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ce Fort-* k côte s’enfonce & forme une elpé.ce de Golfe,, qui eflr commode
poufia caréné des Vailféaux de'tôütegrandeur;,"car outre qqils y font
à l’arbri des vents il y a. beaucoup de fond; c’eftpour cela auffi que les
Vaiflèaux du Pays y viennent hiverner', mais en Eté ils mouillait tous
dans le Fort à un quart de lieue de la- Ville, & même plus proche pour
les Bâtimens moins cqqfiderables qui peuvent ancrer à une demi cablure
de terre," a l’aHri detousles vents excepté de ceux d’Êft, qui peuvent entrer
par labcmçhe,duPorti & agiter un peu la Met, mais fans aucun danr-
ger pour les Vaiflèaux •.qui font à l’ancre» :
Entre la pointe de la Batterie Royale & celle du Phare, mais plus près
de la première ,il y a unbrifant qui fort fuffifamment hors de l’e a u ,p a r .
tput ailleurs le Portveft net & fans.écueil,, deforte qu’on- y peut commodément
louvoyer, quand le. vent n’eit pas favorable ^foix pour entrer, foie,
pour fortir^ En Hiver ce Port elt impraticable, à-caufe des glaces, l’eau y.
gelant fi profondément qu’on peut le parcourir à pied dans toute là capacités
Çette gelée commence dès k.fin d e N ovembre & dure jufqu’en May.oa J u in *
quelquefois plutôt, quelquefois plus tard, félon que. l’Hiver elt plus ou
moins rude. En 1745. la gelée commença dès le commencement d’Ôfifo*
bre, & vers le milieu. de ce mois lorfque je partis de ce Port la.glace étoit
déjà forte, mais n’oceupoit encore-que lés bords du. dedans da Port.
Là Ville de Louïsbourg, qui étoit alors la feule-de l’î le , é|ôit peuplée-
de familles Françoijesÿ les unes Européennes, & les autres Créoles du lieu
même, ou de Plaifance en file de Terre-Neuve, d’où.eUés étoient paflees>
à Louïsbourg lorlqye. par les Traités la France céda t|ie de Terre-Netttie-
aux Jtyiglois* Le. feul Commerce de Louïsbourg étoit la pèche de la Morue»
commerce avantageux non feulement à-caufe de-l’abondance de -ce poifloh
dans ce parage, mais aulïi parce que celui du. Cap*. Breton eû te meilleur
& le plus délicat de Terre-Neuve. Les. richefles de cette Ville, où il y
avoit des Particuliers fort à leur ajfe , confiftoient en Magasins de Morue*
& dans le plus ou moins de Barques que chacun pou voit entretenir pour
la pêche. Il y aypit tel habitant, qui en entretenoit quarante ou cinquante,
chacune montée de trois ou quatre hommes payés à tant .par jour,
moyennant quoi ils étoient obligés de fournir chaque jour, une certaine
quantité de Morue.. Dès que tes Magazins étoient remplis*, & que la belle
Saifon revenoit on, voyait arriver k. Louïsbourg des Vaiflèaux dé tous les
dPorts de France,, chargés de toute forte de denrées & de marchandé*
fes, qu’ils trpqupient contre de la Morue, qui étoit leur caragaifompouj
Je; retour. De-même les Vaiflèaux .des Colonies Francoijes de Si. Domhu.
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gue, de la 'Martinique, y apportaient du Sucre, du Tabac, du Café, du Tafia
& du *MielV & s’en retournoient chargés de Morue. Tout ce que Louïsbourg
avoit de trop de ces raarchandifes pafloit en Canada,-où ceux qui
faifqient (tecommereerecevoientdes Càflorsj & autres Fourrures ên échange.
Dé, cette mankve Louïsbojfg fans autre'marçhàndife jaî denrée què la
j^lorue, fàifoit un commercé continuel -àvec l’Europe & avec ïJmériqufi
Cependant Louïsbourg n’éteij pas l’unique Port où les Vaiflèaux François
chargeôient ;4e la Mor-ue,*. car ils vont encore ën plus grand nombre la
pêcher eux-mêmes à la mime Ife de Terre-Neuve ,à la Côte du Petit Nord
& fur le. Banè» esmme nop te dirons ailleurs.
'. Outre les habitans de Louïsbourg il y en avoit'encore d’autres répandus
dans lès Iles des environs, & en particulier dans celle deSfc Jeûn, lefquels
y avoientteùrs cafés,, magazins, & tout ce qui appartenait à la pêche 5-
6 comme ce Commerce étoit. le plus lûr moyen dé s’enrichir-, il étoit rare
que qu^lqq’un.d’eux. s’occupât à la culture des terres. A quoi il faut
ajpûter qu/en Jliver la terre étant couverte de neigé à la hauteur de trois-
à quatre pieds,qui ne fondqu'enEté, n’eftguere propre à la culturè, bien
moins encorè.anQûrrir.du Bétail; qar pour feire fubfifter le peu qu’ils en
avoient,_ il faloit le renfermer dès l’çntrée de KHiver,& le nourrir de foin
jufqa’au retour de la belle faifon.,où k terre débaraflee des ffe%és & des
glaces pro,dpi£©it des pacages en abondance,", que lesBéltiaux pouvoient*
brouter... La promtitude avec laquelle les fruits de k terre mÛrifloient en
Eté, cqnfolok les habitans de k longueur & de la rigueur des Hivers.
7 II y a auiïï dans cette lie & dans celles des environs des habitans
naturels, Indiens qui ne différent- point quant à 1a mine ni à la couleur
des Indiens du Pérou , & qui leur reflemblent. beaucoup pour les
moeurs ; mais ils font confiderablement plus grands & mieux faits. Ces
Indiens à qui les François donnent le nom de Sauvage, Jl’étoient ni touf-à*
fait fnjçts du Roi de France ni entièrement indépendans de ce Monarque,
& le reconnoifloient pour. Seigneur fuzérain de ces Contrées , fans néanmoins
admettre. fes Ordonnances comme des Loix pour leur gouverne--
jnent, ni rien changer à leur maniéré dé vivre. Ils ne kü payaient?
non plus aucun tribut; Sien.loin de-là ee Monarque leur-envoyoit tous
tes ans une certaine quantité d’habits de poudre,, defufils pour leurs-
Chafles, de l’eau-de-vie, &' des outils pour, fe les attacher toujours davantage.
Celt ainfi que cette Couronne en ufe aufli envers les Sauvages
du Canada. Elle leur erivoypit des Millionnaires .pour les inftrui-
re dans la* Religion Catholique, batifer leurs Enfans, & leur enfeigner
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