ceux de ces camarades qui Favaient precede dans la
tombe, il n’avait pas eu la consolation de voir, autour
de son lit de douleurs, ses compagnons de route l’assister
dans sa cruelle et longue agonie Alors le dernier
voeu de Finiortuné enseigne avait été exaucé; car cba-
cuii des officiers des corvettes Y Astrolabe et la Zélée
ressentait pour lui l’affection d’un frère, et l’annonce de
de sa mort avait retenti dans leur coeur, comme la
perte d’uu membre d’une famille unie et affectionnée.
L ’année 1790 rappelle une des époques les plus
agitées de notre révolution. De Paris, foyer révolutionnaire,
chaque jour arrivait à nos provinces le
récit des terribles événements qui minaient avec fracas
les degrés du yrône, et qui, à quelques mois de
là , devaient porter la tête d’un roi sur Féchafaud.
Tous les yeux étaient alors fixés sur les travaux de
l’Assemblée Nationale, où trois partis étaient en présence,
combattant encore à outrance, bien que déjà
l’issue de la lutte ne fût presque plus douteuseque pour
ceux qui avaient tout à y perdre et rien à y gagner.
Déjà les nobles et les prêtres avaient vu tomber
leurs privilèges devant la réaction populaire, et désormais
tous leurs efforts devaient rester impuissants
pour arrêter les débordements du peuple surexcité
par la lutte et enivré par la victoire qu’il avait remportée.
Aussi, nous n’essaierons pas de décrire l’anxiété
qui régnait, au mois de mai 1790, dans la famille
noble de Gabriel Dumont-d’Urville, bailli de haute-
justice, à Condé-sur-Noireau.
Ce fut au milieu des troubles de cette année à jamais
célèbre, et le vingt-troisième jour de ce même mois
de mai, que naquit Jules-Sébastien-César Dumont-
d’Urville.
Cet enfant, qui, cinquante ans plus tard, devait
mourir officier de la légion-d’honneur et contre-
amiral de France, reçut la plus étrange éducation
qui se puisse voir. Son père descendait d’une bonne
famille attachée à la magistrature, et il exerçait lui-
même la charge de bailli, achetée par un de ses aïeux.
Il avait épousé mademoiselle de Croisilles, issue de
l’une des familles les plus nobles et les plus pauvres de
Normandie. Les persécutions qui, à cette époque,
atteignaient tousles gens titrés, ne devaient point
épargner la maison d’Urville ; et les malheurs de la
proscription, joints aux infirmités de la vieillesse,
privèrent le jeune d’Urville de son père, dans un âge
encore si peu avancé, que c’est à peine, comme il Fa
dit lui-même, s’il en avait conservé le souvenir.
Mais il restait encore à l’enfant sans père, un guide
pour ses jeunes années, un refuge pour les douleurs
des premiers jours de la vie, un conseil pour les
heures de découragement et de folles idées; il lui
restait la cbose la plus sainte et la plus adorable en