On comprend d e suite d’après ces faits comment s’exerce l’action du rétracteur. En se .contractant,
il tire le .chélicère par son bord inférieur, le fléchit, l’oblige à se replier sous le céphalothorax.
Si l’on compare les muscles qui ici impriment aux antennes-pinces leurs mouvements d’extension,
de redressement et de flexion latérale à ceux de ces mêmes appendices chez les Pédipalpes, on voit
que la principale différence consiste dans la séparation complète chez la Mygale de plusieurs faisceaux
qui sont rapprochés dans les types précédents. Cette séparation a l’avantage de permettre à des pièces
volumineuses comme les chélicères de prendre des positions plus variées et plus fixes tout à la fois.
A cet égard, le perfectionnement organique est donc plus prononcé chez la Mygale que chez le
Scorpion ou le Thélyphone.
Les muscles du crochet qui remplissent tout le corps du chélicère se montrent sous l’apparence de
lames verticales plus ou moins épaisses et pressées les unes contré les autres. Pour les considérer dans
leur forme générale, chacun isolément, il est ainsi nécessaire de renverser l ’appendicè sur.le côté.
D’après le mode d’articulation du crochet, on a vu précédemment que cette pièce ne peut guère
que s’élever et s’abaisser, toute flexion latérale étant à peu près impossible (4). Les muscles qui la
mettent e n je u sont donc exclusivement rétracteurs ou fléchisseurs e t extenseurs ou élévateurs. On se
rendra compte aisément de leur disposition en les prenant successivement dans un ordre déterminé
plutôt qu’en les divisant d’après leur mode d’action.
En détachant l’enveloppe légumentaire sur toute la face latérale interne du chélicère, on met
entièrement à nu le rétracteur interne. Celui-ci, qui occupe comme les autres toute la longueur de
l’appendice (2), est peu élevé e t ses fibres sont dirigées très-obliquement d’avant en arrière et de'bas
en haut. Il s’attache sur le côté de la voûte formée par le tégument; il est fixé d’autre part au bord
inférieur et latéral du crochet par un tendon très-court e t massif. On reconnaît de suite que ce muscle
en se contractant doit obliger le crochet à se replier sur le corps de l’antenne-pince.
Nous désignons sous le nom de rétracteur supérieur, un muscle plus volumineux que le précédent
e t appliqué contre la face extérieure de ce dernier. Il remplit toute la hauteur du chélicère (3) et
s’insère au crochet par une portion très-tendineuse, un peu au-dessus de l’attache du rétracteur
interne, de façon à déterminer une demi-flexion du crochet. Ce muscle est partagé supérieurement (4),
présentant ainsi deux chefs qui circonscrivent une assez large gouttière dans laquelle est reçue la
glande vénénifique (5).
Un extenseur appliqué par sa face interne contre le muscle qui vient d’être décrit, s’insère au bord
supérieur du crochet e t s’atlache d’autre p a rt, comme les précédents, à la paroi dorsale du .chélicère
(6). Ses fibres sont de même dirigées très-obliquement, mais ce muscle a beaucoup moins de
hauteur que les autres, il n e descend pas plus bas que la région moyenne de l ’appendice, e t il est limité
à son bord inférieur par une forte aponévrose. En se contractant il amène le redressement ou l’extension
du crochet, c’est-à-dire un mouvement contraire à celui que déterminent les muscles dont
le point d’insertion est au bord inférieur de la pièce mobile.
Enfin, un rétracteur ou fléchisseur externe, qui occupe tout le côté extérieur du chélicère (7), est
fixé comme les rétracteurs internes au bord inférieur du crochet; seulement celui-là est partagé en
deux faisceaux et même en trois, par suite d’une subdivision. Le premier ou le supérieur ést le plus
volumineux; il s’attache sur presque toute sa longueur à la paroi dorsale de l’appendice. Le second
(4) Page 209. (&) Pl. 4 2 b is, fig. 3c.
(2) Pl. 4 2 b is, fig. 4 e , e’. (6) PI- 42 b is , fig. 3 / e t kg .
(3) Pl. 42 b is , fig. i f . .(7) Pl. 42 Ws, fig. 3 ÿ .
(4) P l. 42 b is , fig. 3 e.
faisceau est partagé à son tour en deux faisceaux secondaires, séparés l’un de l’autre dans leur portion
antérieure par une large aponévrose ë t isolés ensuite* de manière à fournir deux chefs bien distincts;
l’un inséré en arrière du faisceau supérieur, dans l ’anglè que forme la voûte dorsale avec le bord latéral
de l’antenne-pince, l’autre, ou l'inférieur* à ce bord latéral:lüi-mème; D’après la position et l’espace
restreint qu’occupent les points d’attache fixes des deux dernières portions du muscle rétrdcteur
externe, on conçoit que les fibres qui les constituent, au lieu d’être obliques de bas en h aut, comme
dans les autres muscles du crochet, doivent suivre un plan à peu près horizontal.
En considérant le nombre e t le mode d’action dés différents muscles qui mettent en jeu le crochet
de l’antenne-pince, on voit que le mouvement de redressement ou d’extension du crochet est
déterminé par un seul muscle, tandis que le mouvement de flexion ou de rétraction, qui semble
devoir s’effectuer avec moins,d’effort, est imprimé à des degrés divers par plusieurs muscles infiniment
plus puissants que le premier; deux du côté interne, dont l’un présente un volume très-considérable,
un autre du côté externe, décomposé en trois muscles et capable ainsi de faire varier le degré de
flexion. Il n ’est pas difficile au reste de se rendre compte du but de la nature dans cette inégale
répartition des fonctions de ces muscles. Nous constatons, en effet, que l’extension du crochet ne peut
jamais être arrêtée par aucun obstacle, au lieu que dans le mouvement contraire, ayant surtout pour
objet de retenir une proie vivante, l’article mobile doit pouvoir résister à des efforts souvent très-
énergiques.
Le système musculaire des chélicères de la Mygale, que nous retrouverons avec les mêmes caractères
anatomiques et physiologiques chez tous les autres Aranéides, diffère de celui des Pédipalpes
par une complication plus grande, par un véritable perfectionnement. Il s’agit pourtant d’animaux
quj^les uns et les autres, s’emparent également de proie vivante; néanmoins, la raison, outre celle
qui déjà a été signalée (1) de la différence dans le perfectionnement organique des antennes-pinces
des Aranéides et des Pédipalpes, est manifeste. Les Pédipalpes trouvent, dans la conformation de
leurs pattes-mâchoires puissamment armées, un moyen de retenir leurs victimes; ce moyen fait
défaut chez les Aranéides.
Muscles ôculo-moleurs. — Sous le tégument solide, on trouve les yeux enchâssés dans un tissu
membraneux. Celui-ci est tapissé par des fibres musculaires adhérentes à la paroi supérieure du
céphalothorax, qui sont un peu divergentes de la ligne médiane vers les parties latérales (2). En
avant, la membrane est repliée vers la région frontale et également garnie dans celte portion de
fibres musculaires qui descendent verticalement, ayant leur point d’attache au bord antéro-inférieur
du bouclier, céphalothoracique. Ces fibres musculaires très-délicates agissent nécessairement sur la
membrane à laquelle elles sont adhérentes, et peuvent ainsi produire d’imperceptibles déplacements
des yeux e t sans doute amener de la sôrte, suivant les circonstances, de légères modifications dans
la vision.
Muscles de l'appendice buccal. — Les muscles de la pièce buccale consistent en un rélracteur et un
élévateur; l’un et l’autre pairs.
Le rétracteur, peu volumineux et composé de fibres parallèles, s’insère à l’angle basilaire de
(4) Page 209. (2) Pl. 42 b is , fig. 3 6 e t fig. 6 d.