enfoncé;dans;un trpù,desiîdè.ûx1ferres
en avant, elle1 guette,;fa proie;; & lorfque lê>
petit poiffon vient jouer fur les bords, elle de*
fai fit avec unie agilité fur prenante : -fl'ai vu une
écréviffe de moyenne groffeur ,.failirune petite,
couleuvre de huit à neuf pouces de ■ .longueur,
& un peu plusigroffe. d’un fori tiiyau déplume,,
la tuer, la tirer dans fon . t r o u f f e :,: Içndemairii
je ne trouvoit plusqu’une.petite.; portion de fon,
extrémité inférieure.
Alevin, ou feuille-, ou ; fretins,\dénomination
fous laquelle on comprend des jeqnes carpes •
tanches, brochets, &c.. trop petits pour être
livrés aqx marchands, & dont on fe fer-t pour
repeupler les Etangs. Le mot feuille , .deyroit
plus particulièrement s'appliquer à|ii poiffon, de
là première année &; cèjùi alevin, 'À ççlujt
de la féconde.
Les propriétaires un peu eniendus-,! ont plis—
fieufs Etangs dè différentes'grandeurs. L e , plus
Agriculture. Tome IV »
petit’ efl confacré pour l’alevin que l’on mêle
tout enfemble , n’importe l’efpèce, pourvu toutefois
que les poiffons voraces y foient en petit
nombre. Il y paffe la première année, après
quoi .on les: .pêche.,, A cette époque on, fait un
choix rigQuréux .des efpèèés nuifibles, & on les
tranfporfe dans Un Etang uniquement defliné
“pour elles, & fortement'1 peuplé de rouffailles ;
les poiffons paifibles font jettés dans un Etang un
peu plus copfidérable que le premier, où trouvant
plus d’efpace à parcourir, & plus de nourriture
, ils croiffent à vue d’oeil. On les y laiffe
pendant deux ans.
Cette féparation permet de Connôître lé poiffon,
de juger de celui qui a le plus profité,
de le chôifirÿ enfin de compter le nombre de
mâles & de femelles.
A la troifième année, lé partagé fe fait, fur
cent carpes femelles, on met vingt-cinq mâles,
& ce nombre efl fùffifant pour un Etang de v
huit à dix arpens, & ainfi de fuite en gardant
; les mêmes proportions pour des Etangs plus étendus.
Cette manière; d’opérer, fur-tout fi les
Etangs font limitrophes, ne force pas le poiffon
à paffer d’un territoire gras dans un terriroire.
maigre ; ce qui lui nuit beaucoup.
On peut fi l’on veut, pêcher, ce dernier &
. grand Etang l’année d’après ; le poiffon y aura
; donné beaucoup de feuille f mais il vaut mieux
■ attendre à la fécondé année. Cette multiplicité
d’Etangs, contactés aux différens .âgês de poif-«
! fojn efl très- avantageufe au vendeur à fache-
: teur. Il efl plus aifé & plus profitable à l’un &
} à l’autre , de vendre un beau qjo'iffpn que deux
. petits ; comme le local ou les moyens ne perr-
. mettent pas de multiplier, les Etangs, & que
■ fouvent on efl réduit à un feul, la règle efl
' différente. '
La 'péché d’ un Etang unique’,’ 'fourbit* des
. earpéS'&-uh^grànd‘inombre?qud ne le font pas,
à'càufe de leur petiteffé, ' de- 'i’aieViri '& de la
: féùiÜé.' - ''
• Lôrfqu’dri pêche un pareil Etang, on fépare
chaque éfpèce , & l’on a, pour cet effet, au-
déffotis de la bonde de l’Etang,, plufieurs réfer-
vôirs- remplis d’eau, & qti’on peut mettre à
fec à volonté; dans l’un.on jette les broche-,
tons. & ;; autres* ,p0iffons voraces invendables ;
dans l’autre des. ; carpes au-dçflbus de la vente,
l’alevin & la feuille; dans le troifième, toute
efpècè de rouljailie , afin de la féparer com—
piettement de la famille des carpes & des' tanches.
Il efl effentiel de maintenir toujours un courant
' ;d/eau nouvelle dans ces, réfervoirs^ parce que
! la multitude de poiffons > l’auroit bientôt - viciée’.
• On connoît que ï ’eau c om m e n c e ê tr e trop
’ vifqueufè &..'trop privée d’a ir , lorfque le poil-
fôn monte à la iufïa çe ,;& qu’il fort la bouche
hors de l’eau pour refpirer un air plus frais 8c
- - - ■ p p