De nouvelles études sur la charpente osseuse des Reptiles ne semblent donc pas devoir produire
de bien grandes découvertes, e t cependant lorsqu’on rassemble tous les faits aujourd’hui connus sur
ce su je t, on s’aperçoit vite q u e , même sur ce po in t, la science est loin encore d’être arrivée à son
terme. Il y a des lacunes, il y a en foule des détails incomplètement observés. Entre les représentants
des familles, les modifications du squelette ont été peu suivies. On s’est occupé médiocrement de la
nature des articulations, e t la structure des os, dans chacune des divisions de la classe des Reptiles,
n ’a pas été l’objet d’observations comparatives.
Si l’on considère ce que les recherches entreprises jusqu’ici ont produit pour la connaissance des
téguments, dans cette grande division dn règne animal où les téguments offrent des variations des
plus considérables, on trouvera que c’est peu encore. Une idée générale de la structure de la peau a
été acquise; des notions assez étendues sur les glandes cutanées ont été fournies p ar les investigations
de plusieurs naturalistes habiles; la disposition des écailles et des plaques cutanées, observée surtout
p a r les classificateurs en vue de la caractérisation des genres et des espèces, a été décrite avec soin
dans tous les types; mais on a presque complètement négligé l’étude de la structure de ces parties, et
sous le rapport physiologique, u n seul auteur, William Edwards (1), a constaté, par une expérience,
que la peau des Lézards joue un rôle important dans la respiration (2). A cela il faut ajouter que lés
changements de couleurs que subissent les Caméléons ont commencé à être expliqués d’une manière
assez satisfaisante p a r les auteurs qui ont fait connaître diverses particularités dans la structure de la
peau de ces Reptiles.
A l’égard du système musculaire, les investigations des anatomistes sont demeurées assez limitées.
Les muscles des Chéloniens, il est v rai, ont été étudiés e t représentés avec une remarquable perfection
p a r Bojanus; les observations de Home, de Hübner, de d’Alton, ont appris beaucoup sur l ’arrangement
des muscles chez les Ophidiens; des détails touchant la disposition de quelques-uns des agents
des mouvements chez les mêmes animaux, chez les Crocodiles e t les Sauriens, consignés dans des
mémoires particuliers, et les caractères généraux de l’appareil musculaire d’un certain nombre de
représentants de la classe des Reptiles, se sont trouvés enregistrés dans les traités d’anatomie comparée
(3). Cependant la connaissance du système musculaire reste encore fort incomplète; les modifications
entre les divers types n e sont pas en général précisées d ’une manière suffisante : aussi n’a-t-on
pas le moyen d’expliquer les différences si grandes des mouvements qu’exécutent les Reptiles, les uns
remarquables par leur extrême agilité, les autres par leur lenteur. La comparaison des muscles des
animaux de ce groupe avec ceux des vertébrés supérieurs n ’a pas non plus été poussée aussi loin qu’il
serait à désirer.
Dès le temps où l’analomie des animaux commença à exciter l’intérêt, le cerveau des Reptiles fut
examiné, à la vérité assez superficiellement ; on' reconnut toutefois qu’il offrait les mêmes parties que
chez les Oiseaux, avec des modifications dans le développement relatif des différentes portions suivant
les types; qu’il était cependant d’une forme plus allongée ; que les hémisphères, bien moins développés
que dans les vertébrés supérieurs, ne recouvraient point les tubercules optiques. On constata
ensuite que la moelle épinière s’étend dans toute la longueur du canal vertébral, et qu’elle offre chez
les espèces pourvues de membres des renflements aux points d’où s’échappent leurs nerfs. Les nerfs
(1) De l’Influence des agents physiques sur la vie, p. 127-128. — Paris (1824).
(?) Nous avons indiqué récemment les principaux résultats de nos recherches sur la structure des écaille? chez les Sauriens et
les Ophidiens, e t sur le rôle de ces parties tégumentaires dans la respiration. — Comptes rendus de l’Académie des sciences.
T . L I, p . 262 (1860)..
(3) Voyez le plus récent; Stannius, Handbuch der Zootomie.
ne furent d ’abord suivis que d ’une façon fort incomplète. Une première étude approfondie de lanévro-
logie d’un Reptile fut donnée pour la Tortue par Bojanus, et plus tard les nerfs crâniens e t le grand
sympathique devinrent l’objet dé recherches détaillées de la p art de plusieurs anatomistes, principalement
de Swan, de Yogt, de Müller et de Bendz. En dernier lieu, les investigations de M. Fischer, dë
Hambourg, sur un type de l’ordre des Émydosauriens et sur différents Sauriens, ont fait connaître eii
grande partie la névrologie des Reptiles. Néanmoins, la conformation du cerveau n ’a été étudiée chez
aucun type d ’une manière assez approfondie pour permettre une comparaison complète avec le cerveau
des autres vertébrés, et à p art le travail de Bojanus relatif à la Tortue, on ne possède l’ensemble du
système nerveux d’aucun Reptile étudié dans ses rapports avec les autres parties de l’organisme.
Les organes des sens ont été aussi le sujet de recherches nombreuses, même sans compter les observations
trop superficielles des anciens anatomistes sur l’oeil du Caméléon. On a acquis des connaissances
assez sérieuses sur la conformation des y e u x chez différents types par suite des travaux dë
Sômmering, de Blainville, de Bojanus, de Treviranus, de Müller. Les études sur la structure intime
des p a rties, de MM. Hannover, Lersch, etc., ont apporté à la science beaucoup de détails que nous né
pourrions indiquer ici sans entrer dans des descriptions qui doivent trouver leur place ailleurs.
Les travaux que nous avons mentionnés ont appris qu’il existait des variations considérables dans
l’appareil auditif des Reptiles ; que cet appareil, chez les Crocodiles, a une grande ressemblance avec'
celui des Oiseaux; que les Ophidiens ne possèdent pas la caisse du tympan qui existe chez les Sauriens.
Il a été constaté aussi, pour l’organe de l’olfaction, que la cavité nasale est toujours cartilagineuse e t
porte sur son plancher, chez un grand nombre de Reptiles, un cornet osseux; que les ouvertures postérieures,
situées d’ordinaire vers le milieu de la cavité nasale, sont portées très en arrière au voisinage
du larynx chez les Crocodiles, où il existe une sorte d e voile du palais ; qu’une glande nasalë particulière
se rencontre chez les Ophidiens, ainsi que dans plusieurs Sauriens.
L’appareil alimentaire est déjà bien connu chez tous les principaux représentants de la classe des
Reptiles. L’armure buccale, réduite chez les Chéloniens à une simple lame cornée qui revêt les
mâchoires, consiste chez tous les autres Reptiles en un système dentaire dont les variations sont
extrêmes suivant les groupes. Aussi les zoologistes particulièrement ont observé et comparé les dents
entre les différentes espèces dans le b ut d’en obtenir des caractères propres à la distinction des familles
et des genres. Après les faits signalés par Cuvier dans ses recherches sur les ossements fossiles,
Duméril et Bibron se sont attachés à cette étude, et le premier de ces deux auteurs s’est appliqué à
grouper les Serpents d’après les caractères fournis p ar les dents.
On ne s’en est pas tenu à l’examen des formes e t du mode d’implantation; la structure intime des
dents a été observée chez plusieurs types vivants et.fossiles, et par la connaissance de cette structure
on a obtenu le moyen de déterminer des fragments fossiles. C’est à M. R. Owen, comme on le sait,
que sont dues les belles recherches sur ce sujet, qui ont enrichi la science il y a près de vingt ans.
Une connaissance générale de la conformation de l’appareil digestif chez tous les principaux représentants
de la classe des Reptiles est aujourd’hui acquise, par suite des travaux dont nous avons donné
rémunération. La langue, si variable entre les différentes espèces, a été surtout l’objet d’investigations
nombreuses, et l’on a vu les efforts des anatomistes pour trouver la cause des mouvements si
remarquables de la langue des Caméléons. Il est établi q u e , chez tous les Reptiles, il existe des glandes
salivaires d’ordinaire peu développées. Dans les Chéloniens, ou au moins dans les Tortues terrestres
et chez divers Sauriens, ces glandes consistent en un amas de cryptes situé sous la langue, tandis que
chez les Crocodiles, outre les cryptes muqueux de la langue, on a constaté, sur les côtés de l’arrière-
bouche, la présence de glandes salivaires regardées comme analogues aux amygdales des vertébrés