l’occasion s’en présenterait. Déjà, à la Conception , j’avais été à
même de faire respecter l’autorité méconnue de quelques capitaines.
En outre, les pénibles reconnaissances, les nombreux
plans des ports qui seront exécutés dans cette campagne, les précieux
renseignements que nous fournirons, oiFriront de nouvelles
ressources aux navires de notre nation, que différents genres de
spéculation appellent déjà à parcourir l’Océanie, à l’exemple des
Anglais et des Américains. Ainsi, les personnes qui ne veulent
absolument considérer que le côté positif des dépenses de la marine
seront obligées de reconnaître que celles de notre mission ,
d’ailleurs si modiques, ont encore un but réel et immédiat d ’utilité
publique.
Nous eûmes de la peine encore à sortir des écueils de Piva;
ensuite nous traversâmes en entier l’arcbipel V i t i , après avoir
mouillé à Lehoiika, sur l’ile Ohalaou et à Boua, sur la grande île
Vanoua-Lehou. Un temps superbe nous servit à soubait pour ces
périlleuses explorations.
Après avoir pris connaissance de l’île Aurore, dans les Nou-
vclles-Héhrides, je fis la géographie du Pic de l’Étoile et du groupe
de Banks, dont l’existence seule était connue. L’île de Vanikoro
fut visitée , et les îles de Nitendi et Mindana reconnues. Enfin, le
travail important des iles Salomon fut commencé le i8 novembre,
et, depuis les îles Anna et Catalina, au S ., jusqu’à la pointe N.
de Bouka, plus de deux cents lieues de côtes à peu près inconnues
furent relevées dans le plus grand d é ta il, la route des corvettes
passant rarement à plus de trois milles et souvent à un
mille de la côte. Une relâche de six jours eut lieu sur l’île Saint-
Georges, près de la grande île Isabelle, et signalera une station
utile et commode pour les navires en ces parages, Nos relations
avec les naturels furent toutes pacifiques; pendant cette relâche ,
les vents d’E. firent place à la mousson d’O., qui ne cessa ensuite
de souffler d’une manière invariable.
L exploration des îles Salomon étant terminée, nous reconnûmes
encore les îles Hardy, Saint-Jean, Caen, et le groupe Ab-
garris ; puis je fis route au N. pour chercher les vents alisés du
N. E. Nous reconnûmes les groupes de Noiigouor et de liOuasap,
dans les Carolines, encore inexplorés. Nous passâmes six jours
au mouillage, au centre du grand groupe de Rouk (Hogoleu de
M. Duperrey), où nul navire n’avait mouillé avant nous. Nos
relations avec les naturels, d’abord amicales, furent troublées,
vers la fin , par 1 attaque imprévue d’une vingtaine de pirogues
sur le grand canot de XAstrolabe, envoyé en reconnaissance. Il
fallut déployer, aux yeux de ces perfides sauvages, la supériorité
de nos armes, et quelques-uns payèrent cber leur imprudence.
Enfin, le i®>-janvier iS J g , les deux corvettes laissèrent tomber
l’ancre sur la jolie petite rade éiUmata, où j'ai pu procurer aux
deux équipages les rafraîchissements dont ils étaient privés depuis
longtemps. Toutefois, après une navigation aussi longu e ,
aussi active sur chaque corvette, nous ne comptions que deux
malades, et tous les autres jouissaient de la santé la plus florissante.
Nous quittâmes cette place le lo au matin , nous dirigeant au
S. 0 . Je reconnus toute la partie de Gouap que n ’avait pu voir
\Astrolabe on 1828 ; dans la journée du 16 janvier, nous prolongeâmes
les îles Pelcxo de fort près. Les naturels de PUilio vinrent
nous visiter dans leurs pirogues; deux Malais, se dis-ant natifs
de Banda, naufragés sur cette île , se plaignirent amèrement de
la manière dont les naturels les traitaient, et me supplièrent de
les recevoir à bord de XAstrolabe : j’y consentis, et je viens de les
déposer à Amboine. Dans les journées du 20 janvier et les suivantes
, nous explorâmes le canal de Serangani, et les côtes méridionales
de Mindanao , dans une étendue de quarante lieues
environ. J’envoyai même M. Dumoulin sur la côte, observer des
inclinaisons et des intensités magnétiques qui seront de quelque
intérêt pour les physiciens , attendu que l 'équateur magnétique
passe par ces lieux. Les naturalistes, de leur côté, recueillirent
quelques échantillons des productions de cette grande île.
Ensuite je me repliai vers le sud. Nous fîmes la géographie de
cette chaîne d îles qui paraît lier, par une base sous-marine, le
système dos Philippines à la grande île de Célèb-s. Près de la
pointe E. de Sangnir, une fâcheuse série de contrariétés , provenant
surtout de courants accompagnés d ’un calme su b it, mit les
deux corvettes dans le plus grand péril. Durant près d’une
demi-bcure, acculées à quelques toises de rochers, sur lesquels
la mer brisait avec fureur, elles se virent menacées d’une
perte complète. Une heureuse b r ise , aussi subite que Je
X. 1.,