en concevoir. Le lecteur verra tlonc avec quelque
intérêt, peut-être, quels furent les premiers pas dans
la carrière de ce marin intrépide, avec qui il vient de
traverser toutes les mers, depuis le Pôle sud jusqu’à
l’équateur. Tout en obéissant à nos sentiments d’affection
et de reconnaissance, nous avons compté, pour
publier quelques détails sur la famille et les premières
années de l’amiral Dumont-d’Urville , sur l’intérêt qui
s’attache toujours à tout homme illustre, à toute intelligence
vaste et puissante, enfin à tout coeur noble et
généreux.
Mais avant tout, qu’il nous soit permis d’inscrire,
une fois de plus, un nom cher à tous les officiers de
Y Astrolabe et de la Zélée, celui d’un jeune officier
qui, plein de vie et de courage, au moment où les
corvettes quittèrent le port, devait mourir loin de sa
famille, loin de ses amis, loin de la France, victime
de la science, sous le poids des fatigues qu’il avait
endurées.
Lorsque les journaux de la capitale annoncèrent, en
iSSy, l’expédition des corvettes Y Astrolabe (SÙa. Zélée,
destinées à exécuter un voyage de circumnavigation ,
et à pénétrer dans les glaces polaires du Sud ; malgré
les dangers sans nombre que devait entraîner cette
hardie entreprise, dangers qui furent alors proclamés
bien haut, même à la tribune parlementaire, nous devons
le dire à la gloire de notre marine, une foule
d’officiers sollicitèrent vivement la faveur d’embarquer
avec Dumont-d’Urville. Un jeune élève, sorti
depuis peu d’années du vaisseau école, pour faire son
premier pas dans ia carrière maritime, se fit inscrire un
des premiers parmi ceux qui, stimulés par une noble
ambition, demandaient à prendre part à cette belle
entreprise. C’était Gaillard (Jean-Edmond); son dévouement
fut compris, sa demande exaucée, et il fut
embarqué à bord de la corvette la Zélée, comme
élève de première classe, pour aller ensuite mourir,
enseigne de vaisseau, sur l’île lointaine de Bourbon
, quelques mois après que cette corvette avait
quitté celte terre française, pour opérer sans lui
son heureux retour dans le port d’où elle était
partie.
Dans la carrière des armes, plus que dans toutes
les autres, peut-être, l’homme destiné à exposer sa
vie sur un champ de bataille , s’habitue à risquer
son existence dans toutes les circonstances qui
peuvent décider de son avancement; mais certes, aucune
idée ambitieuse n’avait dû pousser notre jeune
compagnon de i;oute dans sa détermination. Elève
de première classe, il ne pouvait espérer le brevet
d’officier qu’à son tour d’ancienneté; il avait la certitude
que cette époque serait arrivée bien avant que
les corvettes ayant achevé leur long pèlerinage, il
serait possible à ses chefs de faire connaître ses titres
à la faveur royale. Mais Gaillard savait qu’à bord des
navires commandés par Dumont - d’Urville , qui
deux fois déjà avait fait le tour du globe tei’restre, il
y aurait des dangers à braver, des privations et des
fatigues à endurer; et aussi de la gloire pour tous, et
il n’avait pas hésité. Il était parti à l’âge de vingt ans.