Enfin, Sékomé finit par promettre que les canots seront tirés sur la
grève dès demain. « J ’ai ta parole. » « C’est bien », me répond-il.
Le campement est établi sous un beau mochnba, espèce de figuier,
à l ’écorce claire et au bois très tendre. Cet arbie a douze mètres de
circonférence; il est enlacé par une plante grimpante aux fleurs
blanches dont la forme et le parfum rappellent le jasmin ; des
palmiers nains croissent à sa base. Une fois toutes choses en ordre
et l ’esprit en repos, je tiens à examiner à loisir cette.admirable vue.
Devant nous, le Zambèzè se divise en plusieurs bras, au. milieu
desquels se trouvent des lies. Le fleuve tourne brusquement au
sud-est pour former les chutes de Ngonyé (Gonye), vers' lesquelles
nous nous dirigeons. Nous traversons l’un de ses bras en sautant de
pierre en pierre et nous arrivons à la chute elle-même, Depuis les
énormes blocs de la rive gauche sur lesquels nous nous trouvons, le
fleuve tourbillonne au milieu des rochers; au centre, il forme un vaste
entonnoir où tout est écume et bouillonnement. Sur la rive droite,
il tombe par une chute verticale d’environ 25 mètres de hauteur;
l’ensemble doit avoir une largeur de 200 mètres. Quelque splendide
que soit ce spectacle, il n’est sans doute pas à comparer avec celui
qui nous attend dans quelques semaines aux « Victoria Falls » ou
« Chutes du Zambèze » proprement dites.
En revenant, je tire un crocodile paresseusement étendu au soleil.
Nous apprenons que tout à l’heure, une embarcation où étaient des
indigènes et qui remontait le courant, a été entraînée dans les
rapides; deux enfants ont disparu dans les flots.
En guise d’avertissement, Sékomé nous dit que lorsque nous descendrons
le fleuve, nous rencontrerons des mères hippopotames avec leurs
petits; elles sont très dangereuses. Il parait que lorsque le petit hippopotame
est né, sa mère lui fait un refuge au bord de l’eau dans les
LE HALAGE DES PIROGUES.
D ’a p r è s u n e p h o t o g r a p h i e d e l ’a u t e u r .
roseaux; si par mégarde un canot s’en approche, elle fond sur lui poulie
mettre en pièces. Au bout de quelques jours, elles portent leur progéniture
sur leur dos. En outre, comme chacun le sait, les hippopotames
peuvent rester plusieurs minutes sous l’eau; il arrive fréquemment
qu’en venant respirer à la surface, ils font chavirer les pirogues.
* * %
19septembre. — Sékomé à tenu parole; au jour fixé, ses hommes
arrivent pour tirer les canots sur la terre ferme. Les environs de Séoma
sont malsains; la fièvre y fait beaucoup de victimes. A cinq minutes
du campement, nous visitons un vaste terrain où nous trouvons une
quantité de tombes disséminées au milieu des broussailles; elles sont
-rondes- et couvertes de débris. Les objets, ayant appartenu au défunt
sont brisés sur sa fosse; ici des récipients en bois nous indiquent le