dû de les entendre du séjour de l’éternité; elles te sont
adressées par un ami et au nom d’une société fière du
brillant reflet que tu fis rejaillir sur elle.
« Adieu, Dumont-d’Urville, adieu! ! ! »
M. Domeny de Rienzl, membre de plusieurs académies
françaises et étrangères, et qui faisait le tour
du monde pendant que M. Dumont-d’Urville achevait
sa seconde expédition, a prononcé le discours suivant
:
« M e s s i e u r s ,
« Huit jours sont à peine écoulés qu’une horrible
catastrophe a consterné Paris. Quand j’aurais une voix
éclatante comme l’airain, je ne pourrais raconter tant
de maux; mais, parmi tant de deplorables victimes,
la mort, sous la forme la plus affreuse, est venue frapper
l’illustre amiral d’Urville, dont le cercueil est à
vos pieds. Celui qui avait tant de fois bravé la fureur
des flots, et naguère les montagnes de glaces, a péri
lentement au milieu des flammes a cinquante-un ans,
et dans une partie de plaisir.
«La mort nous l’a rendu carbonisé, comme les
restes des exécrables festins de ces anthropophages
que nous vîmes dans les îles de l’Océanie. Sa femme et
son fils unique ont partagé son sort.
« J’ai raconté dans XEncyclopédie des gens du
monde les diverses expéditions de mon ancien ami.
« Tous ces travaux réunis nous permettent de comparer
M. Dumont-d’Urville à l’beureux et intrépide
Cook, le plus grand navigateur connu ; mais ceux de
M. d’Urville se distinguent par une plus grande exactitude;
car on trouve, dans les détails des découvertes
du capitaine Cook, moins de savoir et des
erreurs singulières qui frappent les yeux un peu
exercés.
« N’oublions pas que M. d’Urville, plus heureux
que l’amiral d’Entrecasteaux, a reconnu l’île de Va-
nikoro, où, sur le récif qui cerne en partie le havre
de Mangadei, il a fait élever au savant et infortuné
Lapérouse un modeste cénotaphe, témoignage des
regrets de la France.
« Au retour de sa troisième campagne autour du
monde, et vers les régions antarctiques , où des noms
français ont été inscrits de sa a main,f le commandant
d’Urville reçut le grade de contre-amiral. Certes,
quand la gloire se donne si facilement aux guerriers
qui achètent souvent de faibles conquêtes aux prix du
sang national, combien doit-elle être, à plus juste
titre, la récompense de tant de terres explorées ou
reconnues, de tant de découvertes pi’écieuses, de tant
de trésors d’histoire naturelle et d’anatomie amassés
pour la science, dont M. d’Urville a enrichi sa patrie
et le monde.
« Son fils, sa superbe espérance, semblait, si jeune
encore, continuer l’illustration de son nom. Botaniste
et philologue comme son père , il avait déjà, dès l’âge
de neuf ans, traduit du chinois en français le Tahio
du sage de la Chine, Koung-tszeu (Confucius), et le
Schang-Moung à.e Meung-tszeu (Mencius).