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m ate rn e lle du jeu n e homme), se ré u n is sa it à dîner au to u r
d’un p la t composé de champignons a p p a rten a n t à l’espèce
Amanita citrin a. Ces champignons av aien t été cueillis la
veille p a r M. L ... dans un lieu bas e t humide, su r la rive
droite du Gardon, dans le te rra in sablonneux et ombragé
d’une ch âtaig n e raie. Ils av aien t été accommodés sans subir
la coction p ré alab le à l’eau b o u illan te à laquelle les paysans
des Cévennes ont coutume de so um e ttre tous les champignons
qu’ils ap p ellen t « blancs ».
L e repas term in é, chacun p a s s a la soirée de son côté sans
épro u v er le moindre malaise. Ce ne fut que le lendemain,
dimanche 9, que les premiers acc id en ts é c la tè ren t, e t que
je fus appelé à les combattre. A ma première visite, à
8 h eu res environ, je me tro u v e en pré sen c e de q u a tre malades
: le jeu n e T ..., M. L ..., M ^ 'L ..., une des g ra n d ’mères
de l’enfant, et M. T ... ’fo u s les q u a tre av aien t éprouvé les
p rem iers symptômes de l’in to xication dans la matinée, vers
5 heu res, soit environ dix heu res ap rès l’ingestion.
I. — L e jeu n e T ..., en fan t de 12 an s, bien constitu é , a
absorbé avec son g ran d -p è re , M. L ..., la m ajeure p a rtie des
champignons. Nous le trouvons dans un é ta t d’anxiété
e x trêm e ,.la face pâle, les yeux enfoncés, en proie à des vomissements
fréq u en ts, suivis de tran ch é e s e t d ’évacuations
alvines rép étée s e t douloureuses. Les m atière s expectorées
ex h alen t une forte odeur de champignons, d ont la maison
e s t re s té e imprégnée p en d an t plusieu rs jo u rs. L es p remières
selles ont consisté, pour tous les m alades, en une pu ré e b ru n
â tre de faible consistance. P lu s ta rd , elles so n t devenues
g laireu ses, e t même san g uinolentes, accompagnées de sen sibilité
abdominale et épig a striq u e. Ces selles av a ien t une
odeur fétide de champignons corrompus, que l’en to u rag e des
malades av a it peine à supporter.
L e pouls e st d’une m isère extrême : les b a ttem e n ts du
coe u r so n t sourds, la re sp ira tio n , d ’abord normale, devient
fréq u en te le soir. Du côté du système n erveux il existe un
peu de stu p eu r, mais aucun tro u b le du mouvement ou de la
sensibilité. Chez ce malade comme chez tous les au tre s
d ’ailleu rs, l’adynamie e s t extrême.
L e tra item e n t in stitu é dès le m atin pour ces q u a tre m a lades
co n sista en huile de ricin et quelques g o u tte s de
liq u eu r d ’IIoffmann. L es vomissements o piniâtres fu ren t
combattus p a r les moyens ordin aires e t l’iodure de p o tassium
adm in istré à l’in té rieu r. Comme stim u lan ts , th é, café, rhum
e t frictions sèches sur to u t le corps.
Vers le soir, le malade épro u v a quelques c rampes dans
les muscles des mollets. Néanmoins, il conserve assez de
force pour se lev e r e t sa tisfaire ses nombreux besoins. Le
pouls re s te tou jo u rs faible ; dans la nuit, p e rsistan c e des
mêmes symptômes. Ve rs 2 h eu re s du matin, il su rv ien t un
lég e r d élire, de l'oppression ; le malade m eu rt dans un accès
de dyspnée p a r affaiblissement p ro g res sif des co n tractions
du coeur.
II. — L e deuxième malade, M. L ..., grand-père du p ré c é d
en t, a 61 an s ; il e s t extrêmem en t adipeux, d’un poids de
120 cà 130 kilog.; doué d’un bon ap p érit, il a ingéré une forte
dose de l’a lim en t toxique. Un e h eu re environ a v an t son
petit-fils, il a éprouvé des symptômes de cholérine, accompag
n és chez lui de crampes violentes. Son pouls e s t im p e rc
eptible dès n o tre p remière visite . L e coeur b a t len tem en t et
so u rd em en t ; il e s t impossible d’en ap ercevoir le choc à la
p a lp a tio n . L a s tu p eu r de ce malade e s t profonde, l’adynamie
complète. Dan s la n u it du dimanche au lundi, il a éprouvé,
en v o u lan t de sc en d re de son lit, des v e rtig es suivis de chute
avec p e rte complète de to u t sen tim en t. L a mo rt e s t su rv e nue
le lundi v e rs 2 h eu re s du soir, à la suite d’un é ta t comateu
x dans lequel M. L ... é ta it plongé depuis le matin
8 heu res.
III. — L e troisième empoisonné e st M. T ..., gendre du
p ré céd en t, le plus in té re s s a n t de tous à cau se de la durée
des accidents e t des symptômes qu’il a p ré sen té s. C’e s t un
homme de 39 an s, d’une complexion moyenne, s ’é ta n t souv
e n t p la in t d’accidents dyspeptiques. Il a ab so rb é fort peu
de l’a lim en t toxique « ce qu’on p eu t en p ren d re au b o u t d’une
fo u rch e tte » au dire de sa femme. L es a cc id en ts on t débuté
p our lui le dimanche, v e rs 5 heures du matin. Voniisse-
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