service militaire du port, auquel il était astreint par
son grade dans la marine. Il arriva à Paris, et bientôt
son plan de campagne fut soumis à l’approbation
royale; déjà il embrassait un cadre immense dans son
ensemble; le Roi ajouta, en outre, à l’itinéraire qui lui
était présenté l’exploration des mers glaciales du sud.
D’Urville ne demandait qu’un seul navire pour aller
visiter de nouveau ses cbèi’es tribus océaniennes, on
lui en donna deux; c’était là une juste récompense
due à son mérite; car la présence de deux bâtiments
sous ses ordres entraînait pour leur commandant
tous les avantages attacbés a la baute position de cbef
de division.
A cette époque, Dumont-d’Urville, tourmenté par
des douleurs de goutte, avait déjà l’aspect d’un vieillard,
malgré son âge peu avancé ; son corps était usé,
mais sa volonté était toujours inébranlable. Il avait
conservé cette énergie et cette activité si nécessaires à
un cbef d’expédition; les noms de d’Urville et de Y A strolabe,
comme il le disait lui-même, devaient, en s’associant
de nouveau, produire de nombreux et utiles
résultats. Aussi, vainement de tous côtés, autour de
lui, et même à la tribune parlementaire, des prédictions
sinistres se firent entendre. Rien ne pouvait arrêter les
navires dont l’armement se poursuivait avec activité.
Il s’était assuré le concours de son digne et fidèle compagnon,
le capitaine Jacquinot; de ses anciens officiers,
il n’en était pas un seul qui alors en France pût de
nouveau s’associer à sa nouvelle entreprise; mais partout
où il y a de la gloire à acquérir et des dangers
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à braver, iln’a jamais manqué d’officiers de bonne volonté
dans la marine française ; bientôt de tous côtés
parvinrent des demandes, et les étals—majors furent
désignés avant, pour ainsi dire, de connaître les noms
des navires qu’ils devaient monter. Cependant ce ne
fut pas sans une profonde émotion que le marin
intrépide se sépara des siens; malade et epuise,
il était père, et toute sa famille, tous ses amis s’étaient
réunis pour l’arrêter dans sa résolution, pour l’engager
à renoncer à une entreprise si hasardeuse, dans
son état de santé.
Pour tous ceux qui, comme nous, purent voir les
larmes inonder son visage contristé par la douleur,
lorsqu’arrivé à Valparaiso, des lettres lui apprirent la
perte de son plus jeune fils et le désespoir de la mère,
il sera facile de comprendre combien furent tristes ces
pénibles adieux, combien il devait lui coûter d’abandonner
de nouveau sa famille éplorée, pour se confier
aux vents et aux flots de l’Océan ; combien enfin était
grande cette énergie qui lui faisait sacrifier à l’amour
de la science, non-seulement son l’epos et sa
tranquillité, mais encore toutes les joies du coeur,
toutes les jouissances si douces du foyer conjugal.
Le 7 septembre 1887, Y Astrolabe et la Zelée quittèrent
le port de Toulon, qu’elles ne devaient plus i^evoir
qu’en novembre i84o.
Un mois après le retour, Jules-Sébastien-César Dumont
d’Urville, retenu encore à Toulon par les maux affreux
qu’il avait endurés pendant cette dernière et pénible
campagne, recevait comme une digne récompense
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