Aulour du second cliar, où reposait le corps de
madame d’Urville, s'ctaient silencieusement rangés
quelques parents éloignés , derniers débris d’une famille
éteinte.
Enfin , les compagnons de voyage de l’illustre navigateur
s’étaient réunis derrière le troisième cbar, où
l’on remarquait une foule immense et pressée de savants,
d’hommes politiques, d’artistes, de négociants,
des dignitaires de tout rang et de toute classe, qui
auraient pu faire croire à un étranger arrivé ce jour-
là dans la capitale, que c’était assurément le cortège
d’un prince allant retrouver ses nobles aïeux au tombeau
de ses pères.
De nos jours, où la politique et l’intérêt ont jeté
tant de divisions parmi nous, c’était assurément un
spectacle touchant, que de voir tous les partis oublier
un instant leur colère devant la terrible catastrophe
qui avait frappé tant de familles, que de voir
toutes les sympathies se réunir autour d’un même
tombeau.
C’est que l’homme, que tant d’honneurs entouraient
après sa mort, avait su, dans une vie trop courte, mériter
la reconnaissance des savants par les progrès immenses
qu’il avait fait faire aux sciences, par les collections
précieuses dontil avait enrichi nos musées; il
avait acquis l’estime et l’affection de tous, par les services
qu’il avait rendus au pays; il avait gagné la considération
générale, parce que l’opinion publique
accueille toujours avec faveur ceux dont les noms se
trouvent mêlés aux grandes choses. Entraîné par une
noble ambition d’acquérir de nouvelles connaissances
et de les faire partager , par trois fois Dumont-d’Ur-
ville avait fait le tour du monde; son vaisseau avait
parcouru toutes les zones des mers les plus tempétueuses
depuis les pôles jusqu’à l’équateur, et toujours
il l’avait ramené au port; puis le 8 mai, ils
étaient partis trois, l’amiral, sa femme et son fils,
confiants et joyeux; quelques heures après ce n’étaient
plus que trois cadavres. Dumont-d’Urville était mort
sous les roues brûlantes d’une voiture à vapeur, lui
qui aurait dû mourir sur le pont d’un vaisseau, au
milieu de l’ivresse du combat, en un jour de bataille,
car il était aussi brave que savant; ou bien encore dans
des contrées lointaines, victime de son dévouement
et de son ardeur pour la science, sous le soleil brûlant
de l’équateur ou dans les glaces du pôle Sud;
lui qui aurait dû avoir un étendard pour linceul, et
l’Océan pour tombeau, il était mort sur un grand
chemin......
Deux ans auparavant, la France entière s’était émue
au nom du commandant des corvettes Y Astrolabe et
la Zélée f des rapports d’un haut intérêt adressés au
ministre, des antipodes de Paris, venaient d’annoncer
les découvertes importantes faites par Dumont-d’Urville
pendant son troisième voyage de circumnavigation,
et probablement le dernier; car, à son retour
en France, il avait fait ses adieux à la mer ; dorénavant,
exclusivement occupé de l’éducation de son
fils unique qui réunissait toutes ses affections, il avait
pris la ferme résolution de passer au milieu de sa fa