
on détache ces grains, on remarque à une de
leurs extrémités, quelques traces blanchâtres,.
qui indiquent par où ils adhéroient aux bftles.
Cette adhérence eû foible, parce que l’Ergot n’a
pas de germe, & par conféquent pas de ftlameps,
qui l’attachent au fupport de l'épi. L ’écorce violette
recouvre une lubflance d’un blanc terne
& d’une confiûance ferme., qui ne s’en fépare
pas facilement, même après’ une longue ébullition.
L ’Ergot moulu a l’apparence d’une poudre
brune, tant eû foible la teinte blanche de la pulpe,
dont il eû en partie compofé. M
Qu’on coupe un grain d’Ergot, il caffe net
comme une amande fèche. Un grain ifolé n’a pas
d’odeur; mais un grand nombre de grains réunis,
fur-tout s’ils font nouvellement récoltés, en ont
une très fenûble, & vraiment vireufè, laquelle,
li on réduit l’Ergot en poudre, fe développe davantage
& fe conferve très-long-temps même à
l'air libre.X’eû en cet état, que l’Ergot imprime i
fur la langueune faveur légèrement mordicante':
le pain, dont il fait partie, eû coloré en violet
foncé, ayant une odeur & une faveur peu désagréables.
La farine exempte d’Ergot, abforbe plus
d’eau dans le péni'fiage, que quand elle en contient.
Car un pain fait avec dix onces de belle j
farine de froment, jointe à deux onces & demie
de farine d’Ergot, étoit du poids d’une livre,
une once & deux gros, tandis qu’un pain fait en
même- temps, avec douze onces & demie de la
même farine de froment, fans Ergot, pefoic une
once & 'quatre gros de plus',
Çroffeur de l ’Ergot, quantité quon en trouve fur
les épis, & fa pefauteur. Il
Il y a des Ergots de différente groffeur & de
différente longueur. On en voit de plus petits que
des grains de fëigle même ■ d’antres ont jufqû’à |
dix-huit & dix-neuf lignes de longueur, fur deux
ou trois d’épaiffeur*, la longueur, la plus ordinaire
, eû de dix ou douze lignes. L ’Ergot de Sologne,
où il eû le plus abondant, eû, en général.min ce , ,
& d’une longueur inégale; il y en «cependant des
grains qui font courts & gros à la fois ; Ces.derniers
n’ayant pas la, forme ordinaire, peuvent être
regardas comme monûrueux ; l’Ergot de Beauce
eû plus nourri & moins effilé. Cette différence
dépend de là nature des terres, qui font de meilleure
qualité en Beauce qu’en Sologne.
Quand l’Ergot eû gros, il eû ordinairement
feul, & les grains de fcigle du relie de l’épi font
beaux & fâirs, la plante entière eû vigoureuf^ .
Au contraire, les épis, qui portent de petits Ergots,
en" ont toujours plijfieurs fur une tige foib le ..
Comraut);m£nt, il y a quatre ou cinq Ergots
fur un épi; fouVent on en compte dix & douze ;
quelquefois jufqu’à vingt, ce qui, eû rare. La place
uq’ils occupent n’efl pas déterminée; dépendant
j’ai cru m’appercevoir qu’il y en avoit plus auprès
du tuyau, ou à l’extrémité de l'épi, qu’au milieu,
Il fe Trouve peu & quelquefois point de bons
grains dans les épis, qui portent beaucoup d’Ergôts,
foit que ceux-ci rempliffent prefque routes les
p la c e s fo it qu’il refle un certain nombre debâ-
les vuides. Les grains de feigie des épis, chargés
d’Ergots, ne font jamais en bon état; ils paroif-
fent retraits & recouverts , à leur extrémité fupé-
rieure, d’une poudre noire; les épis eux-mêmes
font fales & noirâtres. Quelquefois, fur une même
fouehe, on voit des épis, qui ont plus ou moins
d’Ergots, & d’ autres qui n’en ont point, mais
dont les grains de feigie font retraits & noircis.
Souvent auffi, une même fouehe porte des épis
Ergotés & des épis qui contiennent des grains
parfaitement fains; les tuyaux même, qui fou-
tiennent des épis Ergotés, s’élèvent & grofliffent
comme lès autres, dont ils ont la couleur; les
feuilles n’en paroiffent pas altérées, comme le
font celles des grains cariés ou charbon né s.'
L'Ergot, expofé à l’air, fê deffèche prompte-
menr.& perd de fo.n volume ; il eû très léger fi on
le compare au feigie. Car un boiffeau, mefure de
Vierzon, qui contient quatorze livres de feigie, ne.
contient que neuf livres d’Ergot. Cette différence
de poidseÛ due en partie feulement, à la forme
longue .& irrégulière des grains d’Ergot, qui ne
peuvent fe tàffer comme Ceux du feigie.
Grains compofés de feigie & d’Ergot. '
J ’ai vu fur beaucoup d’épis de feigie, des grains
compofés de feigie & d’E rgot; du moins les deux
fubûances qni les cônfiituenr, ont la plus grande
analogie, l’une avec le feigie, & l’autre avec l’Ergot.
Car la première a extérieurement la forme &
la couleur du feigie : elle contient de la farine ;
la fécondé eû d’un violet foncé à la furface , &
intérieurement, d’un blanc terne ; la reffemblance
de la partie farineu e de ces grains, avec le feigie,
eû beaucoup plus fenûble lorfqu’ils font frais,
que lorlqu’ils font de (léchées.; Ce qui _efl digne de
remarque, c’efi que la poftion Êrgotée, qui,
tantôt fait la moitié, tantôt le tiers ou le quart,
eû la plus voifine du fupport dei’épi 8t fe trouve^
inférée dans la bâle, occupant la place du germe ;
au lieu que là portion femblable à du feigie , eû à
découvert, & la plus éloignée du fupport. Celle-
ci, dans quelques-uns des grains, eû , en partie ,
recouverte de la portion Ergotée, comme fi la
corruption s’y étoit faite d’une manière, inégale
& précipitée. On ne peut douter- que ce fait,
qui n’avoit point été ‘obfervé, parce que peu de
perfonnes font entrées dans les mêmes détails que
moi, ne doive fervir beaucoup, pour expliquer
la maniéré dont fe forme l’Ergot. Si on fème ces
grains, aucun ne leve ; ce qui ne doit point
étormer , puifque la partie du .germe fe trouve
altérée, • ' .
Le fcigle
Le feigie à’Automne produit-il plus dErgot que :
le feigie de Mars -
On fème en Sologne du feigie a deux temps .
différens, avant l’hiver & au mois de Mars. Le
premier efl 'appellé, ‘dans le pays', gros bled ( il
vaudroit mieux dire gros feigie, ) parce qu’en
effet, le grain en eû plus gros; & le fécond, eû ;
connu fous le nom de bled de Mars, c’eû-à-dire, ;
feigie de Mars. Je n’ai pu découyrir fi l’un pro- :
duifoit plus d’Ergot que l’autre ; ce qu’il y a de,
certain, c’efl que j’en ai recueillibeaucoup'clans
ces deux fortes, de feigie. Je fuis porté à croire
qu'il s’en trouve davantage dans le feigie de Mars;
c a r , toutes chofes étant égales d’ailleurs, on en
voit une plus grande quantité dans les épis tardifs
dû feigie d’Automne, que dans les épis principaux.
M. Read à remarqué que Ihivernaché, qui eflun
nié lange de feigie & de vefee defliné pour la nourriture
des befiiaux, contenoit proportionnellement
plus d’Ergot, que le feigie femé feul.
Liantes fur lefquelles fe trouvent des Ergots.
Parmi les végétaux, le feigie .n’eû pas la feule
plante qui porte de l’Ergot ; M. De Juffieu cpn-
ferve dans fe$ herbiers, un fouchet Ergoté, qui
a été,envoyé de la Louifiane, C’eû, fur-tout la
famille des graminées, qui en fournit. M. Duchef-
nes botanifie connu par fes ouvrages eflimés, m’a
certifié qu’il en avoit beaucoup'vu, dans un terrain
gras & frais fur l’Alpifle ( Phalaris Canarien-
fisy fur le Feftuca âunufcula- & fa variété, ~) feftuca
foliis glaucisy. monfpelicnfis ) } fur le Frômental
f avenu elatior) , & fur une efpèce de Poa. Le
gramen Mannce, nommé par Linneus Feftucra
fluitans , en a dans la prairie dé Gentil.ly,
près Paris. Il y en a paru au Jardin des Plantes,
fur le Gramen loliaçeum ariftis' donatum, J. R. H.
Scion Thalius, il s’en forme en Saxe., fur le Feftuca
tertia feu graminèa nemoralis. M. Frédéric'Rainville
, de l’Académie de Rotterdam, dit en avoir
vu furie Triticum repenSy fur le Triticum jun-
ceum, WArundo arenaria, X Aira cri fiat a, le Lolium
perchée y le Feftuca elatior, XAgroftis ftolonifera, .
Vholcus l ’natuSy l’Alopecurus génieulatus 8l ÏA lo-
pecurus pratenfis. M. Thpuin, jardinier en chef
ciu Jardin des Plantes, m’a rapporté plufieurs épis
du f himoû\y Phleumpratenfe L. ( Gramen thyphoïdes
maximum '. C. B. ) qui étoient Ergotés. Il
les a cueilli dans une petite plaine humide, entourée
de hautes montagnes, & traverfée par la
Dordogne, entre„le village de Bains & le mont-
d’Or en Auvergne. Il affurequ’ily avoit un grand
nombre d’individus de cette plante, Ergotés.
Schmieder. en a apperçu fur l’orge & l’avoine
MM. Duhamel, Tille.t, Réad, Ginani, Beguii-
let , Yetillard , & beaucoup d’autres favans, dont
quelques-uns en avoient découvert fur plufieurs
Agriculture, Tomç LF*
des plantes citées, en ont vu fur du froment.
J ’en ai trouvé, en Beauce, fur des épis de cette
dernière plante & fur des ép'eautres. J ’en ai auflï
trouvé fur de l’ivraye. Mais la petite quantité
d’Ergot, que toutes ces plantés produifent, ne doit
être comptée pour rien, & ne peut jamais être
comparée à ce qu’on en voit dans le feigie, en
quelques pays, & dans certaines années.
Pays oie vient VErgot*
Par-tout où il croît du feigie, if peut y avoir
de l’Ergot.Mais il n’y en a point, ou, prefque point
dans certains cantons, tandis que d’autres en
four.niûenr beaucoup. La Sologne, qui fait partie
de l’Orléanois, eû la province où il s’en trouve
davantage. Le feigie en ,efl le principal objet de
culture ; c’eû dans ce pays que j ’ai cru devoir
aller particulièrement, ..pour mieux obférver ce
qui a rapport à cette production. Voici ce que
j’y ai remarqué.
Plus un terrain étoit humide, plus il avoit pro-
duit-ff’Ergot.
Lesrchamps les plus élevés en avoient peu , à
moins que les filions ne fuffent difpofés de manière
à ne pas laiffer écouler facilement les
eaux.
La partie la plus baffe d’une pièce de terre,
en offroit aux yeux une plus grande quantité, que
la partie la plus haute. _
Il en paroiffoit bien plus fur le bord des chemins,
& autour des pièces de terres, qu’au milieu
ol dans les endroits où le fol étoit mèuble.
Enfin, à humidité égale, les champs: le plus
infeûés d’Ergots, étoient ceux qu’on^avoit nouvellement
défriché. Cependant, une perfonne à
prétendu, que de trois pièces, qu’elle avoir en-
femencées en feigie, l’une d’elles, qui étoit un
nouveau défrichement, avoir le moins d’Ergot.
Quantité d Ergots, qu’on trouve dans les feigles.
Il n’eû pas facile d’eûimer la quantité d’Ergot
que contiennent les feigles dè là Sologne, parce
quelle varie félon les lieux & les années, ffaibris,
Seille-Saint-Denys, Nanceÿ', Teilley, Soùefme,
Marfilïy, Tremblevif, &c. villages fi.rués au centre
de la Sologne', y font extrêmement fujets. Pour
ne dire que ce que j’ai obfervé.moi-même, en
17 77, année humide, il y en eut bien plus qu’en
1780, année fèche. Au mois . de Juillet, de la
première de ces deux années, des feigles de Mars,
qui étoient encore fur pied, éroient tous noirs
d’Érgotsv-Une feule, gerbe de feigie d’hiver , qui
pouvoit rendre environ quatorze livres de
feigie, m’a produit à la grange huit onces ’d’Ergor.
Douzé autres gerbes , prifes au hafard, & capables
de rendre douze boiffeapx de feigie, chacun du
poids de quatorze livres, ont fourni la quatrième
partie d’un boiffeau d’Ergot. Il faut obferve , qua
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