mers chagrins, de grands découragements, et ce fut
encore une fois le travail et l’étude qui devinrent sa
consolation dans ces moments difficiles.
« En manquant une aussi belle occasion de réaliser
(( les voeux de ma jeunesse, dit-il, je crus que la for-
<( tune m’imposait pour toujours la loi d’y renoncer.
(I Je me soumis à ses décrets ; j ’abjurai toute idée
(( d’ambition et d’avancement, et je me promis même
<( de ne faire aucune démarche pour dépasser mon tour
« d’embarquement.
« La botanique devint mon refuge; en compagnie
« de plusieurs amis, je passai tout l’été de 1817 à par-
« courir les environs de Toulon pour étudier sa flore,
(( et j’eus bientôt formé un herbier considérable. Ce
« fut un temps heureux pour moi ; devenu étranger à
« toute autre pensée, je ne songeais alors qu’à enregis-
« trer dans mon imagination tous les végétaux qui ta-
« pissaient les monts et les vallées méditerranéennes.
« Il ne me manquait que d’avoir un peu plus d’ai-
« sauce; combien de fois, en effet, j ’ai hésité, re-
«culé, et souvent même ajourné indéfiniment une
« faible dépense nécessaire pour l’achat d’un livre ou
« d’objets utiles à mes études.
« V Uranie, en mettant à la voile, emporta un de
« nos compagnons de travail ; bientôt ensuite un se-
« cond fut obligé de nous quitter, et notre troupe bota-
« nophüe se trouva réduite à deux promeneurs. Toute-
« fois, après avoir consacré l’hiver à étudier nos ré-
« coites, au printemps|de 1818, nous recommençâmes
« de plus belle nos excursions. Nous eûmes même
« quelquefois pour compagnon le contre-amiral Ila-
« melin, qui s’était épris d’une belle passion pour cette
« science.
« Enfin, mon fidèle compagnon d’études reçut une
« autre destination, et je restai seul, ce qui amortit
« considérablement mon zèle. » Ce goût pour la botanique
qui ne lui fit jamais défaut, et qui, plus tard,
devait conduire le contre-amiral Diimont-d’Urville
à des travaux importants, suffisants pour immortaliser
son nom, avait pu, pendant quelque temps, cicatriser
ia plaie faite à son coeur par le départ de VUranie, sur
laquelle il n’avait pu obtenir d’être embarqué ; mais
malgré sa résolution, malgré l’affection qu’il portait à
sa famille, et le bonheur dont il y était entouré, ces
promenades instructives ne pouvaient pas longtemps
suffire à son âme toujours avide de grandes choses,
toujours tourmentée par des projets de voyages lointains.
La direction donnée à son esprit ne pouvait
rester longtemps sans amener de résultats, et le moment
étaitarrivéoù cette intelligence devait prendre son essor.
Le ministre de la marine avait confié au capitaine
Gauthier, commandant la Chevrette, la mission d’opérer
le relèvement des côtes et des îles de la Méditérranée.
Trois explorations avaient déjà produit de beaux résultats,
lorsqu’au moment de commencer sa quatrième excursion,
il demanda un officier qui pût l’aider dans ses
travaux hydrographiques. Grâce à la protection de
M. Hamelin, alors major-général de la marine de
Toulon, et avec lequel il était entré en relation, à
cause de leur conformité de goût pour les sciences