ment un mauvais sujet s’avisa de dépouillei’ un jour un élève qui
l’avait pris pour guide. Le déploiement de notre force armée sur
la grève amena sur-le-champ la restitution de tous les objets volé
s , e t, en outre, la tribu du coupable nous livra douze petits
cochons par forme d’amende.
Là, nous eûmes du moins la consolation d’apprendre, d’une
manière à peu près certaine, que le désastre de l’expédition de
Lapérouse à Maouna avait été occasionné paiÇune circonstance
purement fortuite. Les corps des Français qui succombèrent furent
inhumés , et non dévorés comme on l’avait longtemps imag
in é , attendu que les naturels de Hamoa n’ont jamais été cannibales.
Enfin deux ou trois Français qui revinrent ds leurs blessures
furent bien traités par les sauvages et vécurent plus ou
moins longtemps dans ces îles.
De là nous passâmes à Vavao, aujourd’hui complètement rangée
sous les lois des missionnaires méthodistes; p u is, aux îles
Hapaï, que nous traversâmes presque en entier, explorant des
canaux et des écueils qui n’avaient jamais été reconnus.
Désormais des travaux d’une plus grande importance et entourés
de plus grands dangers nous attendaient. J’engageai les
deux corvettes dans le fameux archipel des îles Vin : à Laguern-
¿ a , je pris pour interprète un chef de Tonga-Taboii, nommé
Latskika, appartenant à la première famille de Tonga et jouissant
d’une haute influence dans les îles Viti.
Je questionnai Latskika sur la malheureuse affaire de Bureau;
il avait intimement connu ce capitaine , et il me donna les renseignements
les plus positifs sur sa fin tragique. Son assassin était
Nakalassé, chef puissant et redouté de I île Piva, dépendant du
grand cbef de Pao sur Viti-Lebou; il avait été comblé de faveurs
et de présents par Bureau, et la cupidité seule l’avait poussé à
commettj-e cet acte avec une atroce perfidie.
Je sentais parfaitement qu'il était de l’bonneur de notre pavillon
de châtier un pareil forfait ; mais la certitude que Pira
était environné de récifs périlleux rendait l’entreprise fort épineuse
pour nos navires. Je balançais donc à exposer le salut de
la mission pour cet objet, quand Latskika ajouta que ISakalassé,
devenu l’effroi de tous les chefs voisins, et fier des fusils , de la
poudre et des canons qu’ils avaient trouvés sur le brick la Josc-
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phine, répétait avec arrogance qu’il désirait ardemment l’arrivée
d’un navire de guerre français , afin de se mesurer avec lui ; son
insolence n’aurait plus connu de bornes , et cette impunité aurait
porté les autres chefs à des actes de la même nature.
Je conduisis donc les corvettes au travers des écueils de Pioa ,
e t, le i6 octobre, vers m id i, après avoir plus d’une fois frotté
leurs flancs contre les coraux, elles furent mouillées à deux
milles environ du fort àeNakalassé.
Sur -le-champ, j’expédiai un officier avec Latskika vers 1’« -
bouni-valou ( titre qui correspond à celui de chef suprême ou empereur),
pour lui demander que le traître Nakalassémtihx livré,
ou , à défaut, pour le prévenir que, dès le jour su iv an t, Pioa serait
livré aux flammes. Ce grand personnage, nomme Tanna,
vieillard à longue barbe, âgé d’environ soixante-dix ans, reçut
mes envoyés avec la plus haute distinction , protesta de son attachement
pour les Français et de son horreur pour le crime de
Nakalassé. Mais il redoutait son puissant vassal, qui l’avait déjà
une fois expulsé du trône et forcé de chercher un asile dans les îles
voisines. Au sein même de sa capitale, à Pao , un parti considérable
favorisait en secret Nakalassé. Aussi Tanoa dut avouer qu’il
lu i était impossible de nous livrer le coupable, ni même de nous
assister ouvertement contre lui ; mais qu’il nous verrait très-
volontiers diriger nos forces contre ce chef; loin de lui portei
seeours, s’il cherchait un refuge sur son territoire, il le f e r a it et
le mangerait sur-le-champ, et cela, quoique ait épousé
la propre nièce de Tanoa.
Nakalassé, de son côté , ayant appris mes intentions, déclara
qu’il était déterminé â nous attendre dans son fort de P io a , et
qu’il se ferait enterrer sous ses ruines plutôt que de 1 évacuer.
Dès le jour suivant, à cinq heures du matin , les embarcations
des deux corvettes jetaient sur les récifs de Piva cinquante marins
armés, sous les ordres d eM . le lieutenant de vaisseau Dubouzet,
auxquels s’étaient joints presque lous les officiers des
deux navires, comme simples volontaires. La position du fort
était à peu près imprenable, et nos officiers avouèrent qu une
douzaine d’hommes, bien résolus, leur auraient pu faire un grand
mal, sans courir eux-mêmes aucun danger. Mais il paraît qu au
moment même où il vit les Français aborder sur son île , l’orÀ
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