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voluptas cibi ancipitis ? » et Athanase Kircher les
condamne sans réserves : « Fungus qualiscumque sit,
semper malignus est, semper exitialium qualitatum
apparatu instructus » ; opinion partagée par de nombreux
médecins ou écrivains (1). Si André Theuriet a
écrit quelque part qu « on croit entendre chanter des
violons dans le ciel en dégustant un plat de champignons
», en revanche l’humoristique Gavarni a inscrit
cette légende au bas d’un de ses dessins, représentant
un ivrogne et sa femme en voie de confidences :
« Les champignons, ma biche, c’est comme les
hommes. Rien ne ressemble aux bons comme les
mauvais ! » L t Saint-François-de-Sales lui-même :
tt Je vous dis des danses, Philothée, comme les
médecins disent des potirons et des champignons ; les
meilleurs n ’en valent rien... Mangez-en peu et peu
souvent, disent les médecins, parlant des champignons
: car pour bien apprestés qu’ils soient, la
quantité leur sert de venin... Les champignons, selon
Pline, estans spongieux et poreux comme ils sont,
attirent aysément toute l’infection qui leur est autour;
si que, estans près des serpens, ils en reçoivent le
venin... » (Introduction à la vie dévote. Chapitre
XXXIII p. 199, in OEuvres choisies de Saint-François-
de-Sales, édition Pagès, Paris 1890). A plusieurs
reprises même, des ordonnances de police ont interdit
la vente des champignons sur les marchés de Paris
(1) Réflexions de M. Emonot sur un mémoire relatif aux effets
dangereux des champignons, communiqué par M. L... Journal
gèn. de, méd., de chir. et de pharmacie, rédigé par Sédillot. R® séiiSj
H® année, t. XXV, p. 24.)
OU d e s g r a n d e s v i l l e s , e t m ê m e d é f e n d u l e u r récolte.
Les champignons ne méritent pas plus cet ostracisme
aveugle de leurs détracteurs, que l’enthousiasme
exagéré de certains amateurs. Bien plus, leur réputation
de nocivité ne se justifie guère pour la plupart
d’entre eux, et c’est ici qu’il y a lieu de discuter au
préalable la question des champignons dits vénéneux.
Nous prouverons plus loin par l’examen des observations
d’empoisonnements authentiques, où l’espèce
de champignon incriminé a été scientifiquement définie,
que presque tous les accidents mortels ou graves
sont imputables à un très petit nombre d’espèces
confondues avec d’autres champignons éminemment
comestibles (1). Déjà M. Bourquelot à la suite d’une
observation d’empoisonnementparl’Amam'íe bulbeuse,
était arrivé à cette conclusion, que les seuls champignons
vraiment vénéneux étaient les Amanites, et
même seulement quatre espèces d’Amanites (2). L ’analyse
de tous les faits connus jusqu’à ce jour, nous
permet de confirmer cette opinion en la complétant.
En effet, il n’existe jusqu’ici dans la science,
aucun cas authentique d’empoisonnement mortel
occasionné par les champignons autres que les Amanites,
et nous établirons plus bas que les espèces
d’Amanites toxiques peuvent même se diviser en deux
groupes, celui de l'Amanite bulbeuse, sûrement et
(1) Revue mycologique, VII (1885) p. 138. La mycologie au Congrès
international de botanique et d’horticulture à Anvers (1885) ;
15® question : Les champignons cdmestihles et les espèces vénéneuses
qui leur ressemblent.
(2) Bull. soc. mycol. de France, VIII (1892) p. 162, 168.