La s tru c tu re des coquilles a été, il y a déjà longtemps, l’objet des investigations des naturalistes.
On a souvent cité les recherches de Hérissant, qui datent du siècle dernier (1). Cet observateur reconnut
le premier dans les coquilles deux substances, l’une organique, l’autre inorganique. Depuis, on
s est beaucoup occupé de la question au point de vue des différences de structure entre les coquilles
appartenant aux divers groupes, et au point de vue des distinctions zoologiques. Nous avons déjà
mentionné les travaux de MM. Shuttleworth et Carpenter, conçus dans cet esprit.
Les observations de M. Carpenter ont établi qu’il existait de grandes différences dans la structure
des coquilles bivalves; que chez les unes la partie organique consistait en une membrane d ’une
minceur extrême, ne présentant pas la plus légère trace de structure, même étant examinée sous les
plus forts grossissements; que chez les autres cette membrane, au contraire, offrait des cellules prismatiques
coniques, comme les loges d’un gâteau d'abeilles, et que dans tous les cas la substance
calcaire se trouve déposée en plus ou moins grande masse, en affectant des formes cristallines (2).
La coquille de la Pholàde appartient à la première des deux catégories indiquées par M. Carpenter.
Si au moyen d un acide on détruit toute la matière calcaire, on n ’o btient qu’une sorte de pellicule de
la plus grande ténuité, parfaitement homogène, sans aucune structure apparente. Encore cette membrane
est-elle si peu résistante, qu’il est nécessaire, pour en obtenir des lambeaux, d’étendre l’acide
avec beaucoup dteau, et de procéder ainsi avec beaucoup de soin et de lentèur. .Malgré les plus
grandes précautions, nous n avons jamais réussi néanmoins à dégager la membrane entière d ’une
coquille de Pholade. Aussi, en examinant des coupes minces de coquilles de ce genre, d e Mollusques,
on n’y voit pas cette structure élégante qui se rencontre chez un grand nombre d’autres types de la
classe des Acéphales. Point de disposition celluleuse; quelque chose de fort analogue à ce qui a été
découvert p ar M. Carpenter dans certaines portions de la coquille des Myes (3)1
Les coupes minces des coquilles de Pholade dactyle sont blanchâtres, transparentes, montrant sur
toute leur surface une structure tout à fait homogène; ce.sont de petits amas de màtière cristalline,
très-rapprochés les ups des autres. Entré ces amas, on distingue des canalicules fort irréguliers, et
s’anastomosant sur divers points (4).
SYSTÈME MUSCULAIRE.
Les muscles de la Pholade sont d ’un blanc pur; examinés sous de forts grossissements, ils se montrent
composés d’une multitude de fibres parallèles d’une extrême finesse; mais ces fibres n’ont ni la
netteté ni-la régularité qu’on leur trouve chexun grand nombre d’autres animaux (5); elles s’enchevê-
( I) Éclaircissements sur l’organisation jusqu'ici inconnue d’une quantité considérable de productions animales, et principalement
des coquilles des animaux. — Mémoires de l’Académie royale des sciences, p. 508 (1766).
(2) Annals and Magazine ofnatural history, vol. XII, p. 377 (4843).
(3) Report on the mioroscopic structure of shells. — Report of the British Association for llie advancement of science for 4844,
pl. v u , fig. 44 (4845); Report, etc., for 4847, p. 403 (1848); et Cyclopoedia of Anatomy and Physiology. art. Shell
(4) Pl. g fig. 6.
trent souvent les unes dans les autres, se divisent dans certains cas, et ne présentent point ces stries
transversales si apparentes et. si régulières dans les-muscles des .Articulés, par exemple.
Cette structure montre que les muscles des Acéphales ne peuvent pas agir, à beaucoup près, comme
ceux dès animaux plus élevés en organisation. Comparativement ils n’exécutent que des mouvements
vagues, mal déterminés; et il ne paraît pas que chaque faisceau de fibres ait la faculté, en aucun cas,
de se contracter tout à fait isolément : les autres faisceaux sont entraînés plus ou moins dans son mouvement.
Il est facile de se convaincre dé ce fait en voyant comment chez un Mollusque Acéphale à la
contraction d’une partie musculaire succède aussitôt la contraction de presque toutes les autres parties.
Aussi le système musculaire d’un de ces Mollusques, tout en ayant éncore un certain développement,
est-il fort simple en réalité.
, En examinant les muscles d ’une Pholade, on reconnaît de suite que nous n.en avons que fort peu
à distinguer : ce sont les ad d u c teu rs , les grands palléaux, les palléaux marginaux, les muscles des
siphons et les muscles abdominaux.
Muscles adducteurs..— Ces muscles servent à fixer l’animal à la coquille, et à maintenir le corps de
manière à éviter tout affaissement. Ils s’attachent par leurs extrémités aux deux valves de la coquille,
sur lesquelles ils laissent souvent d ’assez fortes impressions, dont les conchyliologistes tiennent compte
ordinairement dans leurs ouvrages descriptifs. Il y a deux adducteurs chez ÎeSjPholades ; certains auteurs
ont d it qu’il n ’y en avait qu’un seul; l’errèur est due à cette circonstance que l’adducteur antérieur
est très-petit, rudimentaire même, paraissant figurer là simplement.comme un témoin.
Si l’on considère une Pholade en dessus, il n’est pas facile d ’apercevoir l’adducteur antérieur, il est
recouvert par rle lobe'réfléchi du bord antérieur du manteau, constituant un muscle antéro-dorsal.
Pour en bien reconnaître la configuration, il est nécessaire de placer l’animal sur le dos, et de distendre
un peu le manteau et le pied en sens inverses (1). On voit sans peine alors que l’adducteur a la forme
d’un petit carré de très-médiocre épaisseur, formé de gros faisceaux de fibres dont les séparations sont
assez nettement indiquées , et qu’il n’est,pas aisé pourtant d ’isoler, à cause d’un certain enchevêtrement
dont nous avons déjà parlé.
L’adducteur postérieur est grand comparativement au premier, mais il est petit relativement à la
dimension qu’on lui trouve chez les Acéphales dont les valves d e la coquille sont pesantes. Il occupe la
partie:dorsale et postérieure du corps (2). Il est un peu plus'long que large, avec ses angles légèrement
arqués, comme la courbe de la coquille; son épaisseur est peu considérable, comme on le.voit
en .en considérant les extrémités latérales, c’est-à-dire les attaches (3). La disposition dés faisceaux de
fibres est semblable à celle de l’adducteur antérieur : c’est un arrangement q u i, au reste, ne pâraît
guère varier entre tous les Acéphales ; les différences se montrent surtout dans le volume et dans la
forme des adducteurs.
Ces muscles ont pour fonction d’écarter ou de rapprocher. les deux valves de la coquille; aussi.leur
dimension est- elle en rapport avec l’épaisseur, avec le poids de ces valves. La Pholàdè ayant une
(4j P l. i , fig- 4< a .
(2) Pl. i , fig. 9 c.
(3) Pl. I , fig. 40 ci