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embrassant quelque tête cbérie, repartaient bien vite;
car leur maître n’attendait pas; ils repartaient pour aller
cueillir de nouveaux grades et de nouveaux honneurs,
ou bien encore, pour mourir sur un champ de bataille!..
Seul peul-être parmi tous ses condisciples, Jules
d’Urville n’avait à l’armée ni frères, ni parents, ni
amis. iMais lorsqu’arrivaient les jours de fête dont
nous parlions tout à l’heure, pour qui l’eût bien examiné,
avec son front pâle et des éclairs dans les yeux,
celte pâleur et ce feu du regard eussent montré à
découvert toutes les chaudes pensées de l’enfant taciturne
et sombre. Lui aussi, il voulait de la gloire et des
honneurs. Alors, en attendant qu’il devînt un héros,
l’écolier se remettait au travail avec plus d’ardeur, et
laissait derrière lui tous ses rivaux.
Néanmoins, ce ne fut que quelque temps après que
se révéla son goût pour la marine et les voyages.
Son assiduité et son intelligence l’avaient fait remarquer
de ses professeurs. Pour le distraire dans ses récréations,
011 l’abonna à un cabinet de lecture. Alors
il lut, ou plutôt il dévora les voyages d’Anson, de
Bougainville, de Cook; sa vocation venait de lui etre
révélée. Quelques mois avant sa mort, et lorsque,
dans les premiers jours de l’année i8 4 i, le roi venait
de signer son brevet de contre-amiral, il se rappelait
avec bonheur le pari assez curieux qu’il fit, à l’époque
où il était encore sur les bancs, avec l’un de ses condisciples,
nommé Fagon, qui mourut, tout jeune
encore, capitaine d’artillerie. Fagon rêvait d’être sénateur,
ou lieutenant-général, à cinquante ans; Jules
d’Urville fit une gageure de cinquante louis, qu’à cet
âee il serait O contre-amiral.
Les récits des navigateurs célèbres qu’il avait lus
frappèrent vivement son imagination; et, en lui faisant
entrevoir un genre de gloire auquel il n’avait
jamais songé , ils avaient irrévocablement fixé sa destinée.
Doué d’une volonté énergique et d’une persistance
extrême, il ne lui avait jusqu’alors manque
qu’un but pour concentrer tous les efforts de son intelligence.
Des succès brillants avaient marqué le passage de
Dumont-d’Urville sur les bancs du lycée de Caen.
Avec son caractère, son intelligence et sa persévérance,
il n’avait jamais cessé d’occuper le premier rang
parmi les élèves de sa classe. Mais tous ces triomphes
ne purent vaincre la répugnance extrême de sa mère
pour le régime des écoles impériales ; elle préféra renoncer
au bénéfice d’une bourse que son fils avait
obtenue au concours, plutôt que de le voir soumis à
cette discipline intérieure, qui faisait disparaître parmi
les jeunes écoliers toutes les distinctions de la noblesse
du sang. Plein de respect et d’affection pour elle, son
fils se soumit; mais, en même temps qu’il consentait
à ne plus aller au lycée que comme externe, il annonçjait
à sa mère sa résolution inébranlable de renoncer
à la prêtrise, et son désir d’arriver à 1 école
Polytechnique. En conséquence, en septembre 1807
il subit l’examen ; mais, quoique reconnu admissible
par ses examinateurs, il fut refusé. Son rang sur la
liste ne lui permit pas de compter parmi les heureux.
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