
i \ Dans la première expérience du premier
ordre, le quatrième jour je fis donner aux canards
une pâtée faite de fon gras de froment
& de poudre d'Ergor; ils n’en mangèrent pas
plus que lorfqu’il y avoit de la farine de feigle
au lieu de fon.
i'0. II fallut le treizième jour introduire la
nourriture dans le bec de la dinde de la fécondé
expérience , quoiqu’on ne mêlât à l’Ergot
que du fon (i)_
3.0 J ’ai nourri de faiine de feigle le cochon
de la troifième expérience , pendant fix jours
avant de lui donner de l’Ergot; il fe portait bien
& n'a refufé de manger, que quand j'ai joint
de l'Ergot au feigle.
4.0 Lorfqu’on préfentoit du feigle pur au cochon
de la quatrième expérience il le mangeoit
avec avidité. Si l’on y mêloit de l’Ergot il n’en
vouloir plus ou n’en mangeoit que très - peu.
Cette épreuve a été répétée plufieurs fois.
5°. Dans la première expérience du deuxième
ordre, je n’ai pas donné de feigle au canard,
mais du larrafin qu’il a refufé quand il s’eft
trouvé joint à l’Ergot.
6.° Dans les pays où on ne récolte que du
feigle, les chiens, comme les hommes, fe nour-
rifTenr volontiers de pain fait avec ce grain ;
cependant le chien de la fécondé expérience n'a
point voulu de pain de feigle; fans doute parce
qu’il contenoit de l’Ergot.
' 7.0 La poule de la troifième expérience eût
mangé en vingt-trois jours plus de douze onces
de farine de feigle ,& d’o rge, .& la poule de
la quatrième expérience, qui n’avoit que de l’Ergot
feul à manger, ne le fût pas laiffée mourir
de faim.
J 8/ Les deux canards de la première expérience
du troifième ordre, n’ont pas touché pendant
vingt-quatre heures à une pâtée, compofée
d’un mélange, à parties égales, de farine de froment
& de feigle & d’un dix-feptième feulement
«l'Ergot.
f .° Il en a été de même des deux poules de
la troifième expérience.
io .° Dans la Champagne & dans d’autres
cantons où l’on ne fème que du feigle, on en
donne au cochoys qui ne'le refufent pas, &
cngraiflent avec cette nourriture.
H.° Enfin j’ai fait jetter du feigle à des poules
qu’on nourrilfoient d’orge, elles l’ont mangé
avec avidité. En Sologne j’en ai vu qui faifoient
beaucoup de dégât dans les granges, ’ quoiqu’il
. ( 0 Je ne conçois pas pourquoi dans une de fes expériences
M. Parmentier eut grand loin qu*on ne mêlai
pas de fon avec la farine d'Ergot & de feigle qu'i
faifoiz donner a un cochon car on fait qu’on le lert
ordinairement de fon pour engraillet les cochons, qui
ne contractent pas la gangrène en ne vivant que de
cette nourriture. C’eft,, à i% vérité.,, du. fon gras.
f n’y eût que du feigle. Des pigeons & des dindons
y venoient aulfi & j’ai bien diftingué que
ce n était pas des infeéles qu’ils cherchoient,
mais des grains de feigle que je leur voyois
ramaflèr. Dans un champ de feigle tardif ,
que j’avois feme pour connoître la caufe de
l’Ergot , les moineaux me furent très-incommodes,
parce qu’ils y arrivoient en foule; on
voit ordinairement au commencement de là
maturité des grains, que le feigle qui mûrit
le premier, eft le premier attaqué par les oi-
feaux ; néanmoins je fuis porté à croire qu’ils
préfèrent au feigle d’autres grains quand ils ont
la liberté du choix, mais il s’en faut de beaucoup
que cette préférence puifle être regardée
comme de la répugnance.
R É F L E X I O N S
Sur toutes les expériences comprifes dans les trois
ordres , £ conféquences quon en peut tirer. ■
Il s’élève ici naturellement deux quefiions,
dont la décifion établit les conféquences qu’on
peut tirer de toutes les expériences que je viens
de détailler : la première conüfte à favoir fi
c’eft à l’Ergot feul que font dûs les phénomènes
obfervés dans lès différens animaux ; la
fécondé, fi ces phénomènes ont des rapports
avec les fymprômes des maladies des hommes,.
qu’on a fait dépendre de /l’Ergot : tout le but
du travail fe réduit à ces deux points.
La première queftion n’eft pas la plus difficile
à réfoudre, car o u , il faut attribuer à l’Ergot
la répugnance des animaux pour les aiimens.
qu’on leur a préfentés, & la mort qui s’en eft:
fuiv ie, lorfqu’ils ont été forcés de manger des
mélanges dont l’Ergot faifoit partie, ou de ces
deux effets- le premier eft dû à la qualité des
aiimens même, & le fécond aux aiimens 011
à la propre conftitution des animaux, ou à
l’air qu’ils ont refpiré, ou à la faifon pendant
laquelle les expériences ont été faites, ou enfin
à quelque négligence dans la manière de les
foigner. Or par les dernières obfervaitions, on
voit évidemment que les animaux n’avoient pas
de répugnance pour lès fubftances qu’on joignoit
à l’Ergot, puifqu’on fe fert de ces fubftances-
pour les nourrir. leur donner de l’embonpoint
& les. engraiffer; (1) ' puifque ces- fubftances.
étoienr de diverfe nature & de qualités meilleures
lés unes que les autres ; puifque chaque
fois qu’on les donnoit feules, les animaux les
mangeoieot avec avidité. L ’article des précau-
( l ) Dans quelques cantons de l’A rtois,-on ne fe fez
de feigle que pour engraiffer les cochons. Lettre de, M
I Cauvet, médecin a B<trrune, écrite à M. Boucher t m«
§ decin. à Lille, qui m’en a donné copie.
lions que j’ai eu foin de ne pas omettre
afin de prévenir des objections auxquelles je
m attendois, indique que chacun des animaux
avant -d’être fournis à l’expérience, étoit en
très-bon état, dans un âge convenable & bien
confti tué. Les dofes d’alimens & d'Ergot, comme
je l’ai d it, étoient pefées, renouvellées chaque-
jou r , données en ma préfence, les uftenules :
tenus propres ; les cabanes -nétoyées, & il y j
avoit toujours un vaifleau rempli de bonne eau.
Pouvois-je employer plus d attention, & m af—
furcr mieux dès véritables effets de IJErgot r
L ’air - que .refpiroient les animaux s’il n’eût pas
.été pur , auroit également incommodé ceux qui,
deftinés à être des- objets de comparaifon fe
font bien portés dans les mêmes cabanes. Au refte,
ces cabanes étoient très-fpacieufes & acceflibles
à l’air. Parmi les expériences; les unes ont été
faites en automne, d’autres en hiv e r , d'autres
au printemps, & d’àutres'ên été, & dans chacune
de ces faifons, il eft mort des animaux
.auxquels on a donné de- l’Ergot. Je ne crains
donc pas de me tromper en regardant, comme
démontré que c’eft à l’Ergot feul qu il faut attribuer
la répugnance des animaux, leurs maladies
& leur mort.
En effet, les expériences du fécond ordre
fur-tout prouvent que des quadrupèdes & des
volatiles opt un tel dégoût pour 1 Ergot, que
ceux auxquels en le donne feul pendant quelque
temps, préfèrent de mourir de faim plutôt
que d’en manger fi on les abandonne à eux-
mêmes; Les exemples en font frappans dans un
canard, un chien, deux poules & un cochon.
Cette répugnance n’eft pas au même degré
dans chacun des animaux ; elle augmente ou
diminue félon qu’on leur offre des mélanges
où il y a plus on moins d’Ergot. Elle eft , pour
ainfi dire, invincible, fi l'Ergot eft pur ; s il eft
uni avec de la farine de feigle, elle n eft pas
aufli forte dans les premiers jours, mais elle
le devient par la fuite. La farine dorge qui
apparemment a plus de faveur que celle du feigle
mafque davantage l’Ergot; ce neft que pour
un temps.; & -on ne peut efpérer de faire
manger à des animaux une fuffifante quantité
d’Ergot; fi on ne les trompe perpétuellement, ou
fi on ne leur en fait avaler de forte.
Il réfulte des expériences du premier ordre,
que de fix animaux, l’un n’a été que légèrement
incommodé, parce qu’il a bu feulement de
l ’efprit reéleur d’Ergot, & que les cinq autres
qui ont mangé de cette fubflance même, en font
morts. Les réfultats qu’ont obtenus, MM. de
Salerne & Réad, par des procédèFS-peu-près
femblables, quoique moins exactement rapportés,
étant entièrement les mêmes, leurs expériences
doivent être placées il côté des miehnes (1)
i i ) il eft dît dans le Mémoire de i’Afitâ&niç des
& fervir, comme elles, à faire connoître ju f-
qu’à quel point l’Ergot peut être funefte, puisqu'il
fait périr inévitablement les animaux
auxquels ont parvient à en faire manger une
certaine quantité.
Les expériences du troifième ordre font
connoître que de l’Ergot de trois & cinq ans ,
qu’il foit de Sologne, ou du Maine, ou de la
Beauce ( 1 ) , eft capable d’incommoder plus ou
moins les animaux lorfqu’ils en mangent p eu ,
ou de les tuer même promptement., s’ils en
prennent une dofe fuffifante fous la forme de
pâtée, puifque trois poules qui en ont mangé
une petite quantité en ont été malades, puisque
trois autres poules & deux canards ont péri,
pour en avoir mangé davantage.
Des expériences -du même ordre prouvent
aulfi, que l’Ergot n’eft pas moins funefte aux
animaux qui le mangent mêlé avec de la farine ,
& cuit comme un tourteau, ou fous forme
d’un véritable pain, puifque trois poules, pour
avoir été nourries d’Ergot ainfi préparé, ont
fuccombé comme celles qui en avoient mangé
en fubftance.
Je pourrois rappeller ici prefque toutes les
expériences de M. Schleger. qui confiaient que
s. les animaux auxquels il a donné de l ’Ergot
ont éprouvé des incommodités plus ou moins
grandes ; mais d’après cé qui précède, les preuves
des effets dangereux de l’Ergot font fumlantes
& aiTez fortes, fans faire tourner les expériences
de M. Schleger contre fon opinion. Il s’agit
maintenant d’examiner les rapports qui fe peuvent
trouver entre les maladies des hommes, qu’on
a attribuées à l’E rgot, & celles des animaux *
qui en ont été nourris.
Maladies des hommes , attribuées à P Ergot.
Je crois devoir décrire, en peu de mots
les fymprômes des maladies des hommes attribuées
à l’Ergot; ce'fera d’après les mémoires
de l’Académie des Sciences, années 1676, 17 10,
Ï74IJ& Ie mercure de Janvier 1748, &c. car
je n’ai jamais eu l’occafion de les voir.
Les hommes qui en étoient attaqués, fur-tout
les mieux conftitués, & dans certaines épidémies
éprouvoient les deux ou trois premiers
jours, des douleurs de tête & d’eftomac ; la fièvre
furvenoit enfuite. Ces lignes ne fe manifeftoient
Sciences, que M. Thuillier, médecin du Duc de Sully,
étant à Sully en Sologne, fit donner de [l’Ergot a aes
animaux de baffe-côut qui-en- moururent. Je ne ^tnau«
torife pas de ce f a i t , ni de plufieurs autres qui font
également rapportés làns détails.
(1 ) M. Réad a employé, pour fon cochon, au mois
de Juin i j 6€, de l'Ergot récolté aux environs de Va-*
lencienneç « au m o is d’A o û t i7 $ J / P iè s d ’un an a u p a r a v a n t
M m ij