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événements de la journée. Peu à peu,
ils s’étendent auprès du feu; quelques
uns n’ont pas même une peau
de bête sauvage pour protéger du
froid de la nuit leurs corps presque
entièrement nus ; aussi s’appro-
client-ils si près des tisons que
plusieurs portent des traces de brûlures
profondes. Deux ou trois
d’entre eux possèdent un instrument
de musique qu’ils appellent
Aangombio : des lamelles de fer,
inégales, figurent dix notes; elles
sont fixées à une mince planchette
LE CHEF SOUROUKOUROUKOUROU.
Dessin de Thiriat. D’après une photographie de l'auteur
de bois qui repose à son tour sur une calebasse évidée. Ils accompagnent
ainsi des mélodies fort douces et tristes qui ne cessent parfois
que bien avant dans la soirée. Les feux sont alimentés pendant
la nuit et en cas de réveil, il est rare de ne pas entendre encore: ici
et là des chuchotements.
Le porteur Liponé et l ’un dé ses camarades sont malades de la
fièvre; je les traite avec de fortes doses de quinine. Ils sont incapables
de porter leurs charges et j ’ai la chance de pouvoir aujourd’hui
engager deux hommes nouveaux; parmi eux Litaba dont, outre
le pagne, l’équipement de voyage se compose d’une sorte de couvre-
chef, tressé avec la fibre du palmier.
(¡août. — Nous arrivons à un ravissant petit lac d’environ un
demi-kilomètre de longueur, aux eaux d’azur et entouré de verdure.
LE LAC BLUE WATER,
SOURCE PRÉSUMÉE DE LA RIVIÈRE IKUÉ.
Dessin de Boudier.
D'après une photographie de l’auteur.
Je lui donne le nom de « Blue Water »; c’est dans ce lac que la
rivière, lkué (Ikwe), affluent de la rive droite du Njoko, doit prendre
sa source. Le paysage, sauf l’absence des sapins, rappelle certains
sites du Jura. Je ne crois pas trop m’avancer en disant que ce lac ne
figure encore sur aucune carte géographique.
Privé de viande depuis plusieurs jours, j ’appréciais fort une pintade
tuée hier au soir, lorsque arrive de la part du chef Souroukou-
roukourou, homme prévoyant, un second guide qui doit servir de compagnon
de route au premier; son nom est Damousiba. Ses cheveux,
entrelacés de fibres végétales, forment une infinité de petites tresses,
tandis que le sommet de la tète de son camarade est modestement
orné d’une touffe de plumes.
Accompagnés de ces nouvelles recrues, nous longeons une longue
colline et nous rejoignons le vallon où coule la Ivuemba (Kwemba),
autre affluent de la rive droite du Njoko. Après avoir enfoncé dans
un terrain mouvant, spongieux, avec le sentiment désagréable qu il
serait possible d’y disparaître en entier, nous pensions pouvoir fran